Jugement du tribunal administratif Nr 34041 du rôle - recours contre le PAG de Mamer

Vu la requête inscrite sous le numéro 34041 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 14 février 2014 par Maître Faruk Durusu, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’association sans but lucratif ..., établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg, sous le numéro F …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’ : 

1)                 une décision du ministre de l'Intérieur et à la Grande Région du 22 octobre 2013 approuvant la délibération du conseil communal de Mamer du 4 mars 2013 portant adoption des projets d’aménagement particulier « quartier existant » de la commune de Mamer ;

2)                 une décision du ministre de l'Intérieur et à la Grande Région du 22 octobre 2013 portant approbation de la décision du conseil communal de Mamer du 4 mars 2013 portant adoption définitive du plan d'aménagement général de la commune de Mamer ;

3)                 un arrêté du ministre délégué au Développement durable et aux Infrastructures du 8 novembre 2013, « approuvant le PAG tel qu’il a été approuvé définitivement par le Conseil Communal de Mamer le 4 mars 2013 » ; 

Vu l’exploit de l’huissier de justice Frank Schaal, demeurant à Luxembourg, du 13 mars 2014, portant signification de ce recours à l’administration communale de Mamer, établie à L-8252 Mamer, Place de l’Indépendance, représentée par le collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions ; 

Vu la constitution d’avocat déposée au greffe du tribunal administratif le 18 mars 2014 par Maître Anne Ferry, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, pour le compte de l’Administration communale de Mamer ; 

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 13 juin 2014 par Maître Anne Ferry pour le compte de l’Administration communale de Mamer, lequel mémoire a été notifié en date du même jour au mandataire du ...; 

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 14 juillet 2014 par Maître Faruk Durusu pour compte du ..., ledit mémoire ayant été signifié en date du même jour au mandataire de l’administration communale de Mamer ; 

Vu le courrier télécopié transmis en date du 20 août 2014 au greffe du tribunal administratif par le délégué du gouvernement informant le tribunal que la partie étatique n’entendait pas « dupliquer dans le présent dossier » ; 

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 13 octobre 2014 par Maître Anne Ferry pour le compte de l’Administration communale de Mamer, ledit mémoire ayant été notifié en date du même jour au mandataire du ... ; 

Vu les pièces versées en cause ainsi que les décisions critiquées ; 

            Entendu le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Ibtihal El Bouyousfi, en remplacement de Maître Faruk Durusu et Maître Anne Ferry, assistée de Maître Charles Hurt, en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 17 novembre 2014 ; 

            Entendu le juge rapporteur en son rapport complémentaire, ainsi que Maître Serbest Serkan, en remplacement de Maître Faruk Durusu et Maître Anne Ferry, assistée de Maître Charles Hurt, en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 24 novembre 2014, à laquelle l’affaire avait été refixée pour continuation des débats.  

Lors de sa séance publique du 24 septembre 2012, le conseil communal de Mamer, désigné ci-après par le « conseil communal », émit à l’unanimité un vote positif au sujet d’un nouveau plan d'aménagement général pour la commune de Mamer et mandata le collège des bourgmestre et échevins de procéder aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, désignée ci-après par « la loi du 19 juillet 2004 ». 

L’association sans but lucratif ..., désignée ci-après par «...», propriétaire de la parcelle sur laquelle elle a établi son siège social, située à L-...et inscrite au registre cadastral, section A de Mamer-Nord, au lieu-dit route d’Arlon, sous le numéro ..., introduisit une réclamation auprès du collège des bourgmestre et échevins de Mamer contre la décision précitée du conseil communal du 24 septembre 2012. 

En vue de l’aplanissement des difficultés le collège échevinal de Mamer entendit lors de plusieurs réunions organisées entre le 2 et le 19 janvier 2013 les différentes personnes ayant introduit une réclamation contre la décision précitée du 24 septembre 2012, dont notamment...en date du 14 janvier 2013. 

Lors de sa séance publique du 4 mars 2013, le conseil communal de la Ville de Mamer décida avec sept contre trois voix d’approuver : 

« • la partie graphique du plan d'aménagement général, modifiée suivant l’avis de la commission d’aménagement, l’avis du Ministre délégué du Développement durable et des infrastructures ainsi que sur base des réclamations, matérialisée par les plans « Plan d'aménagement général-vote du conseil communal le 4 mars 2013-échelle 1 :10000-14 septembre 2012-toute la commune-PAG PROJET 26022013.DWG-01.03.2013-AO », « Plan d'aménagement général- vote du conseil communal le 4 mars 2013-échelle 1 :2500-14 septembre 2012-Mamer », « Plan d'aménagement général-vote du conseil communal le 4 mars 2013-échelle 1 :2500-14 septembre 2012-Capellen » et « Plan d'aménagement général-vote du conseil communal le 4 mars 2013-échelle 1 :2500-14 septembre 2012-Holzem », élaborée par la Bureau d’Etudes en Aménagement du Territoire et Urbanisme ...; 

• de la partie écrite du plan d'aménagement général, modifiée suivant l’avis de la commission d’aménagement, les avis du Ministre délégué du Développement durable et des infrastructures ainsi que sur base des réclamations, matérialisée par 18 pages, numérotées de 3 à 20 avec date 14 septembre 2012 ». 

Par courrier du 25 mars 2013,...introduisit une réclamation auprès du ministre de l’Intérieur et à la Grande Région, désigné ci-après par « le ministre » contre la décision précitée du conseil communal de Mamer du 4 mars 2013, portant approbation du plan d’aménagement général. 

Par décision du 22 octobre 2013, notifiée par courrier recommandé, envoyé le 30 octobre 2013, au mandataire du ..., le ministre approuva la délibération du conseil communal de Mamer du 4 mars 2013 portant adoption du plan d’aménagement général et déclara recevable mais non fondée, notamment la réclamation introduite par le .... Ladite décision ministérielle est libellée comme suit : 

« (…) Art. 1er La délibération du 4 mars 2013 du conseil communal de Mamer portant adoption définitive du projet d'aménagement général de la commune de Mamer, parties graphique et écrite, est approuvée ; 

Art. 2. Les réclamations émanant …, de Monsieur …, de Madame …, de Monsieur …, de Mesdames … et …, de Madame …, de Madame …, de Monsieur et Madame …, de la société …, …, de Monsieur …, de Monsieur …, de Madame …, de Madame …, de l'association …, de Monsieur …, de la société …, de la société …, de Monsieur…, de Monsieur …, des consorts … et …, de Madame …, de Monsieur …, de Madame …, de Monsieur …, de Monsieur …, ainsi que de l'asbl … sont recevables en la pure forme mais non-fondées ; 

Art. 3. La réclamation émanant de l'Administration des Bâtiments publics est irrecevable ; 

Art. 4. Les réclamations émanant de Monsieur …, de Madame …, Monsieur … et Monsieur … ainsi que de Monsieur … adressées à Monsieur le Ministre courant novembre 2012 respectivement juin 2013 sont irrecevables ; 

Art.4. Le présent arrêté sort ses effets sans préjudice d'autres dispositions légales et réglementaires ; (…) ». 

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 14 février 2014,...fit introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du ministre du 22 octobre 2013 approuvant la délibération du conseil communal de Mamer du 4 mars 2013 portant adoption des projets d’aménagement particulier « quartier existant » de la commune de Mamer, de la décision précitée du ministre du 22 octobre 2013 portant approbation de la décision du conseil communal de Mamer du 4 mars 2013 portant adoption définitive du plan d'aménagement général de la commune de Mamer et, enfin, d’un arrêté du ministre délégué au Développement durable et aux Infrastructures du 8 novembre 2013, « approuvant le PAG tel qu’il a été approuvé définitivement par le Conseil Communal de Mamer le 4 mars 2013 » ; 

A l’audience publique des plaidoiries le litismandataire du ...a déclaré retirer le recours contentieux dans l’unique mesure où il a été introduit contre la décision du ministre du 22 octobre 2013 approuvant la délibération du conseil communal de Mamer du 4 mars 2013 portant adoption des projets d’aménagement particulier « quartier existant » de la commune de Mamer. Il échet partant de donner acte au ...de la renonciation à son recours introduit contre la décision du ministre du 22 octobre 2013 approuvant la délibération du conseil communal de Mamer du 4 mars 2013 portant adoption des projets d’aménagement particulier « quartier existant » de la commune de Mamer.

 

Quant à la loi applicable 

A titre liminaire le tribunal est amené à préciser que la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, désignée ci-après par « la loi du 19 juillet 2004 », a été modifiée par une loi du 28 juillet 2011 entrée en vigueur, en application de son article 45 en date du 1er août 2011. Selon les dispositions transitoires figurant à l’article 108ter la loi du 19 juillet 2004, telle que modifiée par la loi du 28 juillet 2011, « (1) La procédure d’adoption des projets d’aménagement général, dont la refonte complète a été entamée par la saisine de la commission d’aménagement avant le 1er août 2011, peut être continuée et achevée conformément aux dispositions du Titre 3 de la présente loi qui était en vigueur avant le 1er août 2011. ». En l’espèce, il est constant que les décisions déférées ont trait à l’approbation de la refonte du plan d'aménagement général de Mamer. Il est encore constant en cause que le conseil communal a émis son vote positif au sens de l’article 10 de la loi du 19 juillet 2004 en date du 24 septembre 2012, de sorte que la saisine de la commission d’aménagement en application de l’article 11 de la même loi s’est a fortiori opérée après la date butoir du 1er août 2011, fixée par l’article 108ter de la loi du 19 juillet 2004. Il ressort d’ailleurs sans équivoque d’un accusé de réception signé par un agent du ministère de l’Intérieur et à la Grande Région et versé en cause sur demande du tribunal à l’audience publique des plaidoiries, que la commission d’aménagement a été saisie par l’administration communale de Mamer du projet de plan d'aménagement général en date du 2 octobre 2012. Il s’ensuit que la procédure d’adoption de la refonte du plan d'aménagement général de Mamer tombe sous l’application de la loi du 19 juillet 2004 dans sa version telle que modifiée par la loi du 28 juillet 2011.

 

Quant à la compétence du tribunal et à la recevabilité du recours 

Les décisions sur les projets d’aménagement, lesquelles ont pour effet de régler par des dispositions générales et permanentes l’aménagement des terrains qu’ils concernent et le régime des constructions à y ériger, ont un caractère réglementaire. La décision d’approbation du ministre, intervenue après réclamation de particuliers, comme c’est le cas en l’espèce, participe au caractère réglementaire de l’acte approuvé, étant entendu que le caractère réglementaire ainsi retenu s’étend également au volet de la décision litigieuse ayant statué sur la réclamation introduite par le demandeur, intervenue dans le processus général de l’élaboration l’acte approuvé. 

Conformément à l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, ci-après désignée par « la loi du 7 novembre 1996 », seul un recours en annulation est susceptible d’être introduit contre un acte administratif à caractère réglementaire. Le tribunal n’est partant pas compétent pour connaître du recours en réformation introduit à titre principal par le par le .... 

A l’audience publique, le tribunal a soulevé la question de la recevabilité dudit recours et plus particulièrement de la qualité du ..., en tant qu’association, à agir contre un acte réglementaire, au vu de l’article 7, paragraphe (2) de la loi du 7 novembre 1996, qui dispose que : « Ce recours n’est ouvert qu’aux personnes justifiant d’une lésion ou d’un intérêt personnel, direct, actuel et certain. 

Par dérogation à l’alinéa qui précède, le recours est encore ouvert aux associations d’importance nationale, dotées de la personnalité morale et agréées au titre d’une loi spéciale à exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les faits constituant une infraction au sens de cette loi spéciale. 

Le recours visé ci-avant n’est ouvert dans le chef des associations que pour autant que l’acte administratif à caractère réglementaire attaqué tire sa base légale de la loi spéciale dans le cadre de laquelle l’association requérante a été agréée ». 

A l’audience publique du 24 novembre 2014, à laquelle l’affaire avait été refixée pour continuation des débats, le litismandataire de l’association demanderesse a affirmé que...disposait d’un intérêt personnel, direct, actuel et certain à agir en l’espèce, étant donné qu’il serait lui-même propriétaire de la parcelle litigieuse affectée  par la plan d'aménagement général et qu’il agirait partant pour défendre ses propres intérêts et non point l’intérêt général, de sorte qu’il disposerait de la qualité à agir et tomberait sous l’application de l’alinéa 1er de l’article 7, paragraphe (2), précité, de la loi du 7 novembre 1996. 

L’administration communale de Mamer s’est rapportée à prudence de justice en ce qui concerne la question soulevée d’office par le tribunal. 

Force est au tribunal de constater que l’intérêt allégué par le ..., qui se soucie, en tant que propriétaire de la parcelle située à L-...et inscrite au registre cadastral, section A de Mamer-Nord, au lieu-dit, route d’Arlon, sous le numéro ..., de l’éventuel impact du plan d'aménagement général litigieux sur le classement de ladite parcelle est suffisamment personnel, direct, actuel et certain au sens de l’alinéa 1er de l’article 7, paragraphe (2), précité, de la loi du 7 novembre 1996, pour l'habiliter à agir à l'encontre du plan d'aménagement général litigieux[1]. Etant donné qu’elle agit en vue de la défense de son intérêt personnel et non dans le cadre de la défense de l’intérêt général de l’association, il n’y a pas lieu d’avoir égard à la restriction visée à l’article 7, paragraphe (2) dernier alinéa de la loi du 7 novembre 1996. 

L’administration communale de Mamer soulève encore l’irrecevabilité du recours subsidiaire en annulation à différents titres. 

Dans ce contexte, le tribunal est à titre liminaire amené à constater qu’il n’y a plus lieu de statuer sur les moyens d’irrecevabilité soulevés à l’encontre de la décision du ministre du 22 octobre 2013 approuvant la délibération du conseil communal de Mamer du 4 mars 2013 portant adoption des projets d’aménagement particulier « quartier existant » de la commune de Mamer, étant donné que la partie demanderessse a renoncé au recours contentieux introduit contre ladite décision. 

Le tribunal n’étant pas tenu par l’ordre dans lequel les parties ont présenté les moyens, mais pouvant les traiter dans un ordre différent dans le souci d’une bonne administration de la justice et compte tenu de la logique juridique dans laquelle ils s’insèrent, il y a d’abord lieu d’analyser le moyen d’irrecevabilité soulevé par l’administration communale de Mamer pour cause de tardivité du recours en annulation introduit contre la décision du ministre du 22 octobre 2013 portant approbation de la décision du conseil communal de Mamer du 4 mars 2013 portant adoption définitive du plan d'aménagement général de la commune de Mamer. Cette dernière affirme dans ce contexte que le ministre aurait notifié ladite décision par courrier recommandé avec accusé de réception du 30 octobre 2013 au ..., lequel aurait reçu ledit courrier le 4 novembre 2013, de sorte que la requête déposée au greffe du tribunal administratif le 14 février 2014 seulement aurait été introduit au-delà du délai légal des trois mois à compter de la notification de la décision. 

Le ...conteste avoir reçu de la part du ministre une notification de la décision ministérielle précitée du 22 octobre 2013. Il se dit d’ailleurs surpris de cette notification et conteste formellement que la signature apposée sur le formulaire de l’avis de réception appartient à un de ses membres. Il explique que ladite décision ministérielle lui aurait été notifiée, ensemble avec deux autres décisions, par un courrier recommandé de la commune de Mamer du 14 novembre 2013. D’ailleurs à cette occasion, l’administration communale de Mamer lui aurait transmis l’original du courrier de notification du ministre du 30 octobre 2013, de sorte que le courrier prétendument envoyé par le ministre le 30 octobre 2013 n’aurait pas pu contenir d’original. De plus, il soutient que « les signatures apposées sur les deux courriers, bien que semblables ne sont pas identiques ». Enfin,...s’interroge sur la question de savoir pour quelle raison un avis de réception qui aurait dû être en la possession de son expéditeur, en l’occurrence le ministre, n’aurait pas été communiqué en cause par le délégué du gouvernement mais par l’administration communale de Mamer....conclut que l’avis de réception du courrier du 30 octobre 2013 versé en cause par l’administration communale de Mamer ne pourrait pas être accepté comme preuve de la notification de la décision ministérielle du 22 octobre 2013 et que partant la date du 4 novembre 2013 ne pourrait pas être retenue comme point de départ du délai pour introduire un recours contentieux contre ladite décision ministérielle. 

Dans le cadre de son mémoire en duplique, l’administration communale de Mamer conteste avoir transmis à la partie demanderesse l’original du courrier du ministre du 30 octobre 2013 et affirme lui avoir fait parvenir une copie dudit courrier ainsi que des décisions ministérielles du 22 octobre 2013. Le fait que lesdites décisions seraient revêtues du visa du commissaire du district montrerait bien qu’il s’agirait de copies et non point d’originaux. 

L’administration communale de Mamer fait valoir que les déclarations de la partie demanderesse ne seraient pas pertinentes et explique qu’il ressortirait sans équivoque de l’accusé de réception versé en cause que le courrier du ministre du 30 octobre 2013 aurait été réceptionné par la partie demanderesse le 4 novembre 2013. Sauf à soutenir que le facteur aurait commis un faux, la preuve de la notification serait ainsi établie et le délai de recours pour agir contre la décision du ministre du 22 octobre 2013 aurait par conséquent commencé à courir le 4 novembre 2013. 

Aux termes de l’article 13 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, désignée ci-après par  « la loi du 21 juin 1999 » : 

« (1) Sauf dans les cas où la loi ou les règlements fixent un délai plus long ou plus court et sans préjudice des dispositions de la loi du 22 décembre 1986 relative au relevé de la déchéance résultant de l’expiration d’un délai imparti pour agir en justice, le recours au tribunal n’est plus recevable après trois mois du jour où la décision a été notifiée au requérant ou du jour où le requérant a pu en prendre connaissance. 

(2) Toutefois si la partie intéressée a adressé un recours gracieux à l’autorité compétente avant l’expiration du délai de recours fixé par la disposition qui précède ou d’autres dispositions législatives ou réglementaires, le délai du recours contentieux est suspensif et un nouveau délai commence à courir à partir de la notification de la nouvelle décision qui intervient à la suite de ce recours gracieux. 

(3) Si un délai de plus de trois mois s’est écoulé depuis la présentation du recours gracieux sans qu’une nouvelle décision ne soit intervenue, le délai du recours contentieux commence à courir à partir de l’expiration du troisième mois.  » 

Conformément aux dispositions de l’article 13 précité, les délais de recours à l’encontre de la décision déférée du 22 octobre 2013 ont partant expiré après trois mois à compter de la notification de la décision déférée à la partie demanderesse. 

Les parties en cause sont en désaccord sur la question de la date exacte de la notification de la décision ministérielle du 22 octobre 2013 au .... 

La charge de la preuve de la notification, tout comme celle de la date de la réception de la décision en question par le destinataire incombe à l’administration dont elle émane[2]. En l’espèce, l’administration communale de Mamer verse en cause un accusé de réception, attaché au courrier du ministre du 30 octobre 2013 par lequel ce dernier a informé...de sa décision du 22 octobre 2013, établi par l’entreprise des Postes et Télécommunications du Grand-Duché de Luxembourg, duquel il ressort que le ministre a transmis en date du 30 octobre 2013 un courrier au ...et que ledit courrier a été remis au destinataire en date du 4 novembre 2013. 

Par analogie à la procédure de notification des jugements du tribunal administratif par le greffe qui se fait selon l’article 34 de la loi du 21 juin 1999 moyennant la remise d’un pli fermé et recommandé à la poste, accompagné d’un avis de réception, le tribunal est amené à admettre en ce qui concerne la notification de décisions administratives par la voie d’un courrier recommandé avec accusé de réception que l’agent des postes fait mention sur l’avis de réception de l’acceptation par le destinataire de la lettre recommandée et que dans ce cas, la notification est réputée faite le jour de la remise de la lettre recommandée au destinataire. 

Au vu de l’accusé de réception précité, versé en cause par la commune de Mamer, force est dès lors au tribunal de constater en l’espèce que l’administration communale de Mamer a rapporté à suffisance de droit la preuve de la notification, ainsi que de la remise le 4 novembre 2013 de la décision du ministre du 22 octobre 2013 au .... En effet, les simples affirmations et contestations verbales du ..., selon lesquelles la signature apposée sur ledit accusé de réception n’appartiendrait à aucun de ses membres, ne sont, à défaut de tout élément concret et tangible et notamment en l’absence de toute demande en inscription de faux au sens de l’article 19 de la loi du 21 juin 1999, pas suffisantes pour renverser la présomption de notification et de remise au destinataire, en l’occurrence au ..., en date du 4 novembre 2013, de la lettre du 30 octobre 2013 portant information au ...de la décision du ministre du 22 octobre 2013. 

Dès lors,...étant présumé avoir eu connaissance au plus tard le 4 novembre 2013 de la décision du ministre du 22 octobre 2013 portant approbation de la décision du conseil communal de Mamer du 4 mars 2013 ayant approuvé définitivement le plan d'aménagement général, le recours contentieux du ...contre la prédite décision ministérielle, déposé au greffe du tribunal administratif le 14 février 2014 a été déposé au-delà du délai de trois mois à compter de la notification ou de la prise de connaissance de l’acte par le requérant, tel que prévu par l’article 13 de la loi du 21 juin 1999. Il s’ensuit que le recours en annulation introduit contre la prédite décision ministérielle du 22 octobre 2013 est irrecevable pour avoir été introduit de manière tardive. 

L’administration communale de Mamer soulève par la suite l’irrecevabilité du troisième volet du recours sous examen, tendant à l’annulation de la décision du ministre délégué au Développement durable et aux Infrastructures du 8 novembre 2013, « approuvant le PAG tel qu’il a été approuvé définitivement par le Conseil Communal de Mamer le 4 mars 2013 », en invoquant que ce volet du recours serait libellé de manière obscure, étant donné qu’aucun moyen ne serait développé à son appui et que, par ailleurs,...ne disposerait d’aucun intérêt à agir contre la prédite décision ministérielle. 

Le ...conteste les moyens d’irrecevabilité ainsi soulevés par l’administration communale de Mamer et conclut à leur rejet. 

Quant au moyen ayant trait au libellé obscur du volet de la requête introductive d’instance tendant à l’annulation de la décision du ministre délégué au Développement durable et aux Infrastructures du 8 novembre 2013, il échet de rappeler qu’aux termes de l’article 1er de la loi précitée du 21 juin 1999 : « La requête, qui porte date, contient :

-          les noms, prénoms et domicile du requérant,

-          la désignation de la décision contre laquelle le recours est dirigé,

-          l’exposé sommaire des faits et des moyens invoqués,

-          l’objet de la demande, et

-          le relevé des pièces dont le requérant entend se servir ». 

Si en règle générale, l’exception de libellé obscur admise se résout par l’irrecevabilité de la requête introductive d’instance ne répondant pas aux exigences fixées par l’article 1er de la loi précitée du 21 juin 1999, il convient encore de prendre en considération l’article 29 de la même loi, aux termes duquel : «  L’inobservation des règles de procédure n’entraîne l’irrecevabilité de la demande que si elle a pour effet de porter effectivement atteinte aux droits de la défense ». 

En l’espèce, force est au tribunal de constater, indépendamment du contenu des moyens invoqués par...à l’appui du prédit volet du recours, que la requête introductive d’instance indique tant les coordonnées de la partie demanderesse que la désignation de la décision ministérielle attaquée, un exposé des faits et moyens invoqués ainsi qu’enfin, l’objet de la demande, à savoir l’annulation de ladite décision ministérielle. S’y ajoute que l’administration communale de Mamer a pu utilement préparer la défense de ses intérêts à travers un mémoire en réponse et un mémoire en duplique, sans se tromper sur la décision attaquée. Dès lors, le tribunal ne saurait constater en l’espèce une quelconque atteinte aux droits de la défense, au sens de l’article 29 de la loi du 21 juin 1999, de sorte que le volet précité du recours n’encourt pas l’irrecevabilité pour libellé obscur. 

L’administration communale de Mamer soulève encore l’irrecevabilité du troisième volet du recours sous examen, tendant à l’annulation de la décision du ministre délégué au Développement durable et aux Infrastructures du 8 novembre 2013, « approuvant le PAG tel qu’il a été approuvé définitivement par le Conseil Communal de Mamer le 4 mars 2013 », au motif que...ne justifierait pas d’un intérêt à agir contre le prédit volet du recours, étant donné que la parcelle lui appartenant n’aurait jamais fait l’objet d’une modification de classement dans le cadre du plan d'aménagement général et qu’elle ne serait pas non plus affectée par une quelconque modification de la délimitation de la zone verte au sens de l’article 5 de la loi modifiée du 19 janvier 2004 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles. 

Force est à cet égard au tribunal de constater que l’intérêt à agir se mesure aux prétentions du demandeur, abstraction fait de leur caractère justifié au fond. 

En l’espèce, tel que le tribunal vient de relever, l’intérêt allégué par le ..., qui se soucie, en tant que propriétaire de la parcelle située à L-...et inscrite au registre cadastral, section A de Mamer-Nord, au lieu-dit route d’Arlon, sous le numéro ..., de l’éventuel impact du plan d'aménagement général litigieux sur le classement de ladite parcelle est suffisamment personnel, direct, actuel et certain au sens de l’alinéa 1er de l’article 7, paragraphe (2), précité, de la loi du 7 novembre 1996, pour l'habiliter à agir à l'encontre du plan d'aménagement général litigieux, étant entendu que le caractère justifié du bien-fondé des moyens invoqués à l’appui du prédit volet du recours n’est pas pertinent pour déterminer l’intérêt à agir de la partie demanderesse. Dès lors, le moyen d’irrecevabilité sous analyse n’est pas fondé. 

Enfin, l’administration communale de Mamer reproche au ...d’avoir attaqué trois actes administratifs dans le cadre d’une seule et même requête introductive d’instance, sans que son recours ne remplisse les conditions pour être introduit à travers d’une seule et même requête introductive d’instance. 

S’il est certes vrai qu’un demandeur attaquant plusieurs actes administratifs doit normalement former pour chaque acte un recours distinct, des considérations d’économie de procédure et de bonne administration de la justice ont conduit la jurisprudence administrative à admettre la possibilité d’un recours unique contre plusieurs décisions distinctes[3]. Ainsi, si dans une même requête le demandeur attaque des décisions différentes émanant de plusieurs autorités et prises dans le cadre de deux législations distinctes, la démarche du demandeur ne saurait être sérieusement critiquée lorsque ces décisions sont intimement liées entre elles, sauf le risque par lui couru, en cas d'imprécision de sa requête introductive d'instance, que des moyens soient écartés dans la mesure où il n'est pas clairement dégageable à l'encontre de quelle décision précise ils sont dirigés[4]

En l’espèce, il est certes vrai que les trois décisions attaquées émanent d’autorités administratives distinctes, à savoir du ministre de l’Intérieur et à la Grande Région et du ministre délégué au Développement durable et des Infrastructures et que les décisions attaquées ont été prises dans le cadre de deux législations différentes, à savoir la loi du 19 juillet 2004 ainsi que la loi précitée du 19 janvier 2004. Toutefois, les décisions attaquées s’inscrivent toutes les trois dans le contexte de l’adoption d’un nouveau plan d'aménagement général de la commune de Mamer de sorte qu’elles sont à considérer comme intimement liées et la partie demanderesse invoque les mêmes moyens à l’appui des trois volets de son recours. Il s’ensuit qu’il ne saurait être reproché à la partie demanderesse d’avoir agi contre les trois décisions déférées à travers une seule et même requête introductive d’instance. Le moyen d’irrecevabilité afférent est partant à rejeter pour ne pas être fondé. 

Aucun autre moyen d’irrecevabilité n’ayant été soulevé, le recours est à déclarer recevable dans l’unique mesure où il tend à l’annulation de la décision précitée du ministre délégué au Développement durable et aux Infrastructures du 8 novembre 2013.

 

Quant au fond 

Quant aux faits,...développe à l’appui de son recours l’argument selon lequel il exercerait son activité depuis presque trente ans au Grand-Duché de Luxembourg et qu’il aurait installé ses locaux dans un immeuble sis sur la parcelle lui appartenant, située à L-...et inscrite au cadastre de la commune de Mamer section A de Mamer-Nord sous le numéro .... Ledit immeuble aurait été construit il y a plus de quatre-vingt ans audit endroit et aurait été exploité au cours des années en tant que café, maison d’habitation et station d’essence....ajoute qu’il aurait l’intention de construire un nouveau bâtiment sur son terrain, afin de pouvoir y accueillir dignement ses membres et ses visiteurs. Or, l’administration communale de Mamer, en procédant à la modification du plan d'aménagement général, aurait classé la parcelle lui appartenant en zone agricole. Il ressortirait ainsi de l’ancienne partie graphique du plan d'aménagement général que ladite parcelle se serait trouvée en zone d’habitation à faible densité et aurait donc été constructible. Ce classement en zone agricole serait d’autant plus déroutant, alors que les terrains voisins auraient été classés en zone d’habitation 2, sinon en zone mixte et urbaine....explique avoir introduit son recours contre les actes déférés afin de faire redresser cette modification du classement de sa parcelle en zone agricole. 

En droit,...invoque une violation de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des Communes, une violation de son droit de propriété tel que consacré notamment par l’article 16 de la Constitution, une violation des articles 2 à 6 de la loi modifiée du 19 juillet 2004, une violation du principe de l’égalité et du principe de liberté des cultes tels que consacrés par les articles 10 bis et 19 de la Constitution et, enfin, une violation des principes généraux de droit de la sécurité juridique de la confiance légitime, ainsi que de non-rétroactivité. 

L’administration communale de Mamer fait valoir que le postulat, de la partie demanderesse selon lequel son terrain aurait précédemment été classé en « zone d’habitation à faible densité » et selon lequel le plan d'aménagement général actuellement litigieux aurait reclassé ladite parcelle en zone agricole et non constructible, serait erroné. En effet, il ressortirait des parties graphiques des anciens plans d'aménagement général de la commune de Mamer, versées en cause, que la parcelle appartenant à la partie demanderesse aurait d’ores et déjà été classée en zone rurale, avant même l’adoption du plan d'aménagement général litigieux. Elle explique à cet égard que la notion de « zone rurale » aurait été remplacée par celle de « zone agricole », et que les deux notions auraient la même signification. 

La légalité externe des décisions administratives étant à analyser préalablement à leur bien-fondé, le tribunal est d’abord amené à statuer sur le moyen tiré d’une violation de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l'Etat et des Communes, au motif que la décision ministérielle déférée n’indiquerait pas à suffisance les motifs à sa base. 

Dans ce contexte, il échet d’abord de rappeler que la décision du ministre délégué au Développement durable et aux Infrastructures, prise sur base de la loi du 19 janvier 2004 et par laquelle il approuve ou refuse d’approuver une délibération d’un conseil communal modifiant la délimitation d’une zone verte participe au caractère normatif de cette délibération et s’analyse dès lors en un acte administratif à caractère règlementaire[5]. Or, conformément à l’article 4 de la loi du 1er décembre 1978 réglant la procédure administrative non contentieuse, ledit règlement grand-ducal ne s’applique qu’aux « décisions administratives individuelles » et non pas à des actes administratifs à caractère réglementaire, tel que celui examiné dans le cadre de la présente instance. Il s’ensuit qu’aucune violation de l’article 6 du règlement grand-ducal précité du 8 juin 1979, relatif aux exigences d’indication des motifs par les décisions administratives, ne saurait être invoquée en l’espèce. 

Au-delà de l'absence d'exigence légale ou réglementaire spécifique à l'indication formelle des motifs, les actes administratifs à caractère réglementaire doivent cependant reposer sur de justes motifs légaux devant avoir existé au moment où ils ont été respectivement pris, motifs dont le juge administratif est appelé à vérifier tant l'existence que la légalité. Ces motifs doivent être rétraçables, à la fois par la juridiction saisie et par les administrés intéressés, afin de permettre l'exercice effectif du contrôle juridictionnel de légalité prévu par la loi[6]

En l’espèce, la partie demanderesse reproche essentiellement au ministre délégué au Développement durable et aux Infrastructures de ne pas avoir indiqué les motifs gisant à la base du rejet de sa réclamation introduite auprès dudit ministre. 

En ce qui concerne la compétence du ministre délégué au Développement durable et aux Infrastructures pour statuer sur les réclamations introduites au niveau ministériel dans le cadre de la procédure d’adoption d’un plan d'aménagement général l’article 5 de la loi du 19 janvier 2004 dispose que : « Les réclamations acceptées par le ministre de l’Intérieur conformément à l’article 18 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain sont également soumises au ministre pour autant qu’elles visent la modification de la délimitation de la zone verte. ». Il suit de cette disposition que seules les réclamations d’ores et déjà acceptées par le ministre de l’Intérieur et à la Grande Région et, portant de surplus sur une modification de la délimitation de la zone verte, sont continués au ministre délégué au Développement durable et aux Infrastructures. 

En l’espèce, il y a toutefois lieu de constater qu’aucune réclamation lui adressée n’a été acceptée par le ministre de l’Intérieur et à la Grande Région, de sorte qu’aucune desdites réclamations n’a dû être continuée au ministre délégué au Développement durable et aux Infrastructures et que ce dernier n’était pas tenu de se prononcer quant aux réclamations, de sorte qu’aucune absence de l’indication des motifs à la base d’une décision portant rejet des réclamations ne saurait partant lui être reprochée. Le moyen afférent est donc à rejeter pour ne pas être fondé. 

En ce qui concerne les moyens de la partie demanderesse tendant à critiquer le reclassement de son terrain en zone agricole, voire à critiquer le fait que son terrain n’ait pas été intégré en « zone de bâtiments et d’équipements publics », il échet de prime abord de constater qu’il n’est pas contesté par les parties en cause et qu’il ressort d’ailleurs de la partie graphique du plan d'aménagement général, que la parcelle appartenant à la partie demanderesse se situe d’après le plan d'aménagement général litigieux en zone agricole.

Force est par ailleurs au tribunal de constater qu’il ressort des parties graphiques du plan d'aménagement général de la commune de Mamer aux dates de septembre 2012, novembre 2006 et juillet 1985 que la parcelle appartenant au ...étaient d’ores et déjà classée en zone agricole, voire en zone rurale, bien avant l’adoption du plan d'aménagement général litigieux. Il convient dans ce contexte d’ajouter que l’administration communale de Mamer explique à juste titre qu’en ce qui concerne la notion de zone rurale et la notion de zone agricole, seule la dénomination a été modifiée au cours des années, sans qu’il n’y ait cependant en substance des divergences entre la définition de la zone rurale et celle de la zone agricole. Il ressort ainsi de la partie écrite du plan d'aménagement général de la commune de Mamer de juillet 1985 que la zone rurale se définit comme zone comprenant « les parties du territoire de la commune qui se situent à l’extérieur du périmètre d’agglomération (…). 

Les seules constructions autorisées dans cette zone sont des constructions servant à l’exploitation agricole, jardinière, maraîchère, sylvicole, viticole, piscicole, apicole ou cynégétique, ou à un but d’utilité publique. Elles restent cependant soumises à l’autorisation du Ministre ayant dans ses attributions l’Administration des Eaux et Forêts. 

Pour les prescriptions dimensionnelles voir II.9. (P.Dim.) ». 

La zone agricole se définit à son tour d’après la partie écrite du plan d'aménagement général de de Mamer de septembre 2012 comme « parties du territoire de la commune situées en dehors des zones définies comme zones urbanisées ou destinées à être urbanisées ». L’article 15 de ladite version de la partie écrite du plan d'aménagement général prévoit que dans ces parties du territoire « seules peuvent être érigées des constructions servant à l’exploitation agricole, jardinière, maraîchère, sylvicole, viticole, piscicole, apicole ou cynégétique, ou à un but d’utilité publique, sans préjudice aux dispositions de la loi du 19 janvier 2004 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles. », tout en ajoutant des explications quant aux dimensions des exploitations visées audit article. 

Le ...conteste le fait que sa parcelle aurait été classée en zone agricole et insiste sur le fait que son terrains aurait été situé en « zone d’habitation de faible densité et donc constructible », en se basant sur un extrait de la partie graphique du plan d'aménagement général de Mamer, versé en cause et qui établirait le classement dudit terrain en secteur de faible densité. Force est toutefois au tribunal de constater que le document auquel...se réfère ne constitue qu’un extrait copié de la partie graphique du plan d'aménagement général de Mamer ainsi qu’un extrait de la légende y afférente, qu’il est dépourvu de toute indication quant à sa date d’établissement, qu’il ne porte ni le cachet, ni l’enseigne de la commune de Mamer, ni encore une quelconque indication relative à l’échelle de la partie graphique ou, enfin, relative au bureau d’études ayant établi ledit plan. Il s’ensuit que ladite pièce ne saurait être prise en considération par le tribunal, contrairement aux parties graphiques successives du plan d'aménagement général de la commune de Mamer, versées en cause par l’administration communale de Mamer, qui sont toutes clairement datées et qui portent le cachet, voire l’enseigne de la commune et, enfin toute autre indication normalement inscrite sur une partie graphique d’un plan d'aménagement général, telle que l’échelle ou encore le bureau d’étude ayant élaboré ledit plan. 

La prémisse sur base de laquelle la partie demanderesse a développé ses moyens et selon laquelle son terrain aurait subi une modification de son classement par le plan d'aménagement général actuellement litigieux, manque partant complètement en fait. En effet, le classement de la parcelle de la partie demanderesse n’a pas été modifié, ni même affecté, par le plan d'aménagement général sous examen. Il s’ensuit que les moyens invoqués en cause par la partie demanderesse sont à rejeter pour ne pas être pertinents. 

Au-delà des considérations qui précèdent, et pour autant que les moyens avancés par la partie demanderesse tendent à critiquer le fait que son terrain n’ait pas été classé en « zone de bâtiments et d’équipements publics », il y a encore lieu de constater qu’il ressort d’une lecture combinée des articles 2 et 18 de la loi du 19 juillet 2004, déterminant les compétences du ministre de l’Intérieur et à la Grande Région en matière d’adoption d’un plan d'aménagement général et des articles 1er et 5 de la loi du 19 janvier 2004 déterminant les compétences du ministre délégué au Développement durable et aux Infrastructures en matière d’adoption d’un plan d'aménagement général, que tant le ministre de l’Intérieur et à la Grande Région que le ministre délégué au Développement durable et aux Infrastructures sont appelés à intervenir dans le cadre de l’approbation d’un projet de plan d'aménagement général. Toutefois chaque autorité administrative statue dans le cadre de son propre champ de compétence se dégageant des dispositions légales respectives applicables lui conférant un pouvoir d’appréciation du plan d'aménagement général lui soumis, respectivement de la réclamation y relative lui soumise, sans pouvoir fonder sa décision sur des éléments repris par des dispositions légales par rapport auxquelles elle n’a pas vocation à statuer. En effet, les décisions prises tant par le ministre de l’Intérieur et à la Grande Région que par le ministre délégué au Développement durable et aux Infrastructures en matière d’approbation des projets de plan d'aménagement général, sont deux décisions administratives indépendantes, prises dans le cadre des champs de compétence respectifs des deux ministres. 

En ce qui concerne l’intervention du ministre délégué au Développement durable et aux Infrastructures dans le cadre de la procédure d’adoption d’un plan d'aménagement général, l’article 5 de la loi du 19 janvier 2004 dispose que : « Les réclamations acceptées par le ministre de l’Intérieur conformément à l’article 18 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain sont également soumises au ministre pour autant qu’elles visent la modification de la délimitation de la zone verte. 

Il statue dans les trois mois suivant la réception du dossier qui lui est communiqué par le ministre de l’Intérieur. ». L’article 1er de la loi du 19 janvier 2004 énonce ses objectifs comme suit : « La présente loi a pour objectifs la sauvegarde du caractère, de la diversité et de l'intégrité de l'environnement naturel, la protection et la restauration des paysages et des espaces naturels, la protection de la flore et de la faune et de leurs biotopes, le maintien et l'amélioration des équilibres et de la diversité biologiques, la protection des ressources naturelles contre toutes les dégradations et l'amélioration des structures de l'environnement naturel. ». L’article 56 de la même loi dispose que « Les autorisations requises en vertu de la présente loi sont refusées lorsque les projets du requérant sont de nature à porter préjudice à la beauté et au caractère du paysage ou s'ils constituent un danger pour la conservation du sol, du sous-sol, des eaux, de l'atmosphère, de la flore, de la faune ou du milieu naturel en général ou lorsqu'ils sont contraires à l'objectif général de la présente loi tel qu'il est défini à l'article 1er ». 

Le recours sous examen tend à l’annulation de la décision du ministre délégué au Développement durable et aux Infrastructures. Or, les moyens invoqués par la partie demanderesse à l’appui de son recours sont étrangers aux considérations de sauvegarde du caractère, de la diversité et de l'intégrité de l'environnement naturel, de la protection et de la restauration des paysages et des espaces naturels, de la protection de la flore et de la faune et de leurs biotopes, du maintien et de l'amélioration des équilibres et de la diversité biologiques, de la protection des ressources naturelles contre toutes les dégradations et l'amélioration des structures de l'environnement naturel, au sens de l’article 1er précité de la loi du 19 janvier 2004. En effet, les moyens avancés en cause par le ..., notamment le moyen relatif au respect du droit de propriété, le moyen relatif au respect des articles 2 à 6 de la loi du 19 juillet 2004, le moyen relatif au respect des articles 10 bis et 19 de la Constitution et enfin, le moyen relatif au respect des principes généraux de droit de la sécurité juridique de la confiance légitime, ainsi que de non-rétroactivité, sont dépourvus de toute considérations environnementale et tendent essentiellement à faire constater des illégalités au niveau de la décision du ministre de l’Intérieur et à la Grande Région. Lesdits moyens sortent partant de la sphère de compétence du ministre délégué au Développement durable et aux Infrastructures, de sorte qu’ils sont également à cet égard dépourvus de toute pertinence en l’espèce et partant intégralement à rejeter. 

Au vu de l’issue du litige, il y a lieu de rejeter la demande en allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 3.000 euros formulée par le .... 

Par ces motifs, 

            le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ; 

donne acte à l’association sans but lucratif ... de sa renonciation à son recours en réformation, sinon en annulation introduit contre la décision du ministre de l’Intérieur et à la Grande Région du 22 octobre 2013 approuvant la délibération du conseil communal de Mamer du 4 mars 2013 portant adoption des projets d’aménagement particulier « quartier existant » de la commune de Mamer ; 

se déclare incompétent pour connaître du recours principal en réformation ; 

déclare irrecevable le recours subsidiaire en annulation introduit contre la décision du ministre de l’Intérieur et à la Grande Région du 22 octobre 2013 portant approbation de la décision du conseil communal de Mamer du 4 mars 2013 portant adoption définitive du plan d'aménagement général de la commune de Mamer ; 

déclare recevable le recours en annulation introduit contre la décision du ministre délégué au Développement durable et aux Infrastructures du 8 novembre 2013 « approuvant le PAG tel qu’il a été approuvé définitivement par le Conseil Communal de Mamer le 4 mars 2013 » ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ; 

rejette la demande tendant à l’allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 3.000 euros formulée par l’association sans but lucratif ... ; 

condamne l’association sans but lucratif ... aux frais ;

 

Ainsi jugé par : 

Françoise Eberhard,  vice-président,

Anne Gosset, premier juge,

Daniel Weber, juge,

 

et lu à l’audience publique du 8 décembre 2014 par le vice-président, en présence du greffier Arny Schmit.

 

 Arny Schmit                                                 Françoise Eberhard

 



[1] Voir dans le même sens : trib. adm. 14 mars 2005, n°18517 du rôle, Pas. adm. 2012, V° Procédure contentieuse, n° 54.

[2] trib. adm. 25 septembre 2000, n° 11835 du rôle, Pas.adm. 2012, V° Procédure contentieuse, n° 181 et autres références y citées.

[3] Rusen Ergec, Contentieux administratif luxembourgeois, Pas. adm. 2012, n° 158, p. 65

[4] Trib. adm. 15 décembre 2004, n° 18044 du rôle, Pas. adm. 2012, V° Procédure contentieuse, n°291 et autre référence y citée.

[5] cf. trib. adm. 11 mai 1998, n° 9932 du rôle, Pas. adm. 2012, V° Environnement, n° 2.

[6] Cour adm. 23 février 2006, n° 20173C du rôle, Pas. adm. 2012, V° Actes réglementaires, n° 24 et autres références y citées.

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