Arrêt PEI 2013/0231 du Conseil supérieur de la sécurité sociale relatif au droit à une indemnité d'attente d'un détenu

Le Conseil supérieur de la sécurité sociale a rendu en date du 12 février 2015 un arrêt dans l'affaire PEI 2013/0231 du registre.

 

CONSEIL SUPERIEUR DE LA SECURITE SOCIALE

 

Composition:

 

M. Etienne Schmit, président de chambre à la Cour d’appel, président 

Mme Yannick Didlinger, juge de paix à Luxembourg, assesseur-magistrat 

Mme Françoise Wagener, juge des tutelles au trib. d’arr. de Luxembourg, assesseur-magistrat 

M. Jean-Pierre Wagner, maître électricien, Mamer, assesseur-employeur 

Mme  Corinne Ludes, déléguée permanente, Dudelange,  assesseur-assuré 

M. Francesco Spagnolo, secrétaire

 

ENTRE:

 

A, né le … , actuellement détenu au Centre Pénitentiaire de Givenich, L-6666 Givenich,

appelant,

comparant par Maître Tom Hansen, avocat, Luxembourg, en remplacement de Maître Fränk Rollinger, avocat à la Cour, demeurant à Luxembourg;

 

ET:

 

la Caisse nationale d’assurance pension, établie à Luxembourg,

représentée par le président de son comité-directeur actuellement en fonction,

intimée,

comparant par Monsieur (...), conseiller de direction 1ère classe, demeurant à Luxembourg. 

Par requête entrée au secrétariat du Conseil supérieur de la sécurité sociale le 2 décembre 2013, A a relevé appel d’un jugement rendu par le Conseil arbitral de la sécurité sociale le 29 octobre 2013, dans la cause pendante entre lui et la Caisse nationale d’assurance pension, et dont le dispositif est conçu comme suit: Aus diesen Gründen, öffentlich verfahrend, in erster Instanz und kontradiktorisch erkennend, erklärt das Schiedsamt der sozialen Sicherheit die Klage für unbegründet und bestätigt den angefochtenen Bescheid des Vorstandes vom 21. Februar 2013 vollinhaltlich. 

Les parties furent convoquées pour l’audience publique du 24 avril 2014, puis pour celle du 9 octobre 2014, à laquelle Monsieur le président fit le rapport oral. 

Maître Tom Hansen, pour l’appelant, versa une note de plaidoiries et en donna lecture. 

Monsieur Claude Rumé, pour l’intimée, conclut à la confirmation du jugement du Conseil arbitral du 29 octobre 2013. 

Après prise en délibéré de l’affaire le Conseil supérieur rendit à l’audience publique de ce jour l’arrêt qui suit: 

1. La procédure suivie

Le 30 mars 2012, le président de la CNAP a décidé de suspendre à partir du 1er mars 2012 le paiement de l’indemnité d’attente dont A bénéficiait depuis le 9 juin 2006, suivant décision du 14 septembre 2006. La décision précise qu’elle est prise en application de l’article 210 du code de la sécurité sociale, qui prévoit la suspension en cas d’exécution d’une peine d’emprisonnement supérieure à un mois, et relève que A est détenu en exécution d’une telle peine. 

Le 21 février 2013, le comité directeur de la CNAP, statuant sur l’opposition de A contre la décision présidentielle, réforme cette décision et retire le bénéficie de l’indemnité d’attente à partir du 26 septembre 2007.

La décision énonce aussi ce qui suit: 

« L’assuré a en principe droit à une pension de vieillesse à partir du 23 décembre 2016. L’ensemble du dossier, y compris les possibilités de recouvrement des indemnités d’attente payées mais non dues, sera alors réexaminé en fonction de la législation applicable à ce moment. Le projet de loi numéro 6382 portant réforme de l’administration pénitentiaire prévoit en effet l’abrogation de l’article 210 du Code de la sécurité sociale. » 

Le comité directeur relève que A est en détention préventive à partir du 12 septembre 2007 et qu’il est détenu en exécution d’une peine de réclusion de quinze ans, théoriquement jusqu’au 25 juin 2022. 

En réponse au moyen affirmant que l’article 210 du code de la sécurité sociale ne serait pas applicable à l’indemnité d’attente, le comité directeur note que l’article L.551-5, paragraphe 2, troisième alinéa, du code du travail étend l’application des articles 187, alinéa 5, 188, 189, 192, 193, alinéa 2, et 194 ainsi que les autres dispositions du livre III du code de la sécurité sociale à l’indemnité d’attente. 

Le comité directeur retient que suivant information de l’Agence pour le développement de l’emploi A n’était plus inscrit comme demandeur d’emploi depuis le 26 septembre 2007. Comme l’article L.551-5, paragraphe 2, alinéa 2, soumet l’allocation d’une indemnité d’attente à l’inscription comme demandeur d’emploi, A n’a plus droit à cette indemnité à partir du 26 septembre 2007. 

En application de l’article 211, alinéa 1, du code de la sécurité sociale, le comité directeur retire rétroactivement l’indemnité d’attente, une condition d’octroi de l’indemnité, à savoir l’inscription comme demandeur d’emploi, faisant défaut. 

Le 29 octobre 2013, le Conseil arbitral de la sécurité sociale a rejeté le recours contre la décision du comité directeur. 

A a régulièrement formé appel contre ce jugement. 

2. Le cadre juridique

Sous l’intitulé « Retrait de la pension d’invalidité », l’article 193 du code de la sécurité sociale a la teneur suivante:

« La pension d’invalidité est retirée si le bénéficiaire ne remplit plus les conditions prévues à l’article 187.

Sans préjudice des dispositions de l’article 211, la décision qui retire une pension est

applicable dès le premier jour du mois suivant immédiatement celui au cours duquel elle a été notifiée. » 

Sous l’intitulé « Suspension, modification et suppression des pensions », l’article 210 du code de la sécurité sociale dispose:

« Les pensions sont suspendues pendant l’exécution d’une peine privative de liberté supérieure à un mois.

Toutefois, pour la durée de la détention la pension due à un détenu est dévolue aux personnes qui, en cas de décès, auraient droit à une pension de survie, à condition qu’ils résident au Luxembourg et que le pensionné ait contribué d’une façon prépondérante à leur entretien. En cas de divorce ou de séparation, le conjoint, ou, en cas de dissolution du partenariat en vertu de l’article 13 de la loi du 9 juillet 2004 relative aux effets légaux de certains partenariats, l’ancien partenaire a droit à la pension jusqu’à concurrence des pensions alimentaires.

Toute suspension prend cours à l’expiration du mois au cours duquel se produit l’événement y donnant lieu. Elle cesse d’être appliquée à l’expiration du mois au cours duquel la cause de suspension est venue à défaillir.

Lorsqu’une pension a été octroyée ou liquidée sur erreur matérielle elle est modifiée ou supprimée suivant le cas. »

Sous l’intitulé « Restitution », l’article 211 a la teneur suivante:

« Toute pension est supprimée si les conditions qui l’ont motivée viennent à défaillir.

Si les éléments de calcul se modifient ou s’il est constaté qu’elle a été accordée par suite d’une erreur matérielle, la pension est relevée, réduite ou supprimée.

Les prestations octroyées ou liquidées de trop peuvent être récupérées.

La restitution de prestations est obligatoire si l’assuré ou le bénéficiaire de pension a

provoqué leur attribution en alléguant des faits inexacts ou en dissimulant des faits importants ou s’il a omis de signaler de tels faits après l’attribution.

Les sommes indûment touchées sont restituées sans préjudice de poursuites judiciaires éventuelles; elles peuvent également être déduites de la pension ou des arrérages restant dus sans que le montant mensuel ne puisse être réduit en-dessous de la moitié du douzième du montant de référence prévu à l’article 222. La décision de restitution ne peut être prise qu’après que l’intéressé aura été entendu soit verbalement, soit par écrit.

… » 

Suivant l’article L.551-1 du code du travail:

« (1) Le salarié sous contrat de travail qui n’est pas à considérer comme invalide au sens de l’article 187 du Code des assurances sociales, mais qui présente une incapacité pour exercer son dernier poste de travail, bénéficie d’un reclassement interne ou d’un reclassement externe. L’existence d’un contrat de travail est appréciée au moment de la saisine de la commission mixte en vertu de l’article L. 552-1.

(4) Le reclassement externe consiste dans un reclassement sur le marché du travail. » 

L’article L.551-5 du code du travail dispose:

« …

(2) Si, au terme de la durée légale de paiement de l’indemnité de chômage y compris la durée de prolongation, le salarié visé à l’article L. 551-1 n’a pu être reclassé sur le marché du travail, il bénéficie d’une indemnité d’attente, dont le montant correspond à la pension d’invalidité à laquelle il aurait eu droit. L’indemnité d’attente est à charge de l’organisme d’assurance pension compétent.

Pendant la durée du bénéfice de l’indemnité d’attente, le bénéficiaire doit rester inscrit comme demandeur d’emploi auprès du Service des «salariés» à capacité réduite de «l’Agence pour le développement de l’emploi»1 et être disponible pour le marché du travail.

Les articles 187, alinéa 5, 188, 189, 192, 193, alinéa 2 et 194 et pour autant que de besoin les autres dispositions du livre III du Code des assurances sociales sont applicables à l’indemnité d’attente.

L’indemnité d’attente est retirée si les conditions ayant motivé son octroi ne sont plus remplies ou si l’intéressé se soustrait aux mesures de reclassement.

(3) … » 

Suivant l’article 10 bis, paragraphe 1, de la Constitution: 

« Les Luxembourgeois sont égaux devant la loi. » 

Le protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme, tel qu’amendé par le protocole no 11, dispose en son article 1: 

« Article 1 – Protection de la propriété

Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.

Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu’ils jugent nécessaires pour réglementer l’usage des biens conformément à l’intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d’autres contributions ou des amendes. » 

L’article 14 de la Convention européenne des droits de l’homme a la teneur suivante: 

« Art. 14. Interdiction de discrimination

La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l’origine nationale ou sociale, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation. »

3. Les moyens de A

A considère qu’il aurait droit à l’indemnité d’attente en application de l’article L. 551-5, paragraphe 2, du code du travail et demande au Conseil supérieur de:

1. constater que l’article 210 du code de la sécurité sociale est contraire à l’article 10 bis, alinéa 1, de la Constitution, à l’article 1er du protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme en combinaison avec l’article 14 de la Convention,

2. annuler la décision entreprise,

3. lui allouer une indemnité d’attente. 

Il développe les motifs suivants:

Le 12 septembre 2007, il a été placé en détention préventive et, le 15 février 2012, il a été condamné définitivement à quinze ans de réclusion. 

N’étant plus en mesure d’exercer son ancienne profession, il bénéficie d’une indemnité d’attente en attendant qu’il ait retrouvé un nouvel emploi. 

Cependant, comme il est détenu, il ne touche pas, contrairement au bénéficiaire d’une indemnité d’attente qui est libre, l’indemnité d’attente à laquelle il a droit en raison de son incapacité d’exercer son ancien emploi. 

Or, la personne incapable d’exercer son dernier emploi qui est libre de même que la personne qui est elle aussi incapable d’exercer son dernier emploi mais qui est détenue sont en attente d’un nouvel emploi; mais ces personnes sont traitées d’une manière différente quant à l’allocation de l’indemnité d’attente. 

Le traitement différent entre deux catégories de personnes, « à savoir Monsieur A pouvant bénéficier d’une semi-liberté » et une personne non détenue est contraire à l’article 10 bis, alinéa 1, de la Constitution, à l’article 1er du protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme et à l’article 14 de la Convention. Rien ne justifie ce traitement de A par rapport à une personne non détenue. 

A ne développe pas davantage son moyen, sauf à citer les dispositions de ces trois règles invoquées. 

4. La position de la CNAP

La CNAP soutient que l’application de l’article L.551-5, paragraphe 2, du code du travail et non de l’article 210 du code de la sécurité sociale, serait en discussion et que A

n’aurait pas été inscrit comme demandeur d’emploi et n’aurait pas été disponible sur le marché du travail, de sorte que les conditions de l’article L.551-5, paragraphe 2, du code du travail n’auraient pas été remplies. 

Elle conclut à la confirmation du jugement. 

5. Le contrôle de la constitutionnalité

Lors des débats, le Conseil supérieur a invité les parties à s’expliquer sur sa compétence à constater qu’une disposition légale est contraire à l’article 10 bis de la Constitution. 

Le mandataire de A a déclaré que le Conseil supérieur n’avait pas compétence pour constater que la disposition légale est contraire à l’article 10 bis de la Constitution, mais que les conclusions tendaient à l’annulation d’une décision prise en application de cette disposition inconstitutionnelle. 

La CNAP n’a pas pris position. 

Le Conseil supérieur retient qu’il n’est pas compétent pour vérifier la conformité d’une disposition légale à la Constitution et pour décider qu’une disposition n’est pas conforme. 

Dès lors, le moyen tendant à l’annulation de la décision au motif que la législation applicable ne serait pas conforme à la Constitution n’est pas fondé. 

6. La conformité à la Convention

La personne qui est incapable d’exercer son dernier emploi, sans être atteinte d’une incapacité de travail l’empêchant d’exercer un autre emploi correspondant à ses forces et aptitudes, et qui ne peut pas être affectée à un autre poste auprès de son employeur, fait l’objet d’une décision de reclassement externe. 

En attendant de trouver un nouvel emploi, elle touche des allocations de chômage, et au cas où elle n’est pas reclassée à l’expiration de la période d’allocation d’indemnités de chômage, elle a droit à une indemnité d’attente qui correspond au montant de la pension d’invalidité à laquelle elle aurait droit en cas d’invalidité totale au sens de la loi. 

Suivant l’article L.551-5, paragraphe 2, du code du travail, l’octroi de l’indemnité d’attente est soumis aux conditions que le bénéficiaire soit inscrit comme demandeur d’emploi et qu’il soit disponible pour le marché du travail. 

Même si le mandataire de A ne demande pas expressément au Conseil supérieur de dire que l’article L.551-5, paragraphe 2, serait contraire à l’article 1 du protocole combiné à l’article 14 de la Convention, le Conseil supérieur entend ses développements en ce sens qu’il considère que cette disposition légale opérerait une discrimination quant à son droit patrimonial protégé par l’article 1 du protocole. 

Le Conseil supérieur retient que la Convention européenne des droits de l’homme et l’article 1 du protocole additionnel tel qu’amendé par le protocole no 11 ne font pas obligation au Luxembourg de créer un droit à une indemnité en faveur d’une personne qui n’est pas invalide, mais qui n’est plus en mesure d’exercer son dernier emploi. 

Cependant, le droit à une indemnité d’attente, dès lors qu’il a été créé par la loi luxembourgeoise, constitue un droit patrimonial au sens de l’article 1 du protocole additionnel tel qu’amendé par le protocole no 11, et les conditions d’octroi de l’indemnité doivent être compatibles avec la Convention. 

Le Conseil supérieur constate que l’article L.551-5, paragraphe 2, exige de toute personne, quelle qu’elle soit et quelle que soit sa situation, une disponibilité pour le marché du travail. La loi elle-même n’opère pas de différence de traitement. 

Cependant, l’article 14 de la Convention interdit de traiter de manière différente, sans justification objective et raisonnable, des personnes qui se trouvent dans des situations comparables. Mais des différences entre des situations à d’autres égards analogues peuvent justifier des traitements distincts. 

A soutient qu’il serait discriminé du fait de sa qualité de détenu, étant donné qu’en raison de la détention il ne serait pas disponible pour le marché du travail et perdrait le droit à l’indemnité d’attente. 

Le Conseil supérieur retient qu’au regard de l’article 14 de la Convention, la qualité de détenu constitue un aspect de la situation personnelle d’une personne. 

Les personnes incapables d’exercer leur dernier emploi, mais ayant fait l’objet d’une décision de reclassement sont dans une situation analogue. 

Cependant, la personne détenue n’est pas disponible pour le marché de l’emploi à la différence d’une personne libre. 

L’exigence d’une disponibilité pour l’emploi est la même pour les personnes libres que pour les personnes détenues. Cependant, le détenu ne pouvant pas remplir cette condition, il est traité de manière différente, en conséquence de sa situation de détenu. 

Il convient dès lors d’examiner si le traitement différent, qui n’est pas prévu par la disposition légale, applicable à toute personne, mais qui tient à la situation de fait du détenu, est justifié par un but légitime et est proportionné. 

L’indemnité d’attente est destinée à conférer un revenu à une personne qui, pour des raisons médicales, n’est plus en mesure d’exercer son dernier emploi, peut exercer un autre emploi auprès d’un autre employeur, mais qui n’a pas retrouvé de nouvel emploi. Le droit à une indemnité cesse au moment où la personne retrouve un emploi. 

L’exigence que le bénéficiaire d’une indemnité d’attente soit disponible pour le marché de l’emploi répond à un but légitime: le revenu est accordé à une personne qui a perdu sa rémunération en raison de son état de santé, qui est disposée à travailler mais n’a pas trouvé de nouvel emploi. 

L’impossibilité d’exercer une activité professionnelle à l’extérieur du lieu de détention et, dès lors, l’indisponibilité pour le marché du travail, constitue une conséquence nécessaire d’une détention. Dès lors, la perte du droit à l’indemnité d’attente du fait de l’indisponibilité du détenu pour le marché du travail est justifiée et ne constitue pas une mesure disproportionnée. 

Le moyen tendant à voir déclarer l’article L.551-5, paragraphe 2, du code du travail non conforme à l’article 1 du protocole et à l’article 14 de la Convention n’est pas fondé. 

7. La question préjudicielle à la Cour constitutionnelle

A n’a pas soumis une question préjudicielle à poser à la Cour constitutionnelle et ne conclut pas au renvoi devant la Cour. 

Comme la conformité à la Constitution est discutée, le Conseil supérieur retient qu’il estime qu’une question préjudicielle à la Cour constitutionnelle relative à un traitement discriminatoire de la personne détenue par rapport à la personne libre du fait de l’exigence d’une disponibilité pour le marché du travail et à la conformité de l’article L.551-5, paragraphe 2, du code du travail avec l’article 10 bis de la Constitution, relatif au principe d’égalité, est dénuée de tout fondement. 

En effet, d’une part, l’article L.551-5, paragraphe 2, du code du travail lui-même, en exigeant une disponibilité pour le marché du travail, ne traite pas de manière différente la personne à capacité de travail réduite libre et la personne détenue, et, d’autre part, les personnes détenues et les personnes libres ne relèvent pas de catégories de personnes comparables.

 Il n’y donc pas lieu de saisir la Cour constitutionnelle, après avoir au préalable permis aux parties de prendre position par rapport à la question soulevée d’office. 

8. La demande en réformation

Le Conseil supérieur interprète la décision du comité directeur de la CNAP du 21 février 2013 en ce sens qu’en application de l’article L.551-5, paragraphe 2, alinéas 3 et 4, du code du travail, et de l’article 193, alinéa 2, du code de la sécurité sociale, l’indemnité d’attente est retirée à partir du premier jour du mois suivant la notification de la décision, et qu’en application de l’article L. 551-5, paragraphe 2, alinéa 3, du code du travail et de l’article 211 du code de la sécurité sociale les indemnités d’attente payées mais non dues à partir du 26 septembre 2007 sont à rembourser. 

Le recours contre cette décision a été rejeté par le Conseil arbitral. 

Le Conseil supérieur constate que A était en détention préventive à partir du 12 septembre 2007, et que depuis l’expiration du délai de cassation ouvert contre l’arrêt du 16 février 2011, qui l’a condamné à la réclusion de quinze ans, il est détenu en exécution de cette peine. 

Dès lors, A n’est pas disponible pour le marché du travail et ne remplit pas l’une des conditions d’allocation d’une indemnité d’attente. 

La décision de retrait de l’indemnité d’attente et la demande de remboursement des indemnités perçues qui n’étaient pas dues sont justifiées en application de l’article L.551-5, paragraphe 2, du code du travail. 

Il est dès lors sans intérêt pour la solution du litige d’examiner si elles le sont ou non au regard de l’article 210 du code de la sécurité sociale. 

L’appel contre le jugement confirmatif de la décision du comité directeur n’est donc pas fondé.

 

Par ces motifs,

 

le Conseil supérieur de la sécurité sociale, 

statuant contradictoirement, sur le rapport oral de son président, 

déclare l’appel recevable, 

se dit incompétent pour constater que l’article 210 du code de la sécurité sociale n’est pas conforme à la Constitution, 

rejette l’appel.  

La lecture du présent arrêt a été faite à l’audience publique du 12 février 2015 par Monsieur le Président Etienne Schmit, en présence de Monsieur Francesco Spagnolo, secrétaire. 

 

Le Président,                                                      Le Secrétaire,

signé: Schmit                                                     signé: Spagnolo

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