Arrêt n° 171 de la Cour constitutionnelle - Code du travail - reclassement professionnel interne - licenciement

ARRET de la Cour constitutionnelle - 4 novembre 2022  

 

Dans l’affaire n° 00171 du registre

 

ayant pour objet une question préjudicielle soumise à la Cour constitutionnelle, conformément à l’article 6 de la loi modifiée du 27 juillet 1997 portant organisation de la Cour constitutionnelle, par le Conseil supérieur de la sécurité sociale, suivant arrêt numéro 2022/0135 rendu le 31 mars 2022 (numéro du registre COMIX 2021/0184), déposé au greffe le 6 avril 2022, dans le cadre d’un litige

Entre :

 

PERSONNE1.), demeurant à F-ADRESSE1.),

et 

l’ETAT DU GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG, représenté par Monsieur le Ministre d’Etat, dont les bureaux sont établis à L-1341 Luxembourg, 2, Place de Clairefontaine,

la Cour,

 

composée de

Roger LINDEN, président,

Francis DELAPORTE, vice-président,

Christiane JUNCK, conseiller,

Agnès ZAGO, conseiller,

Thierry HOSCHEIT, conseiller,

 

Viviane PROBST, greffier,

 

 

Sur le rapport du magistrat délégué et les conclusions déposées au greffe de la Cour constitutionnelle le 12 mai 2022 par Maître AVOCAT1.), avocat à la Cour, pour l’ETAT DU GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG et celles déposées le 23 mai 2022 par la société à responsabilité limitée SOCIETE1.), représentée par son gérant, Maître AVOCAT2.), avocat à la Cour, au nom de PERSONNE1.),

 

l’affaire ayant été prise en délibéré de l’accord des mandataires et sans leur parution à l’audience publique de la Cour constitutionnelle du 15 juillet 2022, conformément à l’article 2, paragraphe 1, de la loi du 30 juillet 2021 portant adaptation temporaire de certaines modalités procédurales en matière civile et commerciale,

 

 

rend le présent arrêt :

 

 

Par décision du 10 janvier 2014 de la Commission mixte de reclassement des travailleurs incapables à exercer leur dernier poste de travail (ci-après « la Commission mixte »), PERSONNE1.) a bénéficié d’un reclassement professionnel interne auprès de son employeur.

 

PERSONNE1.) a été licenciée le 10 juillet 2020 avec préavis pour des motifs économiques.

 

Par décision du 29 janvier 2021, la Commission mixte a refusé d’assimiler PERSONNE1.) à un bénéficiaire d’une décision de reclassement professionnel externe au motif que les conditions de l’article L.551-6, paragraphe 2, du Code du travail n’étaient pas remplies.

 

Saisi d’un recours contre cette décision, le Conseil arbitral de la sécurité sociale a, par jugement du 21 mai 2021, déclaré le recours non fondé et confirmé la décision de la Commission mixte.

 

Sur appel interjeté par PERSONNE1.) contre ce jugement, le Conseil supérieur de la sécurité sociale a, avant tout autre progrès en cause, par arrêt du 31 mars 2022, saisi la Cour constitutionnelle de la question préjudicielle suivante :

 

« L’article L.551-6, paragraphe 2 issu de la loi du 23 juillet 2015 portant modification du code du travail et du code de la sécurité sociale concernant le dispositif du reclassement interne et externe, en ce qu’il crée une distinction entre un salarié d’une petite structure, dont le contrat a cessé pour motifs économiques, et un salarié d’une grande structure dont le contrat a cessé en raison d’un licenciement collectif c’est-à-dire également pour motifs économiques, à savoir que le salarié d’une grande structure en reclassement professionnel interne peut demander un reclassement professionnel externe si son contrat a cessé en raison de la cessation d’activité de son employeur ou en raison d’un licenciement collectif tandis que le salarié d’une petite structure dans la même situation n’a pas la possibilité de demander un reclassement professionnel externe, est-il conforme à l’article 10bis de la Constitution ? ».

 

L’ETAT DU GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG conclut à l’irrecevabilité de la question préjudicielle, sur base de l’article 6, paragraphe 2, c), de la loi modifiée du 27 juillet 1997 portant organisation de la Cour constitutionnelle, au motif que par l’arrêt n° 00169 du 3 février 2022, la Cour Constitutionnelle a statué sur une question ayant le même objet.

 

L’article 95ter (6) de la Constitution est de la teneur suivante :

 

« Les dispositions des lois déclarées non conformes à la Constitution par un arrêt de la Cour Constitutionnelle cessent d’avoir un effet juridique le lendemain de la publication de cet arrêt dans les formes prévues pour la loi, à moins que la Cour Constitutionnelle n’ait ordonné un autre délai. (…). ».

 

PERSONNE1.), en reclassement professionnel interne, a fait l'objet d’un licenciement individuel pour motif économique, partant a perdu son emploi pour une raison indépendante de sa volonté autre que la cessation d’activité de son employeur ou un licenciement collectif.

 

Par l’arrêt n° 00169 du 3 février 2022, la Cour constitutionnelle a dit que l’article L. 551-6, paragraphe 2, du Code du travail n’est pas conforme au principe d’égalité devant la loi consacré par l’article 10bis, paragraphe 1, de la Constitution considéré ensemble avec l’article 111 de la Constitution, « en ce que la différence de traitement résultant de cette disposition de la loi, ensemble son paragraphe 3, exclut les salariés en reclassement professionnel interne, contrairement aux salariés en reclassement externe, du maintien de leur statut de salarié en reclassement professionnel dans le cas de la perte de leur emploi pour une raison indépendante de leur volonté autre que la cessation d’activité de leur employeur ou un licenciement collectif ».

 

En ce que la réponse donnée par la Cour constitutionnelle vise la situation du salarié en reclassement professionnel interne, comparée à celle de tout salarié en reclassement professionnel qui a perdu son emploi pour une raison indépendante de sa volonté autre que la cessation d’activité de son employeur ou un licenciement collectif, elle s'applique nécessairement au cas d'espèce.  

 

L’arrêt du 3 février 2022 a été publié le 8 février 2022 au Journal officiel du Grand-Duché de Luxembourg, Mémorial A, de sorte que l’article L.551-6, paragraphe 2, du code du travail avait cessé d’avoir un effet juridique à la date à laquelle le Conseil supérieur de la sécurité sociale a statué.

 

Il s’ensuit que la question préjudicielle posée par le Conseil supérieur de la sécurité sociale est sans objet.

 

 

PAR CES MOTIFS,

 

la Cour constitutionnelle :

 

 

dit la question préjudicielle sans objet;

 

dit que dans les trente jours de son prononcé, l’arrêt sera publié au Journal officiel du Grand-Duché de Luxembourg, Mémorial A ;

 

dit qu’il sera fait abstraction des nom et prénom de PERSONNE1.) lors de la publication de l’arrêt au Journal officiel ;

 

dit que l’expédition du présent arrêt sera envoyée par le greffe de la Cour constitutionnelle au Conseil supérieur de la sécurité sociale du Grand-Duché de Luxembourg, dont émane la saisine, et qu’une copie conforme sera envoyée aux parties en cause devant cette juridiction.

 

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le président Roger LINDEN, en présence du greffier Viviane PROBST.

 

 

 

 

 

 

signé Viviane PROBST

greffier

signé Roger LINDEN

président

 

Dernière mise à jour