Prolongation de l'exposition du dessinateur d'audience Pit Wagner au Palais de justice de Diekirch

Dans le cadre de l'exposition "Le trait juste" l'artiste Pit Wagner a fait quelques réflexions quant au travail du dessinateur d'audience :

Suivre un procès est une chose délicate.

Le concept de « justice » a beaucoup de facettes, philosophiques, morales et sociétales.
Dans l'histoire de l'humanité, toutes les sociétés ont développé des systèmes pour régler les conflits et dysfonctionnements. Les conseils des sages ou des anciens débattaient comment réagir pour resocialiser des individus non respectueux des normes de comportement et des conventions du clan, de la tribu ou de la nation. Punitions, compensations, bannissements, éliminations ou mesures éducatives ont été et sont les réponses aux comportements contraires aux lois ou aux règles définies par une société. Mais ce n'est pas mon rôle de faire un exposé sur l'anthropologie du droit, car je ne suis ni anthropologue, ni juriste.

Comme observateur, j'essaie de prendre une position neutre, sans « préjugés ».

C'est une illusion, car personne ne peut supprimer son éducation, ses expériences, ses croyances et mécréances passées et présentes, son histoire personnelle, tout ce qui façonne le concept personnel de justesse. Pendant les procès, les arguments des différentes parties me poussent souvent à nuancer ma vue, mon opinion sur l'affaire débattue. Chacun a ses critères moraux personnels, tout le monde juge. Souvent les valeurs morales des citoyens ne sont pas en accord avec ce que la loi définit comme justice. Je ne voudrais pas être juge.

L'artiste qui s'est donné la tâche de représenter par le dessin la situation de la salle d'audience est automatiquement confronté au concept de « vérité ». Les témoins jurent de dire la vérité, toute la vérité et rien que la vérité. Toute la vérité du dessinateur est ce qu'il voit et entend et ce que le temps d'une audience permet de mettre sur une feuille de papier. S'il laisse de côté un personnage, par choix ou par manque de temps, ou s'il ajoute une personne, un témoin ou un avocat qui n'était pas là quand il a commencé le dessin, est-ce qu'il ment ? S'il augmente ou diminue la taille d'une personne, choisit une expression momentanée de son visage, est-ce qu'il manipule la vérité?

Je ne suis pas caricaturiste, je me vois plutôt comme chroniqueur visuel.

Bien sûr ce qui se dit ne m'échappe pas, mais je me concentre sur le langage corporel et la mimique.

Est-ce qu'un témoin ou un artiste peuvent être objectifs, faire abstraction de leurs valeurs personnelles ?

La vérité a de multiples facettes, et chacun a la sienne. Il faut faire des choix définis par l'évaluation personnelle de l'importance des choses. En dessin c'est pareil.

Avec ces quelques brèves réflexions autour de la justice, il me semble important d'ajouter qu'il est primordial que la justice soit indépendante. Aussi, la liberté d'expression des artistes et de la presse doit être respectée.

Là encore, tout est compliqué. Est-ce que la liberté d'expression inclut le droit au mensonge, ou à la vérité partielle, à l'insulte, à l'humiliation ? Quand est-ce qu'un acte ou des paroles sont-ils des insultes ? Parfois les lois sont contradictoires. Et cetera... Pas facile. Aux juges de juger. À moi de les dessiner.

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