Le tribunal de police d'Esch-sur-Alzette a déféré trois questions préjudicielles à la Cour constitutionnelle concernant l'obligation de porter des masques de protection dans le cadre de la lutte contre la pandémie

- Covid-19 -

Jugement no: 125/2022                                                                        

Note: 10232/21/ED

PRO JUSTITIA

Audience publique du 21 avril 2022

Le tribunal de police d'Esch-sur-Alzette, arrondissement judiciaire de Luxembourg, a rendu le jugement qui suit:

 

Dans la cause entre:

 

Monsieur le Procureur d’Etat près le tribunal d’arrondissement de Luxembourg

- demandeur - suivant citation à prévenu datée du 16 février 2022,

 

et:

 

P.1.), né le (…) à (…), demeurant à L-(…),

- prévenu - comparant par Maître Christian BOCK, avocat à la Cour, demeurant professionnellement à Luxembourg, à l’audience publique du 17 mars 2022.

 

Faits

 

Par citation du 16 février 2022, Monsieur le Procureur d’Etat près le Tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg a requis P.1.) à comparaître à l’audience publique du 17 mars 2022 du tribunal de police de céans afin d’y répondre de l’infraction suivante:

 

« en infraction à l’article 4, paragraphe (2) de la loi modifiée du 17 juillet 2020 portant introduction d’une série de mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 et modifiant la loi modifiée du 25 novembre 1975 concernant la délivrance au public des médicaments et la loi modifiée du 11 avril 1983 portant réglementation de la mise sur le marché et de la publicité des médicaments,

 

ne pas avoir respecté l’obligation du port du masque en toutes circonstances pour les activités ouvertes à un public qui circule et qui se déroulent en lieu fermé, sauf pour les activités qui se déroulent sous le régime du covid check, ainsi que dans les transports publics »

 

A l’appel de la cause, Maître Christian BOCK, avocat à la Cour, demeurant professionnellement à Luxembourg, se présenta pour P.1.) qu’il déclara représenter.

 

Monsieur le juge-président rappela l'acte qui a saisi le tribunal.

 

Le représentant du ministère public, Monsieur magistrat1, premier substitut de Monsieur le Procureur d’Etat, fut entendu en ses conclusions.

 

Maître Christian BOCK, préqualifié, fut entendu en les explications et moyens de défense de P.1.).

 

Tant le représentant du ministère public que le mandataire du prévenu furent entendus en leurs répliques et dupliques respectives.

 

Le mandataire du prévenu eut la parole en dernier.

 

Sur ce, le tribunal prit l'affaire en délibéré et rendit à l'audience publique de ce jour, à laquelle le prononcé avait été fixé,

 

le jugement

 

qui suit:

 

Vu l’ensemble du dossier répressif et plus particulièrement le procès-verbal numéro 15469 daté du 27 octobre 2021 tel qu’établi par la police grand-ducale, commissariat Esch (C3R).

 

Vu la citation à prévenu du 16 janvier 2022 régulièrement adressée à P.1.).

 

Aux termes de la citation à prévenu, le ministère public reproche à P.1.) d’avoir commis l’infraction suivante:

 

« Comme auteur,

 

Le 30/09/2021, vers 13:40 heures, à (...), au magasin " MAG.1.) ", sans préjudice des circonstances de temps et de lieu exactes,

 

En infraction à l’article 4, paragraphe (2) de la loi modifiée du 17 juillet 2020 portant introduction d’une série de mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 et modifiant la loi modifiée du 25 novembre 1975 concernant la délivrance au public des médicaments et la loi modifiée du 11 avril 1983 portant réglementation de la mise sur le marché et de la publicité des médicaments,

 

Ne pas avoir respecté l’obligation du port du masque en toutes circonstances pour les activités ouvertes à un public qui circule et qui se déroulent en lieu fermé, sauf pour les activités qui se déroulent sous le régime du covid check, ainsi que dans les transports publics »

 

Il convient de préciser dès à présent que conformément aux prescriptions de l’article 17 de la loi du 17 juillet 2020 portant introduction d’une série de mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 et modifiant:

1° la loi modifiée du 25 novembre 1975 concernant la délivrance au public des médicaments ;

2° la loi modifiée du 11 avril 1983 portant réglementation de la mise sur le marché et de la publicité des médicaments,

le tribunal se référera pour les besoins de la discussion à ladite loi sous la forme de «loi du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19».

 

Il ressort du procès-verbal dressé en cause que l’agent de police auteur du procès-verbal numéro 15469 précité avait recueilli la plainte d’une employée du magasin « MAG.1.)» sis à (...), selon laquelle P.1.), en fréquentant le magasin, avait porté un masque de protection sans que ce dernier ne recouvre son nez et avait refusé – malgré demande afférente du personnel - de porter le masque de manière à ce qu’il recouvre tant la bouche que le nez.

 

P.1.) fut auditionné par l’agent de police auteur du procès-verbal numéro 15469 précité en date du 27 octobre 2021. Il déclarait qu’en date du 30 septembre 2021, il s’était rendu dans le magasin « MAG.1.) » sis à (...). Il précisait qu’il était accompagné de son épouse. P.1.) admettait qu’il portait le masque de manière à ce que ce dernier recouvre uniquement sa bouche. Il expliquait qu’il souffre d’une forme particulière de cancer de la peau (« schwarzer Hautkrebs ») et qu’il lui était impossible pour des raisons médicales de respirer de manière adéquate et suffisante lorsque le masque recouvrait tant le nez que la bouche.

 

P.1.) relatait qu’il avait tenté d’expliquer les raisons médicales lui rendant impossible le port d’un masque recouvrant tant la bouche que le nez, d’abord à un salarié du magasin, puis à la responsable dudit magasin, mais que cette dernière l’avait immédiatement sommé de quitter le magasin sans lui permettre de terminer ses explications. Il admettait qu’une dispute verbale s’en était suivie.

 

Lors des débats en audience publique du 17 mars 2021, le représentant du ministère public demande à voir rectifier le libellé de l’infraction libellée à charge du prévenu et à voir retenir que le prévenu a contrevenu non pas aux dispositions de l’article 4 paragraphe (2) de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, mais aux dispositions de l’article 4 paragraphe (1) de ladite loi. Il estime que, le tribunal étant saisi in rem, il lui appartenait de donner aux faits la qualification exacte. Il soutient encore, en invoquant à l’appui de son argument un arrêt de la Cour de Cassation du 17 octobre 2019 (n° 127/19 pénal, numéro 4095 du registre), que l’indication des articles prévoyant les incriminations n’est pas exigé par les dispositions du code de procédure pénale relatives au contenu des citations à prévenu, de sorte qu’aucun grief n’est accru au prévenu du fait de la désignation inadéquate de la disposition légale visée. Il estime en tout état de cause que les droits de la défense étaient préservés.

 

Le représentant du ministère public demande encore à voir écarter le principe de la rétroactivité in mitius et à voir appliquer aux faits dont s’agit la loi du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 telle qu’applicable au moment des faits ; il fonde son argumentation essentiellement sur la considération qu’il s’agit en l’espèce d’une législation dite de circonstance.

 

Le ministère public estime que tant l’élément matériel que l’élément moral de l’infraction ressortent à suffisance des éléments du dossier répressif ; il demande en conséquence à voir retenir P.1.) dans les liens de l’infraction à l’article 4 paragraphe (1) de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 pour ne pas avoir respecté l’obligation du port du masque en toutes circonstances pour une activité ouverte à un public qui circule et qui se déroule en lieu fermé et à le voir condamner à une amende de 750 €.

 

Le mandataire de P.1.) déclare ne pas s’opposer à voir rectifier le libellé de l’infraction lui reprochée aux termes de la citation à prévenu.

 

Il demande à voir appliquer le principe de la rétroactivité de la loi pénale plus douce tel que consacré par l’article 2 du code pénal et qui serait d’application générale. Il argumente que depuis l’entrée en vigueur de la loi du 11 mars 2022 portant modification de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, l’obligation de porter un masque dans les commerces a été abrogée et n’est dès lors plus pénalement répréhensible. Il rappelle, en se fondant notamment sur un arrêt de la Cour de Cassation du 14 janvier 2021 (n° 4/2021, numéro CAS-2019-00128 du registre) que le principe de l’application immédiate de la loi pénale plus douce vise tant l’infraction elle-même que la peine.

 

P.1.) fait en conséquence conclure à son acquittement alors que les faits lui reprochés ne seraient plus constitutifs d’une infraction.

 

A titre subsidiaire et pour autant que le tribunal ne devait pas accéder à son moyen tiré de la rétroactivité in mitius, P.1.) conteste la conformité de la disposition légale que l’on lui reproche d’avoir enfreint aux dispositions des articles 10bis(1), 11bis(1), 11bis(3) et 24 de la Constitution luxembourgeoise. Il donna lecture d’une note de plaidoiries conçue dans les termes suivants:

 

NOTES DE PLAIDOIRIES

Questions de préjudicielles de constitutionnalité

Le prévenu se voit opposé les dispositions de l'article 4 (1) de la loi modifiée du 17.07.2020 portant introduction d'une série de mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, applicable au 30.09.2021, qui se lisent comme suit :

 

« Art. 4.

(1) Le port du masque est obligatoire en toutes circonstances pour les activités ouvertes à un public qui circule et qui se déroulent en lieu fermé, sauf pour les activités qui se déroulent sous le régime Covid check. Le port du masque est également obligatoire dans les transports publics, sauf pour le conducteur lorsqu'une distance interpersonnelle de deux mètres est respectée ou un panneau de séparation le sépare des passagers. »

Le masque est défini par l'article 1 °8 de la loi COVID-19 de manière suivante :

 

« 8°   « masque » : un masque de protection ou tout autre dispositif permettant de recouvrir le nez et la bouche d'une personne physique. Le port d'une visière ne constitue pas un tel dispositif. »

L'article 12 de la même loi stipule encore :

 

« (4) Les infractions commises par les personnes physiques aux dispositions :

1°         de l'article 2, paragraphe 1er, alinéa 1er, points 2°, 4° et 6° ;

2°        de l'article 2, paragraphe 1er, alinéa 2, points 2°, 4° et 6° ;

3°        de l'article 2, paragraphe 2, alinéa 2 ;

4°       de l'article 4, paragraphe 1er ;

5°       de l'article 4, paragraphe 2, alinéas 1er et 2 ;

6°       de l'article 4, paragraphe 3, alinéa 1er;

7°      de l'article 4quater, paragraphes 1er et 2 ;

 

et le non-respect par la personne concernée d'une mesure d'isolement ou de mise en quarantaine prise sous forme d'ordonnance par le directeur de la santé ou son délégué en vertu de l'article 7 sont punies d'une amende de 500 à 1 000 euros. »

 

 

De l'autre côté, les dispositions constitutionnelles en discussion sont les suivantes :

 

Article 10bis :

 

« Art. 10bis.

(1)   Les Luxembourgeois sont égaux devant la loi. »

 

Conformément à la jurisprudence de la Cour Constitutionnelle, le principe d'égalité devant la
loi s'analyse à 2 niveaux :

 

1.        Vérifier la comparabilité des deux catégories de personnes par rapport auxquelles le principe est invoqué

2.        Analyser si la différenciation entre différentes personnes est-elle objectivement
justifiée ou non

 

Il convient dès lors d'analyser, en l'espèce, si une personne portant un masque dans une
grande surface, comme le MAG.1.), se trouve dans une situation similaire qu'une personne
sans masque, respectivement une personne qui ne porte pas son masque de manière correcte en ne couvrant que sa bouche, et non son nez.

 

Et puis, il convient d'analyser si cette différence de traitement recherche un but légitime, est objectivement justifiée et constitue une mesure proportionnelle selon les circonstances.

 

Il est évident que les personnes avec ou sans masque se trouvent dans une situation similaire selon les principes jurisprudentiels.

 

Il est encore un fait non autrement contestable que la définition légale ne fournit aucune indication sur sa consistance, à part l'indication qu'une visière ne compte pas.

 

Tout dispositif permettant de couvrir la bouche et le nez sont dès lors imaginables, soit des foulards, des buffs, des masques chirurgicaux, des FFP2, des N95, tout comme un mouchoir collé en dessous des lunettes, une feuille scotché devant le visage, un masque de carnaval,
etc... ;

 

Si le but recherché de cette mesure était d'arrêter la transmission de gouttelettes ou
d'aérosols éventuellement contaminées par le virus SARS-COV-2, il n'en demeure pas moins vrai qu'à défaut de définition légale des critères requises pour constituer un masque
permettant d'éviter la transmission d'aérosols, la mesure peut paraître obsolète.

 

A cela s'ajoute qu'un corona-virus a une taille moyenne de 0,16 micromètre, et que les pores d'un masque chirurgical ont une taille moyenne de 0,3 à 0,4 micromètres, de sorte que les
virus passent aisément à travers lesdites pores.

 

La littérature médicale est très controversée sur la question de la fiabilité du port de masque au niveau de la population. Au début de la pandémie, on pouvait lire sur les boîtes des
masques chirurgicaux : « Ce masque ne vous protège pas contre une infection virale ».

En date du 30.03.2020, une « peer-reviewed » méta-étude menée tout au début de la
pandémie, est arrivée å la conclusion suivant :

 

"We includes 15 (cluster) randomised trials investigating the effect of masks (14 trials) in healthcare workers and general population and of quarantine (1 trial). We found no trials
testing eye protection. There was no reduction of influenza-like illness (ILI) cases or laboratory
- confirmed influenza for masks compared to non masks in the general population, nor in healthcare workers."(medRxiv preprint doi: https://doi.org/10.1101/2020.03.30.20047217;
this version posted March 30, 2020)

 

Une autre étude scientifique publiée par le "CDC" (centers of Disease control and prevention)
a retenu ce qui sur les masques :

 

"Thumbnail of Meta-analysis of risk ratios for the effect of face mask use with or without enhanced hand hygiene on laboratory-confirmed influenza from 10 randomized controlled
trials with >6,500 participants. A) Face mask use alone; B) face mask and hand hygiene; C) face mask with or without hand hygiene. Pooled estimates were not made if there was high heterogeneity (I2 >75%). Squares indicate risk ratio for each of the included studies, horizontal lines indicate 95% CIs, dashed vertical

Figure 2. Meta-analysis of risk ratios for the effect of face mask use with or without enhanced hand hygiene on laboratory-confirmed influenza from 10 randomized controlled trials with
>6,500 participants. A) Face mask...

In our systematic review, we identified 10 RCTs that reported estimates of the effectiveness of face masks in reducing laboratory-confirmed influenza virus infections in the community from literature published during 1946-Ju/y 27, 2018. In pooled analysis, we found no significant reduction in influenza transmission with the use of face masks (RR 0.78, 95% CI 0.51-1.20; I2
= 30%, p = 0.25) (Figure 2). One study evaluated the use of masks among pilgrims from Australia during the Hajj pilgrimage and reported no major difference in the risk for laboratory-confirmed influenza virus infection in the control or mask group (33). Two studies in university settings assessed the effectiveness of face masks for primary protection by monitoring the incidence of laboratory-confirmed influenza among student hall residents for 5 months (9,10). The overall reduction in ILI or laboratory-confirmed influenza cases in the face mask group was not significant in either studies (9,10). Study designs in the 7 household studies were slightly different: 1 study provided face masks and P2 respirators for household contacts only (34), another study evaluated face mask use as a source control for infected persons only (35), and the remaining studies provided masks for the infected persons as well as their close contacts (11-13,15,17). None of the household studies reported a significant reduction in secondary laboratory-confirmed influenza virus infections in the face mask group (11-13,15,17,34,35).
Most studies were underpowered because of limited sample size, and some studies also reported suboptimal adherence in the face mask group.

Disposable medical masks (also known as surgical masks) are loose-fitting devices that were designed to be worn by medical personnel to protect accidental contamination of patient wounds, and to protect the wearer against splashes or sprays of bodily fluids (36). There is limited evidence for their effectiveness in preventing influenza virus transmission either

when worn by the infected person for source control or when worn by uninfected persons to reduce exposure. Our systematic review found no significant effect of face masks on transmission of laboratory-confirmed influenza. "

 

Une autre étude scientifique publiée au European Journal of Medical Research, publiée le 12.08.2020, a retenu le résultat suivant :

 

"Results: Upon our critical review of the available literature, we found only weak evidence for
wearing a face mask as an efcient hygienic tool to prevent the spread of a viral infection.
However, the use of MNC seems to be linked to relevant protection during close contact
scenarios by limiting pathogen-containing aerosol and liquid droplet dissemination.
Importantly, we found evidence for signifcant respiratory compromise in patients with severe obstructive pulmonary disease, secondary to the development of hypercapnia. This could also happen in patients with lung infections, with or without SARS-CoV-2."

Finalement, une étude publiée le 13.09.2021 dans le magazine « Frontiers in public Health »
a conclu sur I’efficacité des masques ce qui suit :

 

"MASKS

Effectiveness

The debate regarding the effectiveness of masks is still ongoing. Indeed, some believe masks
are ineffective (for both this coronavirus virus and influenza variants) (29-31), others defend
the simple surgical mask efficiency (this is the most common scientific opinion), and others are
calling for more effective masks (32). Even supposing face masks might provide some measure
of protection, there are side effects that could undermine any efficacy they may have. First,
wearing a mask may give a false sense of security and make people less compliant with social distancing, ventilation and other important infection control schemes (33, 34). Second, people
have to avoid touching their masks and adopt other management measures, otherwise masks
may be counterproductive (35). While face masks can stop larger droplets, such droplets tend
to fall to the ground due to their weight (36-38), and are not the route for viral transmission.
Viruses spread via smoke-like aerosols (39) via breath (or flatulence), which go through and jet
out the sides of surgical masks, and infect mainly by inhalation deep into the lungs. Despite
the risk of inhaling/exhaling infected virions via leaks of particles, this was never evaluated in
applied norms for surgical masks, and only for Personal Protective Equipment (PPE) under the Filtering Facepiece Particles (FEP) norm in Europe, and N (e.g., N95) in the USA. Moreover, the European norm for surgical masks (EN14683) as well as the US (ASTM) only applies to Bacterial Filtration Efficiency (BFE), and the size of the bacteria used for testing (3 microns) is much
larger than the SARS-CoV-2 [maximum size of 140 nm (40)].
Virus filtration efficiency (VFE)
was never tested in Chinese and European norms."

 

La liste des études scientifiques qui remettent en cause l'efficacité des masques quand portées
par le grand public est longue.

Dans leur livre paru en 2021 intitulé « CORONA UNMASKED », les Dr. Karina REISS et Dr. SUCHARIT BHAKDI, par formation épidémiologue, infectiologue, microbiologue, biochimiste,
et autres, sont arrivée å la conclusions suivante :

 

Page 65 « Die Maske ist längt zu einem imstrittenen Symbol geworden. Für die einen ein sichtbare Zeichen der Solidarität und Verantwortung. Für die anderen ein Symbol für Obrigkeitshörigkeit und ausgeschaltetes Denkvermögen. Viele halten die Maske für nicht
anderes als den Gessler-Hut bei Wilhelm Tell - wer Sich nicht vor dem Hut verbeugt, muss
bestraft werden.

Stefan Aust, Herausgeber der Welt, kommt zu dem Schluss, dass die Maske in erster Linie die Funktion erfüllen soll, uns daran zu erinnern, dass wir eine Pandemie haben. „Die Maske muss der Maske wegen getragen werden. Als Symbol für Gehorsam den Maßnahmen der Regierung gegenüber. " »

A part la littérature scientifique controversée concernant la problématique du port du
masque, il convient également de comparer les chiffres officiels entre les Etats ayant imposé
le port du masque, et ceux qui ne l'ont pas fait.

Au niveau international, on ne peut que remarquer qu'il n'existe aucune différence entre les
pays ayant eu une obligation de port de masque et ceux qui ne l'ont pas eu.

Finalement, il ressort d'un grand nombre de publications scientifiques, et même des dépliants
de l'OMS, que le port de masque peut avoir des effets négatifs. Ces effets négatifs peuvent
être de nature médicale, psychologique et le port de masque peut être contreproductif lors
les personnes portent le même masque pendant trop longtemps, quand elles le touchent avec leurs mains ou lorsqu'elle ne respectent plus les règles de distanciation physique.

 

De la même façon, il est entretemps d'un consensus scientifique international que les
personnes guéris et vaccinées peuvent transmettre le virus comme les personnes non
vaccinées, ni guéries.

 

Il n'existe aucune différence de contagiosité entre les personnes vaccinées et les personnes
non vaccinées. Si le vaccin procure éventuellement une protection contre une forme grave, il
n'en demeure pas moins qu'une personne vaccinée reste contagieuse.

 

Il se pose dès lors a question pourquoi une personne se trouvant dans un lieu fermé accessible au public, mais sous le régime du Covid-check, n'a pas à porter un masque tandis qu'une personne qui se trouve dans un lieu autre lieu fermé accessible au public, mais non soumis au Covid-check, doit porter un masque.

 

Une différence de traitement est effectuée à l'égard des deux personnes ne recherche pas un
but légitime, elle n'est pas justifiée selon les circonstances et elle n'est pas proportionnelle,
créant ainsi une discrimination entre personnes défendue par l'article 10bis de la Constitution.

 

 

De ce fait, il convient de renvoyer le dossier pardevant la Cour Constitutionnelle avec la
question suivante :

 

 

 

Est-ce que l'article 4 (1) de la loi modifiée du 17.07.2020 portant introduction d'une série de mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, applicable au 30.09.2021 en ce qu'il impose aux personnes le port de masque à toute personne circulant dans un lieu fermé, ouvert à un public qui circule, est-il conforme à l'article 10bis (1) de la Constitution et le principe d'égalité de toute personne devant la loi ?

 

 

ARTICLE 11 DE LA CONSTITUTION

« Art. 11.

(1) L'Etat garantit les droits naturels de la personne humaine et de la famille.

(3) L'Etat garantit la protection de la vie privée, sauf les exceptions fixées par la loi. »

D'après la jurisprudence de la Cour Constitutionnelle, le droit naturel se restreint aux
questions existentielles de l'être humain, au respect de sa dignité et sa liberté (voir C. const. 28.05.2004, n 020/04).

Ce droit inclut entre autres le droit à la liberté de déplacement, ainsi que le droit à la santé,
tout comme le droit à l'auto-détermination de l'être humain, notamment sur des questions affectant sa propre vie et sa santé. (v- page 28 du jugement n° 126/22 du tribunal de police du 01.03.2022)

L’obligation du port de masque constitue une ingérence dans le droit à l'auto-détermination qui concerne inévitablement sa propre vie et santé.

En l'espèce, force est de constater le port du masque influence l'apparence et le style vestimentaire d'une personne. Toutefois, dans une société démocratique, il appartient à
chaque citoyen de décider sous quelle apparence il entend se présenter au public et etoute restriction à cette liberté risque d'aller à l'encontre de plusieurs droits fondamentaux (voir jgt
du 01.03.2022 n° 126/22 du tribunal de police).

La Cour européenne des droits de l'homme a, dans une affaire de S.A.S contre France N°43835/11 du 1er juillet 2014 que l'apparence que l'on souhaite avoir, dans l'espace public
et privé, relève de l'expression de la personnalité de chacun et donc de la vie privée.

De la même façon, selon la doctrine allemande, l'obligation du port de masque peut affecter
le droit à la santé, notamment lorsque le port de masque a une incidence sur la santé en provoquant des difficultés respiratoires, des réactions allergiques ou, en cas de non usage conforme, une augmentation de la charge virale pour le porteur.

Au vu des considérations qui précèdent, il convient dès lors de se poser la question si cette ingérence fut basée sur un but recherché légitime, objectivement justifiable et proportionnel
au but recherché.

 

 

 

 

Il convient dès lors également de poser la question suivante à la Cour Constitutionnelle :

 

 

 

Est-ce gue l'article 4 (1) de la loi modifiée du 17.07.2020 portant introduction
d'une série de mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, applicable au 30.09.2021 en ce qu'il impose aux personnes le port de masque à toute
personne circulant dans un lieu fermé, ouvert à un public qui circule, est-il conforme à l'article 11bis (1) de la Constitution garantissant les droits naturels
de la personne humaine ?

 

 

 

Dans le même contexte, il convient de se poser la question si l'obligation du port de masque
ne constitue pas une violation du droit à la vie privée, prévue par l'article 11 (3) de la Constitution, raison pour laquelle il convient également de poser la question suivante :

 

 

 

Est-ce que l'article 4 (1) de la loi modifiée du 17.07.2020 portant introduction
d'une série de mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, applicable au 30.09.2021 en ce qu'il impose aux personnes le port de masque à toute
personne circulant dans un lieu fermé, ouvert à un public qui circule, est-il conforme à l'article 11bis (3) de la Constitution garantissant la protection de la vie privée ?

 

 

 

 

 

 

Article 24 de la Constitution :

 

« Art. 24.

 

La liberté de manifester ses opinions par la parole en toutes matières, et la liberté de la presse sont garanties, sauf la répression des délits commis à l'occasion de l'exercice de ces libertés.-  La censure ne pourra jamais être établie. »

 

L'article 24 de la Constitution, tout comme l'article 10 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, retient que la liberté d'expression inclut l'expression par langage corporel et notamment mimique faciale.

En clair, le mode d'expression est pareillement protégé. (voir. CEDH De HAES et Gijsels contre Belgique, 24.02.1997, n°19983/92)

Vu les dispositions pénales de l'article 563 10° du Code pénal, il est peu concevable de prétendre que la dissimulation du visage n'aurait pas d'ingérence sur la liberté d'expression
alors que dans l'exposé des motifs du projet de loi n°7179, on peut lire que la communication
par le visage est essentielle.

 

 

De ce fait, il convient de poser la question suivant à la Cour Constitutionnelle :

Est-ce que l'article 4 (1) de la loi modifiée du 17.07.2020 portant introduction
d'une série de mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, applicable au 30.09.2021 en ce qu'il impose aux personnes le port de masque à toute
personne circulant dans un lieu fermé, ouvert à un public qui circule, est-il conforme à l'article 24 de la Constitution garantissant la liberté d'expression ?

Contexte général :

 

S'il est vrai que les articles 11 (3) et 24 de la Constitution prévoient une exception générale
pour les délits qui sont commis ou pour les lois, ces exceptions ne présentent nullement une carte blanche pour le législateur de restreindre ces droits comme bon lui semble, mais un
rappel au citoyen que ces droits peuvent, dans selon certaines circonstances, être encadrés. Evidemment, une interprétation contraire viderait ces libertés publiques de toute substance
(voir jugt ° 126/22 du 01.03.2022).

D'après l'article 6 de la loi du 27 juillet 1997 portant organisation de la Cour Constitutionnelle,
si une juridiction estime qu'une question de conformité d'une loi à la Constitution se pose et qu'une décision sur ce point est nécessaire pour rendre son jugement, elle doit la soulever d'office après avoir invité au préalable les parties à présenter leurs observations.

Ce principe ne connaît pas d'exception et une juridiction n'est dispensée de saisir la Cour Constitutionnelle que si l'une des hypothèses suivantes est validée :

 

1.     Une décision sur la question soulevée n'est pas nécessaire pour rendre son jugement

2.     La question est dénuée de tout fondement

3.     La Cour Constitutionnelle a déjà statué sur une question ayant le même objet

 

 

De prime abord, il convient d'ores et déjà de noter que la Cour Constitutionnelle ne s'est pas encore prononcé sur les questions posées dans ce contexte.

En cas de rejet de l'applicabilité du principe de la rétroactivité in mitius et de la demande d'acquittement pure et simple du sieur P.1.) pour cause de défaut de loi pénale
actuellement applicable par rapport aux faits reprochés à ce dernier ab initio, une décision de
la Cour Constitutionnelle est nécessaire pour voir si les articles 10bis, 11 (1), 11(3) et 24 de la Constitution n'ont pas été violé par les dispositions de l'article 4 (1) de la COVID-19, applicable en date du 30.09.2021, soit au moment des faits reprochés au sieur P.1.).

 

 

 

A ces causes :

 

 

 

Recevoir les présents moyens de défense de la partie P.1.) en la pure forme ;

 

Partant, les dires fondés ;

 

Par application du principe de rétroactivité in mitius, dire non fondée la demande du Ministère Public et acquitter le sieur P.1.) de toute infraction lui reprochée ;

 

Sinon, saisir la Cour Constitutionnelle des questions préjudicielles suivantes :

 

1.              Est-ce que l'article 4 (1) de la loi modifiée du 17.07.2020 portant introduction d'une série de mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, applicable au 30.09.2021 en
ce qu'il impose aux personnes le port de masque à toute personne circulant dans un
lieu fermé, ouvert à un public qui circule, est-il conforme à l'article 10bis (1) de la Constitution et le principe d'égalité de toute personne devant la loi ?

2.              Est-ce que l'article 4 (1) de la loi modifiée du 17.07.2020 portant introduction d'une série de mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, applicable au 30.09.2021 en
ce qu'il impose aux personnes le port de masque à toute personne circulant dans un
lieu fermé, ouvert à un public qui circule, est-il conforme à l'article 11bis (1) de la Constitution garantissant les droits naturels de la personne humaine

3.              Est-ce que l'article 4 (1) de la loi modifiée du 17.07.2020 portant introduction d'une série de mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, applicable au 30.09.2021 en
ce qu'il impose aux personnes le port de masque à toute personne circulant dans un
lieu fermé, ouvert à un public qui circule, est-il conforme à l'article 11bis (3) de la Constitution garantissant la protection de la vie privée ?

4.              Est-ce que l'article 4 (1) de la loi modifiée du 17.07.2020 portant introduction d'une série de mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, applicable au 30.09.2021 en
ce qu'il impose aux personnes le port de masque à toute personne circulant dans un
lieu fermé, ouvert à un public qui circule, est-il conforme à l'article 24 de la Constitution garantissant la liberté d'expression ?

 

Réserver à la partie P.1.) tous autres droits, dus, moyens et actions ;

 

Profond respect.

 

Luxembourg, le 15.03.2022

 

 

 

 

s. Christian BOCK

 

 

 

 

Lors de la lecture de la note de plaidoiries, le mandataire de P.1.) précise qu’il y a lieu de lire l’article 11 de Constitution chaque fois qu’il avait indiqué l’article 11bis de la Constitution.

 

Le représentant du ministère public demande à voir écarter les développements de la note de plaidoiries rédigés en langue anglaise pour ne pas répondre aux exigences de la législation sur le régime des langues.

 

Il demande encore à voir rejeter la question préjudicielle ayant trait à la conformité de l’article 4 paragraphe (1) de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 à l’article 10bis de la Constitution pour être dénuée de tout fondement. Il estime, en premier lieu, que la loi n’opérait pas de distinction entre différentes personnes en ce qui concernait l’obligation du port d’un masque dans un lieu fermé ouvert à un public qui circule. Il argumente, d’autre part, que la question telle que suggérée par le mandataire du prévenu tend à la comparaison de deux situations tout à fait différentes en fonction de l’applicabilité du régime dit du Covid check ou non. Il rappelle à cet égard, en se fondant sur la jurisprudence récente de la Cour supérieure de justice, qu’il appartient à la juridiction du fond d’apprécier s’il y a comparabilité des situations.

 

Le représentant du ministère public, après s’être initialement rapporté à sagesse du tribunal en ce qui concerne le mérite des questions préjudicielles sur la conformité de l’article 4 paragraphe (1) de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 aux articles 11 et 24 de la Constitution, demande à voir rejeter les questions préjudicielles dont objet pour être dénuées de tout fondement.

 

Le mandataire de P.1.) maintient, en ce qui concerne la conformité à l’article 10bis de la Constitution, que la comparabilité des situations est donnée et que sa question préjudicielle est dès lors fondée.

 

Il demande à ne pas voir écarter les développements reproduits en langue anglaise dans sa note de plaidoiries motif pris que tout le monde avait compris la teneur des développements dont objet.

 

Si le représentant du ministère public insiste ensuite sur la fait que les libertés fondamentales d’aucuns devaient s’apprécier à la lumière des droits fondamentaux reconnus aux autres, le mandataire de P.1.) insiste sur la caractère néfaste des masques de protection, surtout pour les plus jeunes.

 

Quant à la rétroactivité in mitius

 

La loi du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 a connu depuis sa promulgation d’itératives modifications.

 

A la date des faits dont objet, soit le 30 septembre 2021, la loi du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 avait été modifiée en dernier lieu par la loi du 14 septembre 2021 portant modification:

1° de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19;

2° de la loi modifiée du 6 janvier 1995 relative à la distribution en gros des médicaments;

3° de la loi modifiée du 22 janvier 2021 portant: 1° modification des articles L. 234-51, L. 234-52 et L. 234-53 du Code du travail; 2° dérogation temporaire aux dispositions des articles L. 234-51, L. 234-52 et L. 234-53 du Code du travail;

 

publiée en date du 14 septembre 2021 et entrée en vigueur dès le 15 septembre 2021 selon l’article 11 de ladite loi.

 

L’article 4 paragraphe (1) de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 tel qu’issu de la loi précitée du 14 septembre 2021 disposait ce qui suit:

 

« (1) Le port du masque est obligatoire en toutes circonstances pour les activités ouvertes à un public qui circule et qui se déroulent en lieu fermé, sauf pour les activités qui se déroulent sous le régime Covid check. Le port du masque est également obligatoire dans les transports publics, sauf pour le conducteur lorsqu’une distance interpersonnelle de deux mètres est respectée ou un panneau de séparation le sépare des passagers. »

 

Les infractions commises par des personnes physiques à la disposition légale précitée étaient punies d’une amende de 500 à 1.000 € ayant le caractère d’une peine de police en vertu de l’article 12 de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19.

 

L’article 4 paragraphe (1) a de nouveau été modifié par l’article 8 de la loi du 11 mars 2022 portant modification de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, publiée le 11 mars 2022 et entrée en vigueur en date du même jour.

 

L’article 4 de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 tel qu’issu de l’article 8 de la loi du 11 mars 2022 précitée se lit désormais comme suit:

 

« Art. 4.

 

(1) Le port du masque est obligatoire dans les transports publics, sauf pour le conducteur lorsqu’une distance interpersonnelle de deux mètres est respectée ou un panneau de séparation le sépare des passagers.

 

Sont également soumises à l’obligation de port du masque les personnes visées à l’article 3, paragraphe 1er, alinéa 1er, et paragraphe 2, alinéas 1er et 2, à l’exception du patient hospitalisé.

 

(2) Le port du masque est autorisé à l’intérieur des établissements scolaires de tous les types d’enseignement ainsi que dans leur enceinte, dans les locaux destinés à accueillir ou à héberger des mineurs âgés de moins de seize ans accomplis, dans les bâtiments relevant des autorités judiciaires et dans les locaux des administrations publiques accessibles au public ».

 

La disposition légale rendant obligatoire le port du masque en toutes circonstances pour les activités ouvertes à un public qui circule et qui se déroulent en lieu fermé sauf pour les activités qui se déroulent sous le régime Covid check a dès lors été abrogée par la loi du 11 mars 2022 précitée, partant dès avant la date fixée pour les plaidoiries dans la présente affaire.

 

Le mandataire du prévenu, en se prévalant de la rétroactivité de la loi pénale plus douce et en argumentant qu’au jour des plaidoiries le fait reproché à son mandant n’était plus constitutif d’une infraction, conclut à l’acquittement de son mandant.

 

L’article 2 alinéa 2 du code pénal luxembourgeois consacre expressément le principe de la rétroactivité in mitius lorsqu’il édicte :

 

« Si la peine établie au temps du jugement diffère de celle qui était portée au temps de l’infraction, la peine la moins forte sera appliquée ».

 

La Cour Constitutionnelle a dégagé le principe de la rétroactivité in mitius de l’article 14 de la Constitution en retenant que « le principe de la légalité des peines consacré par l’article 14 de la Constitution implique celui de la rétroactivité de la peine la plus douce » (Cour Const., 22 mars 2002, n°12/02, Mém A, 2002,672 cité dans Dean Spielmann et Alphonse SPIELMANN, Droit Pénal Général Luxembourgeois, 2ème édition, p.111, éd. Bruylant; voir également Cour Const., N° 00152 du 22 janvier 2021, Mém A, n° 72 de 2021).

 

Le principe est également consacré par l’article 15 §1 du Pacte international sur les droits civils et politiques qui dispose que « Si, postérieurement à l’infraction, la loi prévoit l’application d’une peine plus légère, le délinquant doit en bénéficier ».

 

En France, le Conseil constitutionnel a également conféré au principe de la rétroactivité in mitius une valeur constitutionnelle (décision numéro 80-127 DC des 19 et 20 janvier 1981).

 

La rétroactivité des lois plus douces se justifie dès lors que la disposition ancienne, jugée trop rigoureuse, a été abandonnée, il existe une présomption qu’il n’y a plus intérêt à l’appliquer; il serait inconcevable d’appliquer au délinquant, au nom du principe de la non-rétroactivité des lois qui a été édicté pour le protéger, la loi plus sévère au seul motif qu’elle était en vigueur au jour des faits (voir Stefani, Levasseur, Bouloc, Droit pénal général, 14ème édition).

 

Le principe de la rétroactivité in mitius exige également l’application de la loi nouvelle qui est plus favorable pour le prévenu au niveau des éléments constitutifs de l’infraction, des circonstances aggravantes et, a fortiori, au niveau de l’existence même d’une incrimination.

 

Constituent ainsi des dispositions plus douces celles qui suppriment une incrimination ou qui en réduisent le champ d’application (voir : F. Desportes, F. Le Gunehec, Droit pénal général, numéro 345, 16ième édition, éd. Economica et jurisprudences y citées).

 

En l’espèce, il convient de constater que le législateur a abrogé purement et simplement la disposition légale rendant obligatoire le port du masque en toutes circonstances pour les activités ouvertes à un public qui circule et qui se déroulent en lieu fermé, sauf pour les activités qui se déroulent sous le régime Covid check, par la loi du 11 mars 2022 précitée.

 

Le principe de la rétroactivité de la loi pénale plus douce n’est cependant pas absolu.

 

La Cour de cassation belge consacre ainsi le principe selon lequel les infractions commises sous l’empire de législations ou réglementations abrogées demeurent punissables lorsqu’il s’agit de dispositions d’une durée temporaire adaptée aux circonstances ou exigences du moment à moins que la disposition nouvelle en ait autrement disposé (voir Cass. [belge], 4 octobre 1948, Pas., 1948, I, p. 525; Cass. [belge], 24 mars 1947, Pas., 1947, I, p. 132). Elle a encore retenu plus récemment que l’application d’une disposition légale supprimant une incrimination est subordonnée à la condition que l'intention non douteuse du législateur ait été de renoncer à toute répression pour le passé comme pour l'avenir (Cass. [belge ], 30 janvier 2019, P.18.0879.F).

 

La doctrine belge opine également dans le sens qu’il y a lieu d’écarter le principe de la rétroactivité de la loi pénale plus douce lorsqu’il s’agit d’une législation temporaire, adaptée aux circonstances et exigences du moment, ayant une force obligatoire limitée dans le temps (voir notamment: Franklyn Kuty, « Les implications pénales de la sécurité civile: les infractions à la réglementation tendant à limiter la propagation du virus Covid-19 (2ème partie) », publié au Journal des Tribunaux 2020, chronique judiciaire, p. 320 ss).

 

L’auteur précité retient à ce sujet que

« Lorsqu'une législation ou réglementation est liée à des circonstances temporaires, il est évident que son auteur n'entend pas faire œuvre définitive, de sorte que l'abrogation de ses dispositions ne dépend pas de l'évolution de ses conceptions en la matière. Le terme de la force obligatoire d'une législation ou d'une réglementation temporaire ne dénote dès lors pas, en soi, son intention de renoncer, pour le passé, à la répression des infractions commises en contravention à ses dispositions. Il est fréquent que ces lois ou réglementations ne soient plus en vigueur au temps du jugement. Si la règle de la rétroactivité de la loi d'incrimination favorable devait être appliquée dans ce cas de figure, elle aboutirait à priver ces dispositions de toute force contraignante puisque ses destinataires tableraient sur la durée des poursuites pour échapper à une juste répression ».

 

Au Luxembourg, Monsieur l’avocat général, dans ses conclusions dans une affaire de cassation n° 33/2005 pénal du 22 décembre 2005, numéro 2246 du registre, avait également conclu qu’il y avait lieu d’écarter le principe de la rétroactivité de la loi pénale plus douce lorsqu’il s’agissait d’une réglementation temporaire en argumentant que:

 

« La jurisprudence a toutefois admis certaines dérogations à la règle de l’article 2, alinéa 2, [du code pénal] fondées sur la considération que l’application rétroactive de la « lex mitior » est uniquement justifiée par le fait que l’intérêt du prévenu de se voir appliquer la loi moins sévère rejoint l’intérêt de la société de voir appliquer la loi nouvelle supposée meilleure.

 

« Survivent » ainsi les lois anciennes considérées comme des lois de circonstance ou des réglementations temporaires. Tel est notamment le cas d'une réglementation mise en œuvre et exécutée par des mesures temporaires et successives prises en vertu d'une loi organique qui subsiste. Le cas de figure le plus connu est, à l’évidence, celui de la réglementation en matière de circulation routière où la loi de base réprimant les excès de vitesse est invariable, alors que les limitations concrètes sont fonction des circonstances et des nécessités sur le terrain.

 

[…. ]

 

La Cour supérieure de justice a adopté la même position en jugeant dans un arrêt du 7 avril 1951 que « les modifications intervenant dans le système de réglementation de la circulation sur les voies publiques et se succédant nécessairement à des intervalles assez rapprochés procèdent de considérations extrinsèques et non d’un changement survenu dans les conceptions de principe. Il s’en suit que l’article 2 du Code pénal. En tant qu’il accorde un effet rétroactif à la nouvelle loi plus douce ne saurait s’appliquer en matière de roulage sur les voies publiques.

 

Il résulte de cette analyse que les juges d’appel ont écarté, à juste titre, la rétroactivité de la loi pénale plus douce pour les « modifications apportées à une réglementation mise en œuvre par des mesures d’exécution temporaire et successives dictées par des besoins momentanées ».

 

L’appréciation de l’existence d’une telle situation relève du pouvoir souverain du juge du fond et ne saurait être contestée au titre d’un moyen tiré de la violation de l’article 2 du code pénal ».

 

Le tribunal constate que la législation en matière de lutte contre la pandémie Covid-19 (y compris les dispositions pénales) est par essence instable car cette réglementation doit être en permanence adaptée à l’évolution de la situation sanitaire, le législateur essayant de conjuguer les impératifs d’une lutte efficace contre la propagation d’un virus avec la garantie des libertés individuelles ainsi que l’exercice des activités sociales et économiques.

 

Le tribunal constate encore que la nature temporaire de la législation dont objet ressort à suffisance des dispositions de l’article 18 de la loi du 17 juillet 2020, modifié à de moultes reprises, qui fixe une date de fin d’applicabilité de la législation mise en place.

 

Le tribunal en déduit qu’il en ressort à l'évidence que le législateur n'a voulu faire cesser la répression qu'au moment où il jugerait que les circonstances qui la rendaient nécessaire n'existeraient plus. Il s'en déduit que les infractions commises sous l'empire de ces législations ou réglementations abrogées demeurent punissables dans la mesure où il s'agit de dispositions d'une durée temporaire adaptée aux circonstances ou exigences du moment. Leur esprit s'oppose à ce que l'impunité soit assurée aux contrevenants qui les méconnaissent (voir Franklyn Kuty, « Les implications pénales de la sécurité civile: les infractions à la réglementation tendant à limiter la propagation du virus Covid-19 (2ème partie)», op. cit.).

 

Au vu du caractère temporaire de la législation dont objet, il y a partant lieu d’écarter le principe de la non-rétroactivité de la loi plus douce et d’appliquer les dispositions de l’article 4 paragraphe (1) de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 tel qu’applicable au moment du fait dont s’agit, soit à la date du 30 septembre 2021.

 

Quant à la rectification du libellé de l’infraction reprochée

 

Lors des débats en audience publique du 17 mars 2021, le mandataire de P.1.) déclare (contrairement à ce qu’il avait pu annoncer dans un courrier du 1er mars 2022 adressé au ministère public) ne plus s’opposer à voir rectifier le libellé de l’infraction reprochée à son mandant.

 

Il est de principe que les juridictions du fond, saisies in rem, ont le droit et même l’obligation d’examiner les faits dont ils sont saisis sous toutes leurs qualifications possibles et de retenir la véritable qualification que ces faits comportent, à condition que les faits, sous la qualification nouvelle, restent identiques à ceux qui lui avaient été déférés sous la qualification originaire.

 

En l’espèce, il y lieu de constater que le ministère public reproche au prévenu d’avoir enfreint les dispositions de l’article 4 paragraphe (2) de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 en ne respectant pas l’obligation du port du masque en toutes circonstances pour les activités en lieu fermé ouvertes à un public qui circule, sauf pour les activités qui se déroulent sous le régime du Covid check; il se dégage toutefois sans équivoque possible à la lecture de la loi précitée que le fait reproché est visé par la première phrase du paragraphe (1) de l’article 4 précité dans sa version applicable au moment du fait reproché.

 

Il y a dès lors lieu à rectification de la désignation de la disposition légale visée dans la citation à prévenu, les faits reprochés restant inchangés.

 

Quant à la demande en rejet des développements rédigés en langue anglaise

 

Il y a lieu de constater que le mandataire de P.1.) a reproduit dans sa note de plaidoiries des extraits issus d’études portant sur l’efficacité des masques de protection rédigés en langue anglaise.

 

Il convient de rappeler que la loi du 24 février 1984 sur le régime des langues prévoit en son article 3 sous l'intitulé « Langues administratives et judiciaires » qu'en matière administrative, contentieuse ou non contentieuse, et en matière judiciaire, il peut être fait usage des langues française, allemande ou luxembourgeoise, sans préjudice des dispositions spéciales concernant certaines matières.

 

Cette disposition vise l'usage des langues pratiquées au prétoire et dans les écrits judiciaires tels notamment les jugements et les conclusions échangées entre parties au litige. Elle ne saurait s'appliquer aux pièces, par définition préexistantes au lancement d'une action judiciaire devant les juridictions luxembourgeoises. En ce qui concerne les pièces, l'ordre public du régime des langues cède la place à l'ordre privé et le seul critère pour l'admission de pièces en une langue différente de celles énumérées à l'article 3 de la loi du 24 février 1984 est la bonne compréhension de leur contenu par tous les intervenants au procès, c’est-à-dire les membres de la juridiction saisie, les avocats et leurs parties (cf Trib. 19 mai 2006, n° rôle 97527).

 

Si les textes reproduits pêchent par un usage abusif de sigles et d’acronymes ensemble une indication insuffisante de leur origine respectivement de l’auteur, toujours est-il que ces extraits, reproduits à priori dans la langue dans laquelle ils avaient été publiés, sans préjudice quant à leur pertinence pour la solution du présent litige, n’en deviennent pas pour autant inintelligibles alors que leur bonne compréhension par tous les intervenants au procès doit être considérée comme assurée.

 

Il n’y a dès lors pas rupture de l’égalité des armes et le moyen du ministère public doit être rejeté.

 

Quant aux questions préjudicielles:

 

Aux termes de sa note de plaidoiries versée en cause, P.1.) soulève quatre questions portant sur la conformité de l’article 4 paragraphe (1) de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 à la Constitution luxembourgeoise et plus particulièrement:

 

-          au principe d’égalité de toute personne devant la loi consacré par l’article 10bis (1) de la Constitution;

-          à la garantie des droits naturels de la personne humaine consacrés par l’article 11bis (1) [ en fait article 11 paragraphe (1)] de la Constitution;

-          à la garantie de la protection de la vie privée consacrée par l’article 11bis (3) [ en fait article 11 paragraphe (3)] de la Constitution;

-          à la garantie de la liberté d’expression tel que consacrée par l’article 24 de la Constitution.

 

En application de l’article 2 de la loi du 27 juillet 1997 portant organisation de la Cour Constitutionnelle telle que modifiée par la loi du 6 décembre 2019 portant modification de la loi du 27 juillet 1997 portant organisation de la Cour Constitutionnelle, il appartient à la Cour Constitutionnelle de statuer, suivant les modalités déterminées par la loi, sur la conformité des lois à la Constitution, à l'exception de celles qui portent approbation de traités.

 

L’article 6 de la loi modifiée du 27 juillet 1997 dispose que:

 

« Lorsqu'une partie soulève une question relative à la conformité d'une loi à la Constitution devant une juridiction, celle-ci est tenue de saisir la Cour Constitutionnelle.

 

 

Une juridiction est dispensée de saisir la Cour Constitutionnelle lorsqu'elle estime que:

a)           une décision sur la question soulevée n'est pas nécessaire pour rendre son jugement;

b)           la question de constitutionnalité est dénuée de tout fondement;

c)            la Cour Constitutionnelle a déjà statué sur une question ayant le même objet.

 

Si une juridiction estime qu'une question de conformité d'une loi à la Constitution se pose et qu'une décision sur ce point est nécessaire pour rendre son jugement, elle doit la soulever d'office après avoir invité au préalable les parties à présenter leurs observations ».

 

La juridiction du fond qui est saisie d'une question préjudicielle est en principe tenue de la soumettre à la Cour Constitutionnelle, sauf si les conditions de dispense sont données. Il ne lui revient pas de juger si la différenciation opérée par la loi est objective, rationnellement justifiée, adéquate et proportionnée à son but (voir notamment Cass., arrêt n° 63/2021 du 22 avril 2021, numéro CAS-2020-00073 du registre). Le défaut de tout fondement qui dispense le juge du fond de saisir la Cour Constitutionnelle doit être évident et manifeste au point de s’imposer à lui. (Cass., arrêt n° 11/10 du 25 février 2010).

 

Les motifs de dispense de saisine ne sont pas cumulatifs, mais alternatifs, ainsi que l’établit le rapport de la Commission des institutions et de la révision constitutionnelle de la Chambre des Députés rendu dans le cadre des travaux préparatoires de la loi de 1997:

 

« Par exception au principe de saisine obligatoire, les juridictions seront dispensées de soumettre la question de la constitutionnalité à la Cour constitutionnelle dans les trois hypothèses suivantes :

 

- si elles estiment qu’une décision sur la question de constitutionnalité n’est pas nécessaire pour rendre leur jugement; ou bien

 

- si elles estiment que la question de constitutionnalité est dénuée de tout fondement; ou bien

 

- si la Cour constitutionnelle a déjà statué sur une question ayant le même objet »

 

(voir Rapport de la Commission des institutions et de la révision constitutionnelle, du 20 juin 1997, document parlementaire n° 4218-9, page 10, sous « Article 6 »).

 

Il convient encore de préciser dès à présent que la disposition légale arguée de contraire à la Constitution, à savoir l’article 4 paragraphe (1) de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 tel qu’issu de la loi du 14 septembre 2021 précitée et tel qu’applicable au moment des faits, dispose ce qui suit :

 

« Le port du masque est obligatoire en toutes circonstances pour les activités ouvertes à un public qui circule et qui se déroulent en lieu fermé, sauf pour les activités qui se déroulent sous le régime Covid check. Le port du masque est également obligatoire dans les transports publics, sauf pour le conducteur lorsqu’une distance interpersonnelle de deux mètres est respectée ou un panneau de séparation le sépare des passagers. »

 

Il s’en dégage que seule la 1ère phrase de l’article 4 paragraphe (1) précité est pertinente pour connaître des faits dont s’agit. Il y a partant lieu de limiter les débats sur le mérite des questions préjudicielles telles que soulevées à cette seule disposition légale.

 

 

a)      quant à la question préjudicielle de la conformité de l’article 4 paragraphe (1) de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 au principe d’égalité de toute personne devant la loi consacré par l’article 10bis (1) de la Constitution

 

L’article 10bis (1) de la Constitution dispose que « Les Luxembourgeois sont égaux devant la loi ». Il convient de préciser que le principe d’égalité est étendu aux étrangers en vertu de l’article 111 de la Constitution.

 

Si le mandataire du prévenu veut voir soumettre à l’appréciation de la Cour Constitutionnelle la question de la conformité de l’article 4 paragraphe (1) de la loi modifiée du 17 juin et 2020, applicable au 30 septembre 2021, en ce qu’il impose aux personnes le port du masque à toute personne circulant dans un lieu fermé ouvert à un public qui circule, à l’article 10bis (1) de la Constitution, son argumentation développée dans sa note de plaidoiries se résume à la question « pourquoi une personne se trouvant dans un lieu fermé accessible au public, mais sous le régime du Covid-check, n’a pas à porter un masque tandis qu’une personne qui se trouve dans un lieu autre fermé accessible au public, mais non soumis au Covid-check, doit porter un masque »(voir page 5 de la note de Maître Bock) ; l’auteur de la note poursuit en affirmant qu’une « différence de traitement est effectuée à l’égard de deux personnes [qui] ne cherche pas un but légitime ».

 

Le mérite de la question de la conformité à l’article 10bis (1) de la Constitution telle que soulevée doit s’apprécier à la lumière de l’ensemble des développements du mandataire du prévenu.

 

Comme il n’appartient pas au tribunal de police d’apprécier si une éventuelle différenciation opérée par la loi est objective, rationnellement justifiée, adéquate et proportionnée à son but, les développements du prévenu quant à l’efficacité des masques de protection, quant à l’opportunité de les porter et quant à la contagiosité éventuelle de personnes vaccinées, guéries ou non-vaccinées, invoqués à l’appui de la question préjudicielle dont objet, sont dénués de toute pertinence. Il convient en conséquence de les écarter purement et simplement.

 

Le ministère public soulève en premier lieu le critère de comparabilité des situations tel que consacré par une jurisprudence récente pour affirmer que la question préjudicielle dont objet est dénuée de fondement faute de concerner des situations comparables.

 

Il est en effet admis désormais que la comparabilité des situations dont la discrimination est alléguée entre dans le champ d’appréciation des juridictions de l'ordre judiciaire ou de l'ordre administratif afin de déterminer si une question de conformité à l'article 10bis (1) de la Constitution n'est pas dénuée de tout fondement au regard de l'article 6 alinéa 2, sous b) de la loi modifiée du 27 juillet 1997 portant organisation de la Cour constitutionnelle (voir Cass., arrêt n° 85/2020 du 18 juin 2020, numéro CAS-2019-00096 du registre, voir également Cass., arrêt n° 139/2021 du 25 novembre 2021, numéro CAS-2020-00129 du registre).

 

Face au constat que les deux situations dont une discrimination alléguée est déduite ne sont pas comparables, les juges du fond peuvent conclure que la question préjudicielle soulevée est dénuée de tout fondement sans violer l’article 6 de la loi précitée du 27 juillet 1997 (voir entre autres: Cass., arrêt n° 166/2019 pénal du 5 décembre 2019, numéro CAS-2018-00116 du registre).

 

Les juges du fond doivent néanmoins indiquer les éléments de fait les ayant amenés à retenir leur conclusion relative à cette comparabilité des situations, permettant à la Cour de cassation de contrôler ce point. (Cass, arrêt n°27/2020 du 3 février 2020, numéro CAS-2019-00017 du registre).

 

Dans l’appréciation du mérite de la question préjudicielle, il appartient dès lors au tribunal d’examiner si le client d’un commerce exploité en lieu fermé se trouve dans une situation comparable à celle d’un participant à une activité en lieu fermé soumise au régime dit du Covid check.

 

Le régime Covid check est défini à l’article 1er tiret 27 de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 telle qu’applicable au moment des faits comme suit :

 

« régime applicable à des établissements accueillant un public, rassemblements, manifestations ou événements dont l’entrée est exclusivement réservée aux personnes pouvant se prévaloir soit d’un certificat de vaccination tel que visé à l’article 3bis muni d’un code QR, soit d’un certificat de rétablissement tel que visé à l’article 3ter muni d’un code QR, soit d’un certificat de test Covid-19, tel que visé à l’article 3quater, indiquant un résultat négatif et soit muni d’un code QR, soit certifié par l’une des personnes visées à l’article 3quater ou aux personnes qui présentent un test autodiagnostique servant au dépistage du virus SARS-CoV-2 réalisé sur place et dont le résultat est négatif. Pour les établissements, rassemblements, manifestations ou événements qui accueillent du public après une heure du matin et qui souhaitent bénéficier du régime Covid check, les tests antigéniques rapides SARS-CoV-2 non certifiés par les personnes visées à l’article 3 quater (5) ne sont ni valables ni admis entre une heure et six heures du matin. Les personnes âgées de moins de six ans sont exemptées de la réalisation d’un test autodiagnostique sur place ou de la présentation d’un certificat tel que visé à l’article 3quater. Le régime fait l’objet d’une notification préalable par voie électronique à la Direction de la santé et, sauf pour les rassemblements ayant lieu au domicile, d’un affichage visible. Lors de la notification, le périmètre du lieu de la manifestation ou de l’événement doit être déterminé de manière précise et la notification comprend l’indication des dates ou périodes visées. »

 

Il ressort de la disposition légale précitée que le choix d’opter pour le régime du Covid check appartenait (sous le régime de la loi applicable au moment des faits et sous réserve des dispositions relatives aux établissements de restauration [article 2] et aux activités occasionnelles et accessoires de restauration et de débit de boissons [article 4 quater (4)]) aux organisateurs des rassemblements, manifestations ou événements respectivement aux exploitants des établissements accueillant un public.

 

C’est dès lors en fonction du choix opéré par les organisateurs des rassemblements, manifestations ou événements respectivement les exploitants des établissements accueillant un public que des mesures différentes s’appliquaient aux personnes fréquentant les événements ou établissements visés.

 

Dans ces circonstances et dans le cadre d’une appréciation sommaire, le tribunal de céans retient que les deux situations sont susceptibles d’être considérées comme comparables.

 

Le moyen du ministère public demandant à voir déclarer la question préjudicielle telle que soumise à l’appréciation du tribunal comme étant dénuée de tout fondement en l’absence de situations comparables doit en conséquence être écarté.

 

La Cour Constitutionnelle n’a pas déjà statué sur une question ayant le même objet.

 

Le tribunal retient encore que la question préjudicielle est nécessaire pour rendre un jugement alors que la décision de la Cour Constitutionnelle influera sur la décision que le tribunal sera amené à prendre quant à la matérialité de l’infraction reprochée.

 

Il convient cependant de préciser la question telle que suggérée par le mandataire du prévenu afin d’y intégrer la distinction opérée par le législateur selon que les activités se déroulent sous le régime du Covid check ou non.

 

Il convient partant de déférer à la Cour Constitutionnelle la question préjudicielle suivante:

 

« L’article 4, paragraphe (1), 1ère phrase de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, tel que modifié en dernier lieu par la loi du 14 septembre 2021 portant modification:

1° de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19;

2° de la loi modifiée du 6 janvier 1995 relative à la distribution en gros des médicaments;

3° de la loi modifiée du 22 janvier 2021 portant: 1° modification des articles L. 234-51, L. 234-52 et L. 234-53 du Code du travail; 2° dérogation temporaire aux dispositions des articles L. 234-51, L. 234-52 et L. 234-53 du Code du travail,

applicable au 30 septembre 2021,

en ce qu’il rend obligatoire aux personnes le port du masque en toutes circonstances pour les activités ouvertes à un public qui circule et qui se déroulent en lieu fermé, sauf pour les activités qui se déroulent sous le régime du Covid check, est-il conforme au principe d’égalité de toute personne devant la loi tel que consacré par l’article 10bis paragraphe (1) de la Constitution ?».

 

b)      quant à la question préjudicielle de la conformité de l’article 4 paragraphe (1) de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 à la garantie des droits naturels de la personne humaine consacrée par l’article 11bis (1) [ en fait article 11 paragraphe (1)] de la Constitution 

 

Il convient de préciser qu’en donnant lecture de sa note de plaidoiries, le mandataire de P.1.) indiquait qu’il contestait la conformité de l’article 4 paragraphe (1) de la loi précitée du 17 juillet 2020 tel qu’applicable au moment du fait lui reproché à l’article 11 paragraphe (1) de la Constitution et non pas à l’article 11bis (1).

 

Il convient de lui en donner acte.

 

L’article 11 paragraphe (1) de la Constitution dispose que « l’Etat garantit les droits naturels de la personne humaine et de la famille ».

 

P.1.) argumente, jurisprudences à l’appui, que le droit naturel se restreint aux questions existentielles de l’être humain, au respect de sa dignité et sa liberté et inclut, entre autres, le droit à la liberté de déplacement, ainsi que le droit à la santé tout comme le droit à l’autodétermination de l’être humain, notamment sur des questions affectant sa propre vie et sa santé. Il estime que l’obligation du port du masque constitue une ingérence dans le droit à l’autodétermination qui concerne inévitablement sa propre vie et santé. Il argumente encore que l’obligation du port du masque influe sur l’apparence et le style vestimentaire; il estime que toute restriction à la liberté du choix vestimentaire risque d’aller « à l’encontre de plusieurs droits fondamentaux ».

 

Il s’interroge sur la légitimité des moyens employés, sur leur proportionnalité au but recherché et sur la justification objective de l’obligation du port du masque.

 

Il s’agira pour le tribunal de déterminer si les interrogations du prévenu quant à la conformité de l’obligation du port du masque à la garantie des droits naturels de toute personne telle que consacrée par l’article 11 de la Constitution est manifestement dénuée de tout fondement. Le principe étant celui du renvoi préjudiciel obligatoire, cette exception est à interpréter restrictivement et il n’appartient pas au juge du fond de verser dans des raisonnements ou interprétations constitutionnelles détaillées, sous peine d’empiéter sur les compétences réservées à la Cour Constitutionnelle. En effet, la décision d’écarter un moyen d’exception d’inconstitutionnalité soulevé par l’une des parties au motif que le doute d’inconstitutionnalité est dénué de tout fondement ou que la question n’est pas nécessaire, implique nécessairement une décision en faveur de la constitutionnalité de la disposition légale arguée d’inconstitutionnelle (voir en ce sens: C.Sauer, Contrôle juridictionnel des lois au Luxembourg, édition Larcier Legal, numéro 425).

 

En l’espèce, si le mandataire du prévenu se borne à reprendre par extraits l’argumentation développée dans un jugement rendu par le tribunal de police en date du 1er mars 2022 par le tribunal de police de Luxembourg (jugement n°126/22) relatif à l’obligation du port du masque, sans autrement définir les droits naturels qu’il prétend violés, le ministère public, après s’être initialement rapporté à sagesse du tribunal, conteste la pertinence, partant le fondement, de la question préjudicielle suggérée.

 

La Cour Constitutionnelle a défini le « droit naturel » comme « celui découlant de la nature humaine» qui « existe même sans texte de loi » (arrêt n° 2/98 du 13 novembre 1998). Dans son arrêt n° 20/04 du 28 mai 2004, la Cour Constitutionnelle a dit que « [le] droit naturel se restreint aux questions existentielles de l’être humain, au respect de sa dignité et de sa liberté ». Elle a par la suite confirmé que le concept de droits naturels de la personne, au sens de l’article 11, peut être invoqué dans des questions préjudicielles, tout en limitant le domaine à un noyau dur de prérogatives essentielles pour l’être humain.

 

Or, la restriction du naturel « aux questions existentielles » de l’être humain n’enlève aucunement le caractère indéfini et imprécis de ce qu’on a vocation à considérer comme existentiel ou faisant partie, de manière substantielle, de la personne humaine ou de la famille (v. C. Sauer, op. cit., numéro 266).

 

Une conception jusnaturaliste du droit implique le risque d’une application arbitraire et opportuniste du droit en fonction des droits relevant prétendument d’un droit naturel qui s’imposerait raisonnablement (voir C. Sauer, op. cit. , numéro 270).

 

Le Conseil d’Etat, dans son avis complémentaire du 27 avril 1990 sur le projet de révision des paragraphes (1) et (3) à (6) de l’article 11 de la Constitution (doc. Parl. 3923 B/1, p. 2), a retenu que les droits naturels englobent « les droits subjectifs innés et inaliénables que chaque individu possède par naissance et par nature sans avoir besoin de les tenir d’un acte ni pouvoir de les aliéner ».

 

La jurisprudence luxembourgeoise semble exclure des droits naturels les droits qui prennent leur fondement dans le droit positif (voir C. Sauer, op. cit., numéro 272 et suivants).

 

Or, en l’espèce et en présence des incertitudes entourant la notion et le contenu des « droits naturels », le tribunal ne saurait retenir que l’obligation de porter un masque n’est pas susceptible de constituer -comme le soutient P.1.)- une ingérence dans le droit à l’autodétermination en ce qui concerne sa propre vie et santé, partant à d’éventuels droits naturels.

 

La question préjudicielle telle que suggérée par P.1.) n’est dès lors pas manifestement dénuée de tout fondement; décider autrement équivaudrait à retenir la constitutionnalité de la disposition dont sujet et, partant, à empiéter sur les prérogatives de la Cour Constitutionnelle.

 

La question de la conformité de l’obligation du port du masque telle que portée par l’article 4 paragraphe (1), 1ère phrase, de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 à l’article 11 paragraphe (1) de la Constitution n’a pas encore été tranchée par la Cour Constitutionnelle et la décision de la Cour Constitutionnelle influera sur la décision que le tribunal sera amené à prendre quant à la matérialité de l’infraction reprochée.

 

Il y a d’ailleurs lieu de donner à considérer que le tribunal de police de Luxembourg a récemment, dans un jugement du 1er mars 2022 (jugement numéro 126/22), saisi la Cour Constitutionnelle d’une question préjudicielle quant à la conformité de l’obligation du port du masque découlant de l’article 4 paragraphe 4 de la loi du 17 juillet 2020, dans ses versions applicables au 16 janvier 2021 et au 23 janvier 2021, à l’article 11 paragraphe (1) de la Constitution garantissant les droits naturels et que la Cour Constitutionnelle ne s’est pas encore prononcée sur le mérite de la question préjudicielle.

 

Il convient partant de déférer à la Cour Constitutionnelle la question préjudicielle suivante:

 

« L’article 4 paragraphe (1), 1ère phrase, de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, tel que modifié en dernier lieu par la loi du 14 septembre 2021 portant modification:

1° de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19;

2° de la loi modifiée du 6 janvier 1995 relative à la distribution en gros des médicaments;

3° de la loi modifiée du 22 janvier 2021 portant: 1° modification des articles L. 234-51, L. 234-52 et L. 234-53 du Code du travail; 2° dérogation temporaire aux dispositions des articles L. 234-51, L. 234-52 et L. 234-53 du Code du travail,

applicable au 30 septembre 2021,

en ce qu’il rend obligatoire le port du masque en toutes circonstances pour les activités ouvertes au public qui circule et qui se déroulent en lieu fermé, sauf pour les activités qui se déroulent sous le régime Covid check, est-il conforme à la garantie des droits naturels de la personne humaine consacré par l’article 11 paragraphe (1) de la Constitution? ».

 

c)       quant à la question préjudicielle de la conformité de l’article 4 paragraphe (1) de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 à la garantie des droits à la vie privée consacrés par l’article 11bis (3) [en fait article 11 paragraphe (3)] de la Constitution 

 

P.1.) soulève la question de la conformité de l’obligation du port du masque de protection au droit au respect de la vie privée.

 

Il convient à nouveau de préciser qu’en donnant lecture de sa note de plaidoiries, le mandataire de P.1.) indiquait qu’il contestait la conformité de l’article 4 paragraphe (1) de la loi précitée du 17 juillet 2020 tel qu’applicable à la date du fait reproché, soit le 30 septembre 2021, à l’article 11 paragraphe (3) de la Constitution et non pas à l’article 11bis (3).

 

Le mandataire de P.1.) développe une argumentation identique à celle développée quant à la violation de l’article 11 paragraphe (1) de la Constitution, tandis que le représentant du ministère public se rapporte initialement à sagesse du tribunal avant de contester la pertinence de la question préjudicielle suggérée.

 

L’article 11 paragraphe (3) de la Constitution luxembourgeoise dispose que « L’Etat garantit la protection de la vie privée, sauf les exceptions prévues par la loi ».

 

La Cour Européenne des Droits de l’Homme a décidé au sujet de l’article 8 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme consacrant le droit à la vie privée que « les choix faits quant à l’apparence que l’on souhaite avoir, dans l’espace public comme en privé, relèvent de l’expression de la personnalité de chacun et donc de la vie privée. Il en est ainsi pour le choix de la coiffure (P. c. Roumanie (déc.), §§ 32-33), l’interdiction d’entrer à l’université opposée à un étudiant qui portait la barbe (T. c. Turquie (déc.)), l’interdiction de porter dans l’espace public une tenue destinée à dissimuler le visage pour des femmes qui souhaitaient porter le voile intégral pour des raisons tenant à leurs convictions (S. c. France [GC], §§ 106-107) ou l’interdiction de se montrer nu en public (G. c. Royaume-Uni, §§ 182-184). Il convient toutefois d’observer que, dans toutes ces affaires, la Cour a considéré que la restriction apportée au droit de choisir son apparence personnelle était proportionnée. » (voir Guide sur l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme: Droit au respect de la vie privée et familiale, du domicile et de la correspondance, numéro 243, édité par le Conseil de l’Europe, mis à jour au 31 août 2020).

 

Dans ces circonstances, le défaut de tout fondement qui dispense le juge du fond de saisir la Cour Constitutionnelle n’est pas évident et manifeste au point de s’imposer au tribunal.

 

La question de la conformité de l’obligation du port du masque telle que portée par l’article 4 paragraphe (1), 1ère phrase, de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 à l’article 11 paragraphe (3) n’a pas encore été tranchée par la Cour Constitutionnelle et la décision de la Cour Constitutionnelle influera sur la décision que le tribunal sera amené à prendre quant à la matérialité de l’infraction.

 

Il convient d’ailleurs de donner à considérer que le tribunal de police de Luxembourg a récemment, dans un jugement du 1er mars 2022 (jugement numéro 126/22), saisi la Cour Constitutionnelle d’une question préjudicielle quant à la conformité de l’obligation du port du masque découlant de l’article 4 paragraphe 4 de la loi du 17 juillet 2020, dans ses versions applicables au 16 janvier 2021 et au 23 janvier 2021, à l’article 11 paragraphe (1) de la Constitution garantissant la protection de la vie privée et que la Cour Constitutionnelle ne s’est pas encore prononcée sur le mérite de la question préjudicielle.

 

Il convient partant de déférer à la Cour Constitutionnelle la question préjudicielle suivante:

 

« L’article 4 paragraphe (1), 1ère phrase, de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, tel que modifié en dernier lieu par la loi du 14 septembre 2021 portant modification:

1° de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19;

2° de la loi modifiée du 6 janvier 1995 relative à la distribution en gros des médicaments;

3° de la loi modifiée du 22 janvier 2021 portant: 1° modification des articles L. 234-51, L. 234-52 et L. 234-53 du Code du travail; 2° dérogation temporaire aux dispositions des articles L. 234-51, L. 234-52 et L. 234-53 du Code du travail,

applicable au 30 septembre 2021,

en ce qu’il rend obligatoire le port du masque en toutes circonstances pour les activités ouvertes au public qui circule et qui se déroulent en lieu fermé, sauf pour les activités qui se déroulent sous le régime Covid check, est-il conforme à la garantie de la vie privée consacrée par l’article 11 paragraphe (3) de la Constitution? ».

 

d)      quant à la question préjudicielle de la conformité de l’article 4 paragraphe (1) de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 à la garantie de la liberté d’expression consacrée par l’article 24 de la Constitution 

 

P.1.), en reprenant à son compte par extraits l’argumentation développée par le tribunal de police de et à Luxembourg dans son jugement numéro 126/2022 du 1er mars 2022 précité, demande à voir soumettre à la Cour Constitutionnelle la question de la contrariété de l’article 4 paragraphe (1) de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 telle qu’applicable au 30 septembre 2021 à l’article 24 de la Constitution.

 

L’article 24 de la Constitution luxembourgeoise dispose que « La liberté de manifester ses opinions par la parole en toutes matières, et la liberté de la presse sont garanties, sauf la répression des délits commis à l’occasion de l’exercice de ces libertés - La censure ne pourra jamais être établie ».

 

En l’espèce, le tribunal se doit de constater que les faits dont s’agit ont eu lieu alors que P.1.) effectuait ses courses dans un magasin (contrairement aux prévenus dans l’affaire citée abondamment par P.1.) qui ont été interpelés à l’occasion de manifestations contre les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19).

 

Le mandataire de P.1.) n’argumente pas et, à fortiori, n’établit pas en quoi la liberté d’expression ou de manifester les opinions du prévenu aurait concrètement été entamée ou était susceptible d’être mise en cause.

 

La question préjudicielle suggérée n’est dès lors pas nécessaire pour permettre au tribunal de police de rendre son jugement; le tribunal est partant dispensé de poser la question préjudicielle suggérée.

 

Dans l’attente de la réponse de la Cour Constitutionnelle aux questions préjudicielles plus amplement détaillées dans le dispositif du présent jugement, il convient de réserver l’action publique ainsi que les frais.

 

En application des dispositions de l’article 12 de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 telle qu’applicable à la date des faits, le tribunal statue en dernier ressort.

 

Par ces motifs

 

le tribunal de police de et à Esch-sur-Alzette, statuant contradictoirement et en dernier ressort, le représentant du ministère public entendu en ses conclusions et le mandataire du prévenu entendu en les explications et moyens de défense du prévenu:

 

donne acte à P.1.) qu’il conteste la conformité de l’article 4 paragraphe (1), 1ère phrase, de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 à l’article 11 paragraphes (1) et (3) de la Constitution et non pas à l’article 11bis de la Constitution;

 

dit qu’il y a lieu de rectifier la désignation de la disposition légale que le ministère public reproche à P.1.) d’avoir violé;

 

constate que le ministère public reproche en fait à P.1.) d’avoir enfreint les dispositions de l’article 4 paragraphe (1), 1ère phrase, de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19;

 

rejette le moyen du ministère public à voir écarter des débats les extraits des publications citées dans la note de plaidoiries du mandataire de P.1.) pour avoir été reproduites en langue anglaise;

 

dit que la question préjudicielle de la conformité de l’article 4 paragraphe (1), 1ère phrase, de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19 à la garantie de la liberté d’expression consacrée par l’article 24 de la Constitution n’est pas nécessaire pour le jugement et se dispense de la soumettre à la Cour Constitutionnelle;

 

avant tout autre progrès en cause:

 

défère à la Cour Constitutionnelle les questions préjudicielles suivantes:

 

·       l’article 4 paragraphe (1), 1ère phrase, de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, tel que modifié en dernier lieu par la loi du 14 septembre 2021 portant modification:

1° de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19;

2° de la loi modifiée du 6 janvier 1995 relative à la distribution en gros des médicaments;

3° de la loi modifiée du 22 janvier 2021 portant: 1° modification des articles L. 234-51, L. 234-52 et L. 234-53 du Code du travail; 2° dérogation temporaire aux dispositions des articles L. 234-51, L. 234-52 et L. 234-53 du Code du travail,

et applicable au 30 septembre 2021,

en ce qu’il rend obligatoire aux personnes le port du masque en toutes circonstances pour les activités ouvertes à un public qui circule et qui se déroulent en lieu fermé, sauf pour les activités qui se déroulent sous le régime du Covid check, est-il conforme au principe d’égalité de toute personne devant la loi tel que consacré par l’article 10bis paragraphe (1) de la Constitution?;

 

·         l’article 4 paragraphe (1), 1ère phrase de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, tel que modifié en dernier lieu par la loi du 14 septembre 2021 portant modification:

1° de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19;

2° de la loi modifiée du 6 janvier 1995 relative à la distribution en gros des médicaments;

3° de la loi modifiée du 22 janvier 2021 portant: 1° modification des articles L. 234-51, L. 234-52 et L. 234-53 du Code du travail; 2° dérogation temporaire aux dispositions des articles L. 234-51, L. 234-52 et L. 234-53 du Code du travail,

et applicable au 30 septembre 2021,

en ce qu’il rend obligatoire le port du masque en toutes circonstances pour les activités ouvertes au public qui circule et qui se déroulent en lieu fermé, sauf pour les activités qui se déroulent sous le régime Covid check, est-il conforme à la garantie des droits naturels de la personne humaine consacré par l’article 11 paragraphe (1) de la Constitution?;

 

·     l’article 4 paragraphe (1), 1ère phrase de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, tel que modifié en dernier lieu par la loi du 14 septembre 2021 portant modification:

1° de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19;

2° de la loi modifiée du 6 janvier 1995 relative à la distribution en gros des médicaments;

3° de la loi modifiée du 22 janvier 2021 portant: 1° modification des articles L. 234-51, L. 234-52 et L. 234-53 du Code du travail; 2° dérogation temporaire aux dispositions des articles L. 234-51, L. 234-52 et L. 234-53 du Code du travail,

et applicable au 30 septembre 2021,

en ce qu’il rend obligatoire le port du masque en toutes circonstances pour les activités ouvertes au public qui circule et qui se déroulent en lieu fermé, sauf pour les activités qui se déroulent sous le régime Covid check, est-il conforme à la garantie de la vie privée consacrée par l’article 11 paragraphe (3) de la Constitution?;

 

réserve l’action publique et les frais.

 

 

Le tout par application des articles I et II de la loi du 8 mars 2017 renforçant les garanties procédurales en matière pénale, des articles 1, 4, 12, 17 et 18 de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19, de l’article 2 du protocole additionnel numéro 7 à la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales, de l’article 6 de la loi modifiée du 27 juillet 1997 portant organisation de la Cour Constitutionnelle et des articles 3-8, 145, 146, 152, 153 et 154 du code de procédure pénale dont mention a été faite.

 

 

 

Ainsi fait, jugé‚ et prononcé, en présence d’un représentant du Ministère Public, en l'audience publique dudit tribunal de police à Esch-sur-Alzette, date qu'entête, par Nous magistrat2, juge de paix, siégeant comme juge de police, assisté du greffier (…), qui ont signé le présent jugement.

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