Arrêt dans l'affaire de l'accident mortel dans une maison relais communale

En date du 22 juin 2011 la dixième chambre de la Cour d'appel à Luxembourg, siégeant en matière correctionnelle, a rendu un arrêt dans une affaire d'homicide involontaire dans une maison relais à (…).

Arrêt N°327/11 X

du 22 juin 2011

not  19597/06/CD

La Cour d'appel du Grand-Duché de Luxembourg, dixième chambre, siégeant en matière correctionnelle, a rendu en son audience publique du vingt-deux juin deux mille onze l’arrêt qui suit dans la cause

e n t r e :

le ministère public, exerçant l'action publique pour la répression des crimes et délits, appelant

e t :

A, né le …;

prévenu et défendeur au civil, intimé

B, né le …;

prévenu et défendeur au civil, appelant

C, né le … ;

prévenu et défendeur au civil, appelant

D, née le … ;

prévenue et défenderesse au civil, appelante

E, né le … ;

prévenu et défendeur au civil, intimé

 

e n  p r é s e n c e  d e :

 

X, demeurant à L- …

demandeur au civil, appelant

 

Y, demeurant à L- … ,

demanderesse au civil, appelante

__________________________________________________________________

F A I T S :

Les faits et rétroactes de l'affaire résultent à suffisance de droit :

I.

d'un jugement rendu contradictoirement par une chambre correctionnelle du tribunal d'arrondissement de et à Luxembourg le 13 octobre 2010 sous le numéro 3310/2010, dont les considérants et le dispositif sont conçus comme suit :

Vu l’ordonnance de renvoi numéro 1460/09 rendue le 14 juillet 2009 par la Chambre du conseil du tribunal d’arrondissement de Luxembourg.

Vu l’arrêt numéro 964/09 du 21 décembre 2009 de la Chambre du conseil de la Cour d’appel confirmant l’ordonnance de renvoi numéro 1460/09.

Vu les arrêts numéros 23/2010 du 6 mai 2010 et 27/2010 du 15 juillet 2010 de la Cour de Cassation.

En application de l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, le tribunal rejette les notes de plaidoiries du Ministère Public et de Maître Fränk ROLLINGER versées en cours de délibéré, alors que ces notes n’ont pas fait l’objet d’un débat contradictoire.

Il y a également lieu de rejeter pour les mêmes motifs les deux fardes de pièces contenant en tout 18 pièces versées ensemble avec la note de Maître Fränk ROLLINGER le 12 octobre 2010 à 16.15 heures.

A l’audience publique du 11 octobre 2010, le mandataire de B, Maître Fränk ROLLINGER, avocat à la Cour, demeurant à Luxembourg, a déposé des « CONCLUSIONS IN LIMINE LITIS », aux termes desquelles, B conclut comme suit :

« donner acte à la partie B de ses présentes conclusions prises in limine litis,

les voir déclarer recevables et fondées,

donner acte à B de son introduction d’un recours relatif à la procédure antérieure dans le présent dossier auprès de la Cour Européenne des Droits de l’Homme à Strasbourg,

donner acte à B qu’il demande la disjonction des poursuites à son encontre dans la présente procédure,

donner acte à B qu’il demande à votre tribunal de surseoir à statuer pour permettre à la Cour Européenne des Droits de l’Homme de se prononcer sur le recours introduit par B,

subsidiairement, si votre tribunal décidait de ne pas procéder de la sorte, B demande acte qu’il maintient avant toute autre défense en cause expressément l’intégralité de ses divers moyens relatifs à la violation de la Convention Européenne développés plus amplement ci-dessus et au niveau de son recours strasbourgeois et qu’il se réserve tout droit généralement quelconque à cet égard, e.a. mais non exclusivement la reconnaissance par votre tribunal desdites violations et de prendre les conséquences juridiques découlant d’une pareille reconnaissance, e.a. mais non exclusivement l’annulation de toute la procédure antérieure. »

Il n’y a pas lieu de donner acte à B :

- de ses conclusions prises in limine litis ;

- de l’introduction d’un recours auprès de la Cour Européenne des Droits de l’Homme ;

- de la demande en disjonction des poursuites à son encontre dans la présente procédure ;

- et de sa demande en surséance à statuer pour permettre à la Cour Européenne des Droits de l’Homme de se prononcer sur son recours ;

de tels donnés actes étant sans intérêt dans la présente procédure.

Le tribunal n’a pas besoin de donner acte à une partie de droits ou d’actions dont elle dispose de toute façon.

Il ne saurait par ailleurs donner acte de l’introduction d’un recours, alors qu’il n’est pas établi lors de la prise en délibéré qu’un recours a été fait dans les formes légalement prescrites, alors qu’uniquement un envoi par télécopie du recours est versé .

Il y a cependant lieu de retenir qu’en demandant un donné acte de sa demande en disjonction, B a implicitement mais nécessairement conclu à la disjonction des poursuites à son égard et à la surséance à statuer en attendant la décision de la Cour Européenne des Droits de l’Homme.

Il résulte des pièces versées en cause que le jour de l’audience - 11 octobre 2010 -, à 7.30 heures, Maître Fränk ROLLINGER a transmis en télécopie, au nom de B, une requête à la Cour Européenne des Droits de l’Homme. Aux termes de cette requête, B demande à la Cour de constater les violations suivantes :

« - Double violation de l’article 6 § 1 par la Cour de Cassation, plus précisément du principe de l’égalité des armes, en mettant la partie requérante dans une situation de nette désavantage par rapport au Ministère Public, (…)

- Violation de l’article 6 § 1, plus précisément du principe de l’égalité des armes, en ce que le non-respect par le Ministère Public d’un délai fixé par le Code d’Instruction Criminelle reste sans conséquence juridique directe alors que les autres parties, en cas de non-respect d’un délai également fixé par le Code d’Instruction Criminelle subissent une conséquence juridique de ce fait, (…)

- Violation de l’article 6 § 1, plus précisément de l’égalité des armes, en ce que le Parquet a pu bénéficier d’un délai très largement supérieur à celui accordé au requérant pour présenter ses conclusions à la chambre du conseil, tout en ayant des facilités matérielles énormes par rapport au requérant, (…)

- Violation de l’article 6 § 3 b, en ce que le requérant n’a pas pu disposer du temps et des facilités nécessaires à la présentation de sa défense, (…) »

La demande de B, tendant à la disjonction des poursuites est à rejeter, alors que le tribunal est valablement saisi du renvoi de l’affaire dirigée tant contre lui que contre les autres prévenus et que tous les prévenus se trouvent régulièrement cités à l’audience.

Pour le surplus, une bonne administration de la justice dans un délai raisonnable ne saurait être assurée en procédant à des disjonctions arbitraires.

La demande de B tendant à voir ordonner la surséance à statuer en attendant l’issue de sa requête à la Cour Européenne des Droits de l’Homme n’est pas fondée. Une requête introduite devant la Cour européenne des droits de l'homme ne constitue pas une voie de recours contre une décision judiciaire interne puisqu'il n'entre pas dans les attributions de ladite Cour d'annuler, de rapporter ou de réformer cette décision. Une telle requête ne produit en droit interne aucun effet suspensif, la saisine des organes européens de contrôle ne saurait faire obstacle à l'exercice de l'action publique, ni obliger le juge qui en est saisi à en différer l'examen jusqu'à la conclusion de la procédure devant la Cour européenne (cf. Cass. Belge (2e ch. F.), 9 décembre 2009, R.G. n° P.09.1416.F., Larcier Cassation, 2010, n° 3, sommaire n° 241). Il n’y a dès lors pas lieu de surseoir à statuer.

B est à débouter de sa demande de donné acte au maintien de l’intégralité de ses divers moyens relatifs à la violation de la Convention Européenne. Les seuls griefs qu’il fait valoir concernent uniquement la procédure d’instruction. Or, le tribunal se trouve saisi d’une ordonnance de renvoi rendue par la Chambre du conseil du tribunal, confirmée par la Chambre du Conseil de la Cour.

Il y a lieu de rappeler à cet égard, qu’« il découle du principe que les juridictions d'instruction et de jugement sont indépendantes les unes des autres, que les juridictions de fond n'ont point qualité pour prononcer l'annulation des ordonnances ou arrêts de renvoi qu'elles estimeraient entachés de nullité.

Tant que l'ordonnance de renvoi n'a pas été infirmée par un arrêt de la chambre du conseil de la Cour d'appel, cette décision est opérante et saisit valablement la juridiction de renvoi. » (Cour, 8 juillet 1997, n° 258/97V).

Le moyen est dès lors à rejeter.

Il appartient néanmoins, en tout état de cause, au tribunal de vérifier si le prévenu a pu préparer utilement sa défense au fond. Or, B, qui disposait de tous les éléments pour préparer utilement sa défense, ne fait valoir aucun grief en ce qui concerne la procédure depuis l’ordonnance de renvoi.

Il y a dès lors lieu de rejeter également cette demande comme étant non fondée.

P a r   c e s   m o t i f s  :

le tribunal d'arrondissement de et à Luxembourg, seizième chambre, siégeant en matière correctionnelle, statuant contradictoirement à l’égard de A, B, C, D et E, les mandataires de B, D et E entendus en leurs moyens et la représentante du Ministère Public entendue en ses conclusions,

rejette les notes de plaidoiries du Ministère Public et de Maître Fränk ROLLINGER communiquées en cours de délibéré ;

rejette les deux fardes de pièces versées par Maître Fränk ROLLINGER après la prise en délibéré ;

dit qu’il n’y a pas lieu de donner acte ;

rejette comme non fondée la demande en disjonction de B ;

dit qu’il n’y a pas lieu de surseoir à statuer ;

rejette comme non fondée la demande subsidiaire de B ;

réserve les frais.

Ainsi fait et jugé par Marie-Laure MEYER, vice-présidente, Henri BECKER, premier juge, et Joëlle GEHLEN, juge, et prononcé par la vice-présidente en audience publique au Tribunal d’arrondissement à Luxembourg, en présence de Martine WODELET, substitut du procureur d’Etat et de Chantal REULAND, greffière, qui, à l'exception de la représentante du Ministère Public, ont signé le présent jugement.

 

II.

 

d'un jugement rendu contradictoirement par une chambre correctionnelle du tribunal d'arrondissement de et à Luxembourg le 18 novembre 2010 sous le numéro 3799/2010, dont les considérants et le dispositif sont conçus comme suit :

Vu la citation du 23 juillet 2010 régulièrement notifiée aux prévenus.

Vu l’ordonnance de renvoi numéro 1460/09 de la Chambre du Conseil du Tribunal d’arrondissement de Luxembourg du 14 juillet 2009, confirmée par arrêt numéro 964/09 du 21 décembre 2009 de la Chambre du Conseil de la Cour d’appel.

Vu les arrêts de la Cour de Cassation des 6 mai 2010 et 15 juillet 2010.

Vu l’information donnée par courrier du 5 octobre 2010 à la Caisse Nationale de Santé en application de l’article 453 du Code de la sécurité sociale.

Vu la réponse du 22 octobre 2010 de l’Association d’Assurance contre les Accidents à l’information lui donnée par le ministère Public en application de l’article 453 du Code de la sécurité sociale, qu’il n’interviendra pas dans le présent litige.

Au pénal :

Vu le procès-verbal de base numéro 3250/06 du 2 octobre 2006 de la Police Grand-Ducale, centre d’intervention principal de Mersch.

Vu les rapports numéros SPJ11/FAC-2006-1398.5. du 9 octobre 2006, SPJ11/FAC-2006-1398.16. du 10 novembre 2006, SPJ11/FAC-2007-1398.30 du 20 mars 2007,  SPJ11/JDA/2008-1398-35 du 7 janvier 2008, SPJ11/JDA/2008-1398-37 du 21 février 2008 et SPJ11/JDA/2008-1398-39 du 11 juin 2008 de la Police Grand-Ducale, Service de police judiciaire, section criminalité générale.

Vu le rapport numéro 43-108-2007-WEMA du 8 février 2007 de la Police Grand-Ducale, Service de police judiciaire, Police Technique.

Vu les quatre plaintes avec constitution de partie civile déposées les 13 octobre 2006, 28 mars 2007 et 8 mai 2007 par Maître Pierre METZLER au nom de X et de Y.

Le Ministère Public reproche à D, à B, à A, à C et à E, le 2 octobre 2006 vers 18.00 heures à (...) , 1, rue des Vergers, maison relais de l’école primaire « Sepp Hansen », comme auteurs, coauteurs respectivement comme complices, d’avoir involontairement causé la mort de VICTIME  né le (...)  à Luxembourg.

Le Ministère Public reproche aux prévenus D, B et A d’avoir commis cette infraction notamment par les comportements fautifs suivants :

- d’avoir, en tant que responsable, respectivement en tant qu’éducateurs travaillant quotidiennement dans les lieux, proposé la disposition de la salle et plus particulièrement l’installation d’un coin de jeux séparé du reste de la salle ;

- d’avoir toléré que les deux armoires furent posées, respectivement d’avoir posé les deux armoires en tant que séparation en plein milieu de la pièce;

- d’avoir toléré que les deux armoires furent posées, respectivement d’avoir posé les deux armoires, dans la salle sans être solidement fixées afin d’éviter qu’elles ne puissent tomber ;

- d’avoir laissé les deux armoires en tant que séparation alors qu’elles n’étaient pas solidement fixées ;

- d’avoir installé ou fait installer derrière les armoires des coussins sur lesquels les enfants se sont défoulés régulièrement en sautant de façon à pouvoir heurter les armoires ;

- d’avoir toléré que ces armoires furent posées et restent posées en plein milieu de la pièce ne permettant ainsi plus à l’éducateur d’avoir un regard direct sur les enfants jouant derrière ces armoires, et par la même d’avoir toléré que les enfants jouant derrière ces armoires échappent à la surveillance momentanée ou permanente des éducateurs ;

- d’avoir toléré que les enfants soient sans surveillance dans la salle des jeux, respectivement d’avoir laissé les enfants sans surveillance et en particulier comme en l’espèce le 2 octobre 2006 d’avoir quitté la salle de jeux pour accueillir les parents venant récupérer les enfants et d’avoir ainsi laissé les enfants sans surveillance et de la sorte de n’avoir pu constater qu’une des armoires allait tomber, voire de ne pas avoir pu intervenir pour éviter que cette armoire ne tombe et ne blesse mortellement un enfant.

Au prévenu C, le Ministère Public reproche d’avoir commis cette infraction notamment par les comportements fautifs suivants :

- d’avoir toléré, respectivement de ne pas s’être opposé que les deux armoires furent posées, respectivement d’avoir posé les deux armoires dans la salle de jeux sans être solidement fixées afin d’éviter qu’elles ne tombent ;

- de ne pas avoir contrôlé la disposition des lieux, la solidité et la fixation des matériaux avant le commencement de la maison relais ;

- de ne pas avoir fixé, respectivement de ne pas avoir fait fixer les armoires pour garantir la sécurité des enfants.

En ce qui concerne le prévenu E, le Ministère Public lui reproche d’avoir commis cette infraction notamment par les comportements fautifs suivants :

- d’avoir posé les deux armoires dans la salle de jeux en plein milieu de la pièce ;

- de ne pas avoir fixé les armoires solidement afin d’éviter qu’elles ne tombent.

 

Quant aux faits

Le 2 octobre 2006 peu avant 18.00 heures, dans la Maison Relais de l’Ecole Primaire « Sepp Hansen » à (...) , VICTIMEa été heurté et mortellement blessé par une armoire.

Il résulte des éléments du dossier qu’en raison d’une forte demande des habitants de la commune, l’Administration communale de (...)  a envisagé la création d’une maison relais à partir de l’année scolaire 2006-2007. Son installation a été prévue dans les locaux de l’Ecole primaire « Sepp Hansen ». Déjà avant ce projet, l’Administration communale de (...)  avait mis à disposition des enfants de la commune, un Service d’accueil temporaire et une cantine dans ce bâtiment.

Cette structure était couverte par l’agrément MR 107 du 6 janvier 2005. Dans le cadre de la procédure en vue de l’obtention de cet agrément ministériel, les locaux ont été soumis à un contrôle de la conformité immobilière et de l’équipement par les services du Ministère de la Famille et de l’Intégration.

Avant l’installation de la maison relais et notamment de la salle de jeux où l’accident tragique s’est produit le 2 octobre 2006, ce local servait de salle de classe et plus tard de local des enseignants.

Par délibération du conseil communal de la Commune de (...)  du 13 juin 2006, le principe de la création de la maison relais et le devis relatif aux travaux d’aménagement ont été votés.

Suite à la délibération du conseil communal de la Commune de (...)  du 26 juillet 2006, lors de laquelle le personnel de la maison relais, à savoir D en tant que chargée de direction, et A et B en tant qu’éducateurs, a été désigné et nommé, les travaux d’aménagement ont commencés.

A cet égard il y a lieu de noter qu’D, A et B ont été nommés à l’unanimité de membres présents et cela malgré le fait que ces candidats ne disposaient pas d’une réelle expérience professionnelle et qu’en plus le diplôme d’D n’avait alors pas encore été homologué, mais uniquement le 10 juillet 2007.

D fut nommée au poste de pédagogue curatif, à hauteur de 50% dans l’intérêt des Foyers Scolaires de (...)  et de Heisdorf et à hauteur de 50% dans l’intérêt de l’enseignement primaire et de l’éducation préscolaire/précoce en la commune de (...) .

Le contrat de travail de la chargée de direction et des éducateurs a débuté le 1er septembre 2006.

A cet égard il y a lieu de souligner que c’était le premier contrat de travail pour chacun des trois candidats.

D’après les éléments du dossier, les travaux réalisés dans la maison relais, qui n’étaient pas des travaux de gros œuvre, se limitaient à l’aménagement intérieur des salles respectivement un rafraîchissement de certains locaux, ont été achevés avant l’ouverture de la maison relais le 1er septembre 2006.

Le 12 septembre 2006, le Ministère de la Famille et de l’Intégration a délivré l’agrément MR 107/2 à l’Administration communale de (...)  en tant que gestionnaire de la maison relais. Cet agrément disposait qu’il était accordé pour une durée de cinq ans et qu’il prenait effet le 15 septembre 2006. L’agrément MR 107/2 n’a été publié au Mémorial que le 8 novembre 2006.

Le Ministère de la Famille et de l’Intégration n’a pas procédé à un contrôle de conformité de l’infrastructure de la Maison Relais et l’Administration communale de (...)  n’a pas non plus demandé à ce qu’un tel contrôle soit fait. Cette absence de contrôle a été justifiée par le responsable du Ministère de la Famille et de l’Intégration, Jacques KÜNTZIGER, par le fait qu’un contrôle avait déjà été effectué dans le cadre de l’agrément MR 107 en 2005, de sorte qu’un contrôle supplémentaire ne s’avérait pas nécessaire.

Le jour de l’accident mortel de VICTIME  le 2 octobre 2006, cinq enfants dont VICTIME se trouvaient dans la salle des jeux tandis que les autres enfants étaient occupés à faire leurs devoirs de classe dans une autre salle. L’éducateur A était affecté à la surveillance de la salle de jeux, et B ensemble avec la stagiaire Nadine BOURKEL assistaient les enfants lors des devoirs de classe. D se trouvait dans une autre pièce.

Vers 18.00 heures le père d’un des enfants, Eric DEVROYE est entré dans la maison relais pour récupérer son fils M. D. Il y a lieu de noter, tel qu’il résulte des éléments du dossier, que les parents venant chercher leur enfant, entraient dans la maison relais sans aucun contrôle d’identité et sans sonner et se retrouvaient dans le couloir où ils allaient soit eux-mêmes à la recherche de leur enfant, soit ils demandaient à un membre du personnel d’aller chercher l’enfant.

Eric DEVROYE s’adressa ainsi à A qui va chercher M.D. qui se trouvait sous la surveillance de B. Entretemps, en attendant son fils, il s’entretient brièvement avec VICTIME qui va regagner la salle de jeux ensuite. Quelques instants plus tard, Eric DEVROYE entend un bruit sourd, A se précipite dans la salle et commence à crier. Eric DEVROYE s’est alors aperçu qu’une des deux armoires qui se trouvaient dans la salle et qui servaient de séparation de la pièce était tombée et que VICTIME se trouvait allongé derrière l’armoire. Eric DEVROYE a immédiatement prodigué les premiers soins en attendant l’arrivée du docteur Marie-José WIRTGEN et plus tard de l’anesthésiste Pascal STAMMET du SAMU.

L’enfant VICTIME est décédé sur les lieux.

Quant aux déclarations des témoins

1) quant à l’audition de Cédric BECKER

Le lendemain de l’accident, le commissaire de police Cédric BECKER a été chargé de l’enquête.

Il explique que la maison relais est constituée de différentes pièces, à savoir, d’une cuisine avec salle à manger, d’un bureau pour les éducateurs, d’une salle d’étude, du bureau de la chargée de direction et d’une salle de jeux.

Etant donné que la salle de jeux avait été auparavant une salle de classe, l’aménagement intérieur de cette salle a dû être adapté aux besoins d’une salle de jeux, de sorte que des meubles ont été éliminés, à l’exception de deux armoires.

L’aménagement des différentes pièces avait été fait selon les desiderata du personnel travaillant avec les enfants. D, en tant que chargée de direction, avait pris inspection des lieux déjà vers la fin juillet 2006. A ce moment la salle de jeux faisait encore fonction de salle de classe. Malgré le fait qu’D n’avait jamais été officiellement chargée de l’aménagement intérieur de la maison relais, cette charge lui avait été attribuée de façon implicite.

Peu avant l’ouverture de la maison relais le 1er septembre 2006, des espaliers suédois ont été installés dans la salle de jeux à droite de la porte d’entrée, à un endroit où auparavant se trouvaient deux armoires. En dessous de ces espaliers des matelas et des coussins étaient disposés de sorte à ce qu’ils joignaient l’arrière des deux armoires faisant fonction de séparation de la salle de jeux. Des tapis se trouvaient devant ces armoires.

En ce qui concerne la pose des deux armoires à l’endroit où elles se trouvaient au moment de l’accident, chacun des prévenus avait lors de son audition devant les enquêteurs réfuté toute responsabilité. Toutes les parties en cause s’accordent néanmoins sur le fait que ces armoires ont été examinées quant à leur stabilité. En outre, il aurait été question d’installer dans la salle de jeux, en raison de ses dimensions, une séparation permettant le cas échéant de partager les enfants présents en deux groupes faisant chacun des activités différentes. Or, d’après le personnel, ces armoires, qui n’étaient fixées ni entre elles, ni au sol, n’auraient à l’origine évidemment pas été prévues à cet effet.

Les éducateurs ont tous reconnus n’avoir pas contrôlé la fixation des armoires. En outre, cette fixation n’avait pas non plus été demandée par voie de fiche technique. Par ce biais les éducateurs ont sollicité en date du 28 septembre 2006 notamment que les portes des armoires soient enlevées.

La répartition des tâches entre les éducateurs n’avait pas été fixée de manière officielle, mais avait été faite selon les besoins du service. Néanmoins B avait été le plus souvent chargé de faire la surveillance des enfants ayant des devoirs en classe à finir, tandis que A avait majoritairement été occupé par la surveillance dans la salle des jeux. Lors de l’accident, la chargée de direction D avait fait des travaux d’ordre administratif dans son bureau. Il s’ensuit que seuls deux éducateurs devaient non seulement surveiller les enfants mais encore s’occuper de l’accueil des parents venant récupérer leur enfant.

A cet égard, Cédric BECKER souligne que chacun pouvait pénétrer dans les locaux de la maison relais à sa propre guise et qu’une fois entré il fallait soit aller soi-même à la recherche de l’enfant qu’on venait récupérer soit demander à un éducateur qu’on voyait par hasard dans le couloir ou dans une des pièces de s’en charger.

Le jour de l’accident, cinq enfants se trouvaient dans cette salle de jeux, dont A  avait la surveillance. L.B, K.N.M. et VICTIME étaient occupés à faire un jeu sur les tapis devant les armoires, tandis que J.D. et D.R.T. se défoulaient sur les matelas derrière les armoires.

A un certain moment, au cours de ce jeu D.R.T. heurta l’arrière d’une des armoires qui tomba et qui blessa mortellement VICTIME assis sur le tapis devant l’armoire. L’enquête menée en cause a permis de constater que VICTIME ne se trouvait pas sous l’armoire, alors que celle-ci se trouvait à plat sur le sol, mais qu’il a dû être heurté violemment par cette armoire au moment où elle est tombée. VICTIME est décédé sur le coup en raison d’un traumatisme crânien. Les efforts de réanimation effectués tant par Eric DEVROYE, que par les docteurs WIRTGEN et STAMMET ont été vains.

Au moment de l’accident les enfants ont été sans surveillance, alors que A affecté à cette fin dans la salle de jeux, a été chercher le fils d’Eric DEVROYE, qui se trouvait dans la salle d’étude en train d’effectuer des devoirs.

L’armoire en cause avait un poids de 77 kilogrammes. Elle a été livrée à l’Administration communale de (...)  en 1991. D’après les explications de l’enquêteur, l’armoire a été d’une bonne qualité et l’accident a trouvé son origine non pas dans l’état délabré de ce meuble, mais dans sa mauvaise affectation. En effet, cette armoire n’avait pas été conçue pour servir de séparation de pièces, mais pour être posée dos contre un mur et fixée au mur. Cependant dès la livraison et le montage par l’entreprise LINSTER en 1991, à aucun moment une de ces armoires n’a été fixée d’une quelconque manière.

2) quant à l’audition de Marcel WEYDERT

Marcel WEYDERT, commissaire auprès de la Police Judiciaire, section Police Technique, a été sur les lieux peu de temps après l’accident. Il a été chargé des recherches anthropométriques. 

Il explique que deux armoires, l’une d’un poids de 77 kilogrammes et l’autre d’un poids de 120 kilogrammes, servaient de séparation de la salle de jeux. Ces deux armoires de la marque VS, à l’origine de bonne qualité, avaient été, encore au moment de l’accident, dans un état impeccable et n’étaient pas délabrées. Derrière ces armoires et en dessous des espaliers suédois fixés sur le mur, des matelas d’une hauteur de 4 à 20 centimètres et des coussins du type « Fatboy » d’une hauteur de 4 à 45 centimètres avaient été placés. Il est évident que lorsque des enfants jouent sur ces matelas respectivement sur ces coussins, leur hauteur est réduite en conséquence et mesurait entre 30 et 35 centimètres.

Les armoires avaient une hauteur de 2,07 mètres et étaient larges de 80 respectivement de 120 centimètres.

Le renversement de l’armoire a été favorisé d’une part par le fait que les enfants jouant sur les matelas étaient à une hauteur de 30 à 35 centimètres du sol et d’autre part par le fait que l’armoire était presque vide de sorte qu’aucune force agissant vers le bas ne contribuait à une meilleure stabilité.

Marcel WEYDERT confirme que l’armoire renversée se trouvait à plat sur le sol et que l’enfant décédé se trouvait sur un tapis à gauche de l’armoire qui était tombé vers l’avant. Malgré la bonne qualité des armoires, le témoin indique clairement que les deux armoires, et surtout la plus légère, étaient susceptibles d’être renversées aisément.

3) quant à l’audition d’Eric DEVROYE

Eric DEVROYE est le père de M.D, qui se trouvait également dans la maison relais  le 2 octobre 2006.

Le jour de l’accident Eric DEVROYE s’est présenté vers 17.40 heures dans les locaux de la maison relais afin de récupérer son fils. Le témoin explique qu’en général après avoir pénétré dans le couloir de la maison relais, il attendait à ce qu’un membre du personnel se présente et va chercher l’enfant. Il n’y avait pas d’éducateur désigné à cet effet, mais l’accueil se faisait de façon aléatoire par un des éducateurs. La porte de la salle de jeux était en général ouverte.

Le 2 octobre 2006, A est venu à sa rencontre et est allé chercher M.D. dans une autre pièce. Lors de son audition devant les enquêteurs, Eric DEVROYE  déclare avoir eu l’impression que A se trouvait déjà dans le couloir au moment où lui il est arrivé dans la maison relais, de sorte qu’il en conclut que les enfants étaient sans surveillance dans la salle de jeux.

Entretemps Eric DEVROYE a encore échangé quelques mots avec VICTIME qui l’a rejoint dans le couloir pour, après un court laps de temps qui est estimé par le témoin à deux ou trois minutes, regagner la salle de jeux.

Eric DEVROYE s’est ensuite brièvement entretenu avec son fils, lorsqu’il a entendu un bruit sourd dans la salle de jeux. Il s’est retourné et a vu qu’une armoire était tombée par terre, elle se trouvait à plat sur le sol, de sorte que VICTIME ne se trouvait pas coincé sous l’armoire.

B est entré en premier dans la salle, il a crié et est sorti immédiatement pour appeler les secours. Eric DEVROYE, qui est instructeur de premiers soins, a essayé de réanimer VICTIME A l’audience du 13 octobre 2010 il précise que la respiration de VICTIME dont il parlait auprès des enquêteurs, devait être interprétée comme respiration agonale. A aucun moment l’enfant n’aurait repris connaissance.

4) quant à l’audition du  docteur Marie-Josée WIRTGEN

Le docteur Marie-Josée WIRTGEN qui a son cabinet médical à proximité des lieux a été alertée de l’accident par un membre du personnel.

Elle explique que dès son arrivée dans la salle de jeux elle a pu voir que VICTIME était décédé. L’enfant était pâle et aucun pouls n’était palpable. Malgré le fait qu’elle avait été persuadée que toute tentative de réanimation resterait infructueuse, elle a par conscience professionnelle assisté Eric DEVROYE  lors de la réanimation de l’enfant.

Sur question du tribunal elle exclut que VICTIME aurait pu encore avoir une respiration spontanée suite au traumatisme.

5) quant à l’audition du  docteur Pascal STAMMET

Le docteur Pascal STAMMET est arrivé avec le SAMU à un moment où le docteur Marie-Josée WIRTGEN était en train de réanimer l’enfant.

Il déclare que déjà à une certaine distance du corps il a pu constater de graves blessures à la tête. Pour lui il était évident que VICTIME était déjà mort lors de son arrivée. Alors que des efforts de réanimation étaient déjà en cours et pour remplir ses obligations professionnelles, il a pris la relève.

Le témoin explique que l’enfant ne respirait plus et que si une respiration aurait été constatée dans les secondes voire les une à deux minutes après l’accident, cette respiration devait, au vu de la gravité du traumatisme crânien et de l’arrêt cardiaque qui en est suivi, être interprétée comme respiration agonale.

Après trente-cinq minutes et alors qu’aucune reprise cardiaque et aucune respiration spontanée n’avaient été constatées, le médecin a émis le certificat de décès.

6) quant à l’audition de Bernhard SCHWERING

Le témoin Bernhard SCHWERING est le gérant de la société VS Vereinigte Spezialmöbelfabriken GmbH & Co.KG. Cette société a fabriqué les armoires en cause.

A l’audience du 13 octobre 2010, Bernhard SCHWERING explique que les instructions de montage indiquent clairement que les armoires de ce type sont destinées à être posées contre un mur et fixées au mur. Pour le cas où plusieurs armoires seraient posées dans une ligne, il serait nécessaire de les fixer entre elles.

En aucun cas ces armoires ne seraient destinées à servir de séparation de pièce, et elles ne seraient pas vendues à de telles fins. Il relèverait du bon sens que l’affectation des armoires en tant que séparation de pièce conduirait nécessairement, tôt ou tard, à des accidents.

7) quant à l’audition de Louis KOHL

Louis KOHL est ingénieur-technicien auprès de l’Administration communale de (...) . Il explique qu’il travaille sous les ordres du conseil échevinal respectivement du secrétaire communal qui lui fait part des ordres du conseil échevinal. Il est le supérieur hiérarchique de C qui le remplace en cas d’indisponibilité. Les ouvriers communaux E et Jean-Paul KALMES travailleraient sous les ordres de C.

Lors de l’enquête, Louis KOHL a déclaré que suite à la décision de l’Administration communale de créer une maison relais, il a été chargé de la surveillance des travaux d’aménagement. Etant donné qu’il était en congé de la mi-août jusqu’au début septembre 2006, C avait pris la relève de cette charge.

Il confirme que lors  de la planification de la maison relais, il a été souvent sur place. A ce moment la pièce aménagée par la suite comme salle de jeux était vide à part des armoires posées contre le mur. Les espaliers suédois n’étaient pas montés et les armoires ne faisaient pas encore fonction de séparation de pièce.

Louis KOHL affirme ne pas avoir été au courant d’une quelconque séparation de pièce avant l’accident du 2 octobre 2006. Il n’avait pas non plus été question de fixer les armoires.

Ni les espaliers suédois, ni les matelas et coussins n’avaient été commandés via le service technique de la commune.

A son retour de congé Louis KOHL s’est abstenu de visiter les lieux, alors que dans son esprit tout avait été aménagé et aucun problème n’avait été signalé au service technique. En outre, il avait été encore en charge d’autres projets importants, de sorte qu’il n’était pas disponible pour s’occuper de la maison relais et cela surtout qu’aucune difficulté ne lui était indiquée. Louis KOHL déclare ne pas avoir su si un contrôle externe de la conformité et de la sécurité des lieux avait été fait.

Il estime que les éducateurs, et avant tout D, en tant que chargée de direction, s’occupaient de la commande du matériel qu’ils jugeaient nécessaire au bon fonctionnement de la maison relais. Louis KOHL n’est pas en mesure de dire si le conseil échevinal intervenait dans ces décisions. Néanmoins le conseil échevinal était à la disposition des éducateurs, qui pourraient s’adresser à lui en cas de désaccord avec le service technique.

Louis KOHL explique qu’en principe si les éducateurs expriment des désirs quant à l’aménagement des salles respectivement quant à des travaux à réaliser, ils informent oralement les membres du service technique de la commune.

Une fiche technique ne serait remplie qu’au cas où le service technique ne pouvait pas immédiatement s’en charger, respectivement dans le cas où des travaux de plus grande envergure étaient désirés.

8) quant à l’audition de Nadine BOURKEL

Nadine BOURKEL a été engagée comme stagiaire non rémunérée par l’Administration communale de (...)  le 15 septembre 2006. Elle assistait les éducateurs dans leur travail, mais n’avait pas l’autorisation de s’occuper seule des enfants.

Elle explique que dès le début de son engagement l’aménagement des lieux avait été tel qu’il l’était le jour de l’accident du 2 octobre 2006. Les deux armoires faisaient fonction de séparation de la salle de jeux, des matelas et coussins étaient posés derrière les armoires et des tapis se trouvaient devant les armoires.

Nadine BOURKEL n’est pas en mesure de dire si la position ou la non-fixation de ces armoires étaient un sujet parmi les éducateurs. La seule instruction qu’elle avait eue avait été de faire attention à ce qu’aucun enfant ne se blesse. A cet effet, elle veillait à ce que les coussins et matelas étaient toujours posés l’un contre l’autre.

Au moment de l’accident elle était ensemble avec B dans la salle de classe pour aider les enfants lors de leurs devoirs. Elle déclare que la porte de cette salle était ouverte.

9) quant à l’audition de Témoin 1

Témoin 1  est le bourgmestre de la commune de (...)  depuis le 1er janvier 1988.

Il confirme que la création de la maison relais avait été prévue pour le début de l’année scolaire 2006-2007.

Le projet a été approuvé et le personnel a été nommé lors des conseils communaux des 13 juin et 26 juillet 2006.

Au cours de la réalisation du chantier, il avait été présent tous les jours afin de veiller à ce que le chantier avance dans les délais prévus. Lors de ces visites de chantier au cours des mois de juillet et août 2006, il avait également été régulièrement en contact avec D qui pouvait lui faire part de ces doléances éventuelles. A cet égard il souligne qu’D s’occupait déjà de sa nouvelle tâche avant son engagement officiel le 1er septembre 2006. D avait été, en raison de sa formation, le chef hiérarchique des autres éducateurs.

En ce qui concerne la sécurité des lieux, Témoin 1  affirme qu’une sécurité absolue avait été prioritaire pour l’Administration communale de (...)  et ce déjà depuis 1994. A ce moment la commune s’est dotée d’un délégué à la sécurité en la personne de C. Ce dernier avait été affecté à cette fonction alors qu’en tant que commandant des pompiers il avait des connaissances particulières en matière de sécurité et qu’en plus il avait suivi un cours spécial en la matière.

Le rôle du délégué à la sécurité résultait de sa formation et plus particulièrement des cours qu’il a suivi en matière de sécurité. C avait toujours accompli sa mission à la plus grande satisfaction des responsables communaux.

En cas de problème spécifique C aurait demandé conseil auprès du conseil échevinal qui lui aurait donné l’instruction de n’exécuter des travaux que s’ils respectent les critères de sécurité.

Il explique que l’organigramme du service technique de la commune de (...)  est le seul document qui définit de façon générale les missions du service technique et de ses différents membres ainsi que la hiérarchie existant entre eux.

Néanmoins cette hiérarchie ne peut pas toujours être respectée et cela surtout pendant les périodes de congé.

Le témoin n’est pas en mesure de confirmer que C est le chef hiérarchique de E. Luis KOHL est le chef du service technique. Témoin 1  affirme cependant que E ne peut faire un quelconque travail sans ordre.

Il souligne que puisque le respect de l’obligation de sécurité par rapport à toutes les infrastructures scolaires avait toujours été prioritaire dans la commune, le conseil échevinal aurait chargé le service technique et notamment le délégué à la sécurité de la mise en œuvre du projet d’aménagement de la maison relais sans cependant lui donner des instructions écrites à ce sujet. Les membres du service technique avaient eu connaissance de ce projet dans la mesure où ils avaient participé à sa conception.

En principe les ordres étaient donnés par le conseil échevinal au secrétaire communal qui les transmettait au service technique. Il arrivait cependant également que le conseil échevinal contactait le service technique directement.

Le service technique de la commune était donc chargé d’exécuter les travaux d’aménagement de la maison relais avec l’assistance de l’architecte Jacques LORANG qui lui était en contact avec le Ministère de la Famille et le Ministère de la Fonction Publique et notamment avec Jean-Claude CONTER, Inspecteur Général de Sécurité de la Fonction Publique.

Témoin 1  confirme que lors des travaux Jean-Claude CONTER avait pris inspection des lieux, mais il précise que cette visite se limitait aux pièces situées dans la cave du bâtiment. En effet, à l’origine il avait été prévu d’y aménager la salle de jeux des enfants. En outre, le déplacement en juin 2006 sur les lieux par Jean-Claude CONTER n’avait pas eu lieu dans le cadre de la procédure d’agrément mais uniquement pour donner des conseils en matière de sécurité à l’architecte.

Le témoin confirme qu’avant l’ouverture de la maison relais, l’Administration communale de (...)  n’a pas demandé à un organisme spécialisé de faire une reprise technique des infrastructures, au motif que le service technique de la commune s’était occupé de l’aménagement de la maison relais.

Le témoin déclare que concernant les questions relatives à l’infrastructure et le mobilier de la maison relais, il appartenait aux éducateurs de s’adresser soit au service technique, soit au secrétaire communal, soit directement à lui-même.

Le conseil échevinal avait laissé l’aménagement des différentes salles à l’appréciation du personnel y travaillant.

D avait rempli des bons de commande notamment en ce qui concerne les matelas et les coussins ainsi que les espaliers suédois. Témoin 1  conteste avoir donné son feu vert concernant la commande de ce matériel. Ce serait également le personnel éducatif qui a fait le choix de garder des meubles qui étaient déjà installés respectivement il s’est occupé à commander de nouveaux meubles.

Concernant les fiches techniques, Témoin 1  explique qu’elles sont à la disposition du personnel éducatif qui peut ainsi faire part de ses doléances concernant de menus travaux à réaliser. Le bourgmestre n’est cependant pas en mesure de préciser à quel service ces fiches techniques sont transmises avant exécution.

Tant lui que les échevins faisaient entière confiance aux éducateurs et aux membres du service technique de la commune. Témoin 1  déclare avoir rempli ses obligations en matière de sécurité en déléguant cette charge à ses services et avant tout à son délégué de sécurité.

Témoin 1  est formel pour affirmer, malgré le fait d’avoir été présent dans les lieux entre le 1er et le 15 septembre 2006, ne pas avoir vu des armoires dans la salle de jeux et encore moins de les avoir vu en tant que séparation de pièce. Il reconnaît que pendant toute sa carrière en tant que bourgmestre de la commune, ne jamais avoir contrôlé les différentes salles des écoles ou de la maison relais pour vérifier si elles garantissaient un haut niveau de sécurité aux enfants. Les armoires en cause ne l’avaient préoccupé d’aucune façon.

D n’avait jamais exprimé auprès de lui un quelconque souci concernant les armoires et elle ne l’avait pas informé non plus qu’elle voulait aménager une séparation dans la salle de jeux.

En ce qui concerne l’absence d’agrément ministériel au moment de l’ouverture de la maison relais, Témoin 1  explique que le Ministère de la Famille avait informé oralement le secrétaire communal que l’agrément avait été accordé. Il a décidé de l’ouverture de cette maison relais dans le souci d’offrir ce service aux citoyens de la commune. Témoin 1  déclare qu’à partir du 12 septembre 2006, jour où l’agrément a été accordé, tout était en ordre selon lui.

Quant aux déclarations des prévenus

1) quant à E

E a été entendu par les enquêteurs en date du 6 novembre 2006 et par le juge d'instruction en date des 2 et 13 février 2007 et 10 mai 2007.

Il déclare qu’il est engagé en tant qu’ouvrier communal auprès de l’Administration communale de (...)  et qu’il s’occupe principalement du service d’eau de la commune. A différentes occasions il travaille également dans l’école Sepp Hansen respectivement dans d’autres bâtiments communaux, et ce sous les ordres de C.

Pendant les vacances scolaires de l’été 2006, il était chargé de l’aménagement de la maison relais et surtout du déménagement des meubles qui y étaient encore entreposés. Les meubles de la salle de jeux qui auparavant servait de salle de classe, donc surtout des bancs de classe et des armoires étaient déménagés vers l’école primaire et les meubles que les éducateurs de la maison relais désiraient garder étaient laissés dans cette pièce.

En raison des souhaits exprimés par les éducateurs de garder deux des armoires, ces armoires posées contre le mur, étaient déplacées, enlevées d’une certaine distance du mur et testées par E quant à leur stabilité. Tant C, D que B auraient assisté à ce test de stabilité. A cet effet, E s’accrochait à l’armoire et la secouait, tandis que les autres personnes présentes ont pu s’assurer de la stabilité.

A l’audience du 14 octobre 2010, E soutient qu’au moment de ce test, il avait des doutes quant à la stabilité de l’armoire en cas d’un heurt par l’arrière. Il n’est cependant plus en mesure de dire s’il a exprimé ses pensées à haute voix.

Le prévenu est formel pour affirmer que les armoires n’étaient pas posées lors du test de la même façon que lors de l’accident tragique du 2 octobre 2006.

E conteste formellement avoir été informé que les armoires devaient par la suite faire fonction de séparation de la pièce. Il explique que les éducateurs avaient voulu garder les armoires, sans qu’à ce moment il n’eut été question de leur affectation. Ils  auraient déclaré qu’ils décideraient par la suite de l’affectation des armoires.

A aucun moment il n’aurait été question d’installer une séparation dans cette salle, ni au moyen d’un rideau, ni en utilisant les armoires à cet effet.

Peu avant l’ouverture de la maison relais, donc fin août 2006, E avait été chargé de l’installation des espaliers suédois au mur contre lequel étaient auparavant posées lesdites armoires. Alors que les armoires avaient déjà été déplacées auparavant pour faire le test de stabilité, elles ne le gênaient pas pendant ces travaux. A ce moment les armoires ne se seraient toujours pas trouvées dans leur position du 2 octobre 2006.

E est formel pour dire qu’il n’aurait jamais eu d’instruction ni des éducateurs, ni d’un quelconque supérieur hiérarchique de fixer les armoires d’une quelconque manière.

E explique qu’il aurait eu l’instruction de C, qu’à partir du 15 septembre 2006, jour de la reprise des cours, de ne plus effectuer des travaux sans que la demande en soit faite par une fiche technique.

Or, aucune fiche technique relative à la fixation des archives ne lui serait parvenue.

A l’audience du 14 octobre 2010, il maintient ses dépositions.

Son mandataire Maître Philippe PENNING conclut à l’acquittement de E. Il explique que bien que E ait effectué le test de stabilité de l’armoire, il ne serait pas la personne qui a posé l’armoire à l’endroit où elle fut finalement renversée le 2 octobre 2006.

En plus s’il l’a effectivement déplacée le jour du test, il aurait fait ce geste sous la surveillance de son supérieur hiérarchique, C. Ce serait d’ailleurs C qui aurait jugé que l’armoire avait réussi le test de stabilité.

Maître Philippe PENNING soutient encore que ni le supérieur hiérarchique, ni un autre membre du personnel de la maison relais n’aurait donné à son mandant des instructions claires, précises et adéquates de fixer les armoires d’une quelconque manière.

Ni la position, ni la fixation des armoires n’auraient été sujets à discussion, alors qu’au moment de ce test, les armoires n’auraient pas encore été installées dans leur position finale. L’objet du test aurait été de voir si on pouvait encore utiliser les armoires ou bien s’il fallait les mettre au rebut.

En outre, E serait un simple exécutant en bout de chaîne, sans aucune formation spécifique, à qui aucune responsabilité pénale ne pourrait être imputée.

2) quant à C

C a été entendu par les enquêteurs le 16 octobre 2006 et par le juge d'instruction les 1er et 13 février 2007 et le 10 mai 2007.

Il explique qu’il travaille depuis le 1er avril 1977 comme expéditionnaire technique auprès de l’Administration communale de (...) . Louis KOHL serait son supérieur hiérarchique.

Il serait délégué à la sécurité et à cet effet il aurait contrôlé les différents bâtiments communaux.

Il était chargé, ensemble avec Louis KOHL, de l’aménagement intérieur de la maison relais créée pour l’année scolaire 2006-2007.  C déclare qu’au cours des travaux effectués, il avait souvent été présent sur le chantier pour s’entretenir avec les éducateurs au sujet de leurs desiderata concernant l’aménagement des différentes pièces. Concernant des travaux à effectuer, les éducateurs lui avaient en principe donné des ordres oralement. Il lui appartenait de continuer les souhaits des éducateurs aux ouvriers communaux.

A partir de la mi-août 2006, C a été seul en charge de la surveillance du chantier alors que Louis KOHL était en congé à partir de ce moment.

Il explique que le mobilier de la maison relais était constitué pour partie de pièces ayant déjà existé avant l’aménagement de la maison relais et pour partie de nouvelles acquisitions.

Les deux armoires qui finalement ont servi de séparation de la salle de jeux se trouvaient déjà dans cette salle au moment où elle faisait encore fonction de salle de classe. A ce moment elles étaient posées avec la face arrière contre le mur.

C soutient que les éducateurs avaient à un moment donné exprimé le souhait de voir la salle de jeux séparée en deux parties. Or, cette idée n’aurait pas été développée autrement par la suite. Il déclare n’avoir su ni que les éducateurs voulaient installer un rideau à cet effet ni que les armoires restées dans la salle devaient être utilisées à de telle fin.

Alors que les éducateurs s’étaient interrogés quant à la stabilité de ces armoires, les ouvriers communaux avaient déplacé les armoires du mur dans la salle et E s’était accroché à une des armoires afin d’en tester la stabilité. Alors que les armoires avaient suffi aux exigences de stabilité, il avait été décidé de laisser ces armoires dans la salle de jeux, sans qu’il n’ait cependant été précisé que les éducateurs voulaient les utiliser en tant que séparation de pièce.

Selon C il n’avait été à aucun moment question de fixer les armoires d’une quelconque façon. E ne lui aurait pas non plus fait part d’un tel souhait de la part des éducateurs par la suite. Il ne l’aurait pas non plus informé de ses doutes quant à la possibilité d’un renversement des armoires lors d’un heurt par l’arrière.

C déclare qu’à part lui-même et E, D et B avaient encore assisté à ce test de stabilité des armoires. Il ne se souvient plus si A était présent.

Le prévenu soutient encore qu’après le 1er septembre 2006, personne ne l’aurait contacté au sujet des armoires.

C reconnaît n’avoir contrôlé les lieux quant à leur sécurité ni avant l’ouverture de la maison relais le 1er septembre 2006, ni entre cette date et le jour de l’accident mortel de L.G.R.

Il prétend que, puisque l’aménagement intérieur des différentes salles n’avait pas encore été terminé le jour du test des armoires, celles-ci n’auraient, pour lui,  pas suscité des problèmes de sécurité. En outre, le service technique et donc lui-même auraient été débordés par d’autres charges à effectuer pour le compte de la commune.

Le prévenu affirme n’avoir appris l’utilisation des armoires en tant que séparation de pièce que le 2 octobre 2006.

Son mandataire Maître Alex PENNING, conclut à l’acquittement de C.

Il soutient que l’agencement de la salle de jeux, et plus particulièrement la pose de coussins et de matelas derrière des armoires placées au milieu d’une pièce, serait à l’origine de l’accident, alors que cette partie de la salle a été conçue de sorte à inviter les enfants à se défouler.

C ne se serait pas occupé du mobilier de la maison relais. Les éducateurs auraient été libres de choisir les meubles et, à cet effet, ils auraient rempli des bons de commande. L’idée d’une séparation de la pièce serait également venue des éducateurs et non pas des membres du service technique.

Maître Alex PENNING soutient que son mandant n’était même pas au courant que cette pièce devait être utilisée comme salle de jeux et encore moins que les armoires devaient faire fonction de séparation de cette salle.

Il prétend qu’il aurait appartenu aux éducateurs de réclamer la fixation des armoires. Cette demande aurait pu être faite par le biais d’une fiche technique. Une telle fiche technique avait d’ailleurs été remplie par B et signée par D le 28 septembre 2006 dans le but de voir enlever les portes des armoires. Or, les éducateurs n’ont, à ce moment, toujours pas demandé la fixation des armoires.

Même si C serait le délégué à la sécurité de la commune de (...) , il ne résulterait d’aucune pièce du dossier quelles ont été ses fonctions. Aucun supérieur hiérarchique ne lui aurait donné l’instruction de contrôler quotidiennement tous les bâtiments communaux. Ces armoires se seraient trouvées dans l’école depuis 1991 et à aucun moment elles n’auraient été fixées d’une quelconque manière.

Il n’aurait partant pas appartenu à C de fixer des armoires qui, au moment où il a assisté au contrôle de stabilité, n’étaient pas affectées définitivement.

C fait plaider qu’il ne saurait être déclaré responsable de l’accident alors qu’aux termes des articles 6 et 8 de la loi concernant la sécurité dans la sécurité fonction publique, le collège des bourgmestre et échevins ne saurait se décharger de sa responsabilité en matière de sécurité.

3) quant à B

B a été entendu par les agents de police le 12 octobre 2006 et par le juge d’instruction les 30 janvier, 13 février et 8 mai 2007.

B a confirmé qu’il était engagé à partir du 1er septembre 2006 en tant qu’éducateur diplômé par la commune de (...) . Ce poste était son premier contrat de travail. Il a été affecté à la maison relais de l’école primaire Sepp Hansen.  Dans cette structure il travaillait ensemble avec la chargée de direction D, l’éducateur A et la stagiaire Nadine BOURKEL.

Le prévenu explique qu’D, en tant que chargée de direction, serait la responsable de la maison relais.

Les différentes pièces de la maison relais auraient été aménagées selon ses désirs et ceux de ses collègues de travail, D et A. Etant donné que les commandes concernant le mobilier avaient déjà été faites avant le début de son contrat de travail le 1er septembre 2006, il estime qu’D s’en était chargée.

Il reconnaît que l’idée d’installer une séparation dans la salle de jeux émanait des éducateurs. Ils avaient prévu d’installer à cette fin un rideau et avaient continué ce souhait au personnel du service technique. Le service technique aurait été chargé de mettre à exécution les besoins des éducateurs quant à l’aménagement de la salle de jeux.

Lors de son audition du 12 octobre 2006, B déclare qu’il n’avait pas été prévu d’utiliser les armoires en tant que séparation de pièce. A un moment donné, avant l’ouverture de la maison relais, les armoires étaient installées telles qu’elles l’étaient le jour de l’accident. Les éducateurs n’auraient pas été satisfaits de cette décision et auraient fait part de leur désaccord aux membres du service technique. E aurait alors suggéré de fixer les deux armoires entre elles. Selon B, cette discussion aurait eu lieu entre le 15 et le 31 août 2006.

Le 30 janvier 2007, B explique aux enquêteurs qu’D avait prévu de diviser la salle de jeux par un rideau. E aurait refusé cette idée au motif que la fixation d’un tel rideau serait impossible en raison du faux plafond. E aurait alors proposé d’utiliser les armoires restées dans cette pièce comme séparation.

Les éducateurs n’auraient pas apprécié cette proposition, surtout parce que les armoires ne permettaient pas d’avoir une vue globale sur toute la pièce et empêchaient ainsi une surveillance adéquate. A un moment donné, où E et son collègue de travail KALMES étaient présents, il a été sujet de la sécurité des enfants au regard d’une part de la stabilité des armoires et d’autre part de l’obstruction de la vue.

B affirme de manière formelle que E aurait placé les armoires à l’endroit où elles s’étaient trouvées le jour de l’accident. E aurait soutenu qu’il serait impossible de fixer les armoires au sol ou au plafond. La seule solution serait de les fixer entre elles. D lui aurait alors donné l’instruction de les fixer de cette façon. Le prévenu B explique que la conversation sur les armoires, leur position respectivement leur fixation n’aurait pas duré plus de cinq minutes.

Etant donné que les éducateurs n’étaient toujours pas convaincus de la solution proposée par E, ce dernier aurait testé la stabilité des armoires en s’accrochant sur une d’elle. Il aurait jugé que les armoires étaient stables, de sorte que les éducateurs auraient accepté de les laisser au milieu de la pièce en tant que séparation, même si le problème de la vue n’était toujours pas résolu. C n’aurait pas été présent lors de ce test de stabilité.

Au mois d’août 2006, les membres du service technique ont informé les éducateurs qu’il fallait utiliser les fiches techniques en cas de demande de travaux à réaliser, alors qu’ils n’arrivaient plus à gérer les instructions orales. B estime que C avait émis cette recommandation.

B reconnaît qu’aucun des éducateurs n’a vérifié la fixation des armoires telle qu’elle fut demandée par D.

A partir du 1er septembre 2006, la maison relais et donc également la salle de jeux ont été régulièrement utilisées par les enfants et par les éducateurs. B aurait été principalement en charge de faire les devoirs avec les enfants tandis que A était en charge de la salle de jeux. Il avait appartenu à D de faire la répartition des éducateurs.

B soutient qu’il avait utilisé la salle de jeux à deux ou trois reprises seulement, alors que la météo du mois de septembre 2006 favorisait des activités en plein air avec les enfants.

Le jour de l’accident il aurait été occupé à faire des devoirs avec quelques uns des enfants présents ce jour. Il se serait trouvé dans la salle d’études prévue à cet effet. A aurait été chargé de la surveillance de la salle de jeux. A un certain moment il serait sorti de la salle d’étude alors qu’il avait entendu une discussion à haute voix sur le couloir. A ce moment il aurait entendu un bruit sourd. Il aurait couru dans la salle de jeux où il aurait aperçu A  agenouillé à côté de VICTIME Une des armoires était par terre. Il aurait prévenu D qui a appelé le SAMU.

A l’audience du 14 octobre 2010, B a maintenu ses déclarations quant au déplacement des armoires par E.

En ce qui concerne la fiche technique du 28 septembre 2006, par laquelle les éducateurs réclamaient l’enlèvement des portes des armoires mais non pas la fixation des armoires, B  explique qu’ils avaient tous été persuadés que les armoires avaient été fixées entre elles par le service technique de la commune.

Son mandataire, Maître Fränk ROLLINGER conclut à l’acquittement de son mandant. Il soutient qu’aucun défaut de surveillance des enfants ne saurait lui être reproché, alors qu’il était affecté à la salle d’études au moment de l’accident. En outre, il ne serait pas responsable de l’aménagement de la salle de jeux et de la séparation de la pièce qui avaient été faits sous la responsabilité de la commune, gestionnaire de la maison relais, respectivement de la chargée de direction, responsable de l’administration et de l’organisation de la maison relais. B se serait conformé aux instructions de ses chefs hiérarchiques tel que prévu dans son contrat de travail.

Son mandant n’aurait pas non plus installé ou fait installer des coussins et matelas derrière les armoires. En outre, le fait que les enfants auraient sauté le jour de l’accident sur les coussins et auraient heurté une des armoires serait la faute de A qui aurait négligé son obligation de surveillance.

Par ailleurs, les éducateurs auraient donné l’instruction au service technique de fixer les armoires et même si tel n’avait pas été le cas, il aurait appartenu à C, en sa qualité de délégué à la sécurité, et au regard du règlement grand-ducal du 13 juin 1979 concernant les directives en matière de sécurité dans la fonction publique, d’indiquer qu’aucune armoire ne puisse être posée sans être solidement fixée.

A titre subsidiaire, Maître Fränk ROLLINGER prétend que le défaut de surveillance de A serait la cause directe de l’accident. Il lui aurait appartenu de veiller sur les enfants et d’éviter qu’ils se défoulent sur les coussins derrière les armoires. B ne saurait être tenu responsable du déroulement des faits.

En outre, il aurait été persuadé que les armoires étaient solidement posées. Les armoires avaient été testées à cette fin.

Aucune faute qualifiée ne saurait lui être reprochée en relation causale avec le décès de L.G.R.

4) quant à A

A a été entendu par les enquêteurs en date du 10 octobre 2006 et par le juge d'instruction en date des 31 janvier, 13 février et 8 mai 2007.

Il confirme également que son engagement en tant qu’éducateur diplômé auprès de l’Administration communale de (...)  le 1er septembre 2006 a été son premier contrat de travail.

Il précise qu’D en tant que chargée de direction, serait la responsable de la maison relais.

Le 10 octobre 2006 A explique aux enquêteurs que le jour de l’accident mortel de VICTIME il se serait occupé de la surveillance des enfants dans la salle de jeux, tel que cela lui avait été ordonné par D. Cinq enfants étaient présents à ce moment. Trois enfants se seraient trouvés sur le tapis situé devant les armoires, tandis que deux enfants se seraient défoulés sur les matelas derrière les armoires. Les quelques moments avant l’accident il se serait trouvé entre le couloir et la porte de la salle de jeux pour dire au revoir à une mère venue chercher ses deux enfants.

Il se rappelle encore de la présence d’autres parents et notamment d’Eric DEVROYE  avec qui il aurait échangé quelques mots.

A explique qu’il aurait donné l’instruction à un des enfants de préparer un jeu sur le tapis. Il déclare avoir utilisé le temps nécessaire à la préparation de ce jeu, qu’il estime être de quelques secondes, pour parler à un des parents venu récupérer son enfant.

Soudainement il aurait entendu un bruit, et au moment où il se serait retourné il aurait pu voir l’armoire renversée. Seulement quelques instants plus tard il aurait aperçu VICTIME allongé à côté de l’armoire.

Lors de son interrogatoire devant le juge d’instruction le 31 janvier 2007, le prévenu donne de plus amples précisions quant au déroulement des faits et les moments ayant précédé l’accident. Il déclare que deux enfants présents dans la salle de jeux se seraient levés du tapis alors qu’ils avaient vu leur mère dans le couloir. Il se serait levé également pour saluer la mère. Il aurait attendu à ce que ces enfants mettent leurs chaussures et accompagnent leur mère vers la sortie. A ce moment la mère serait déjà sortie sans attendre les enfants. Alors que les enfants ne suivaient pas, il serait ressorti dans le couloir pour voir ce qu’ils faisaient. Ces enfants auraient alors voulu se précipiter vers la sortie ce que A aurait interdit alors qu’il voulait éviter qu’ils sortent seuls sur le parking. Il leur aurait dit d’attendre leur mère dans le couloir. Entretemps le prévenu aurait regagné la salle de jeux. A un moment donné la mère serait revenue et se serait fâchée avec ses enfants. A lui aurait alors expliqué qu’il avait dit aux enfants d’attendre dans le couloir. Il aurait dit au revoir à la mère et aux enfants et à ce moment l’armoire serait tombée. A estime que tout cet épisode aurait duré moins de cinq minutes.

Concernant l’aménagement de la maison relais et plus particulièrement de la salle de jeux, A n’est pas en mesure de donner des précisions quant à la personne qui a disposé les meubles de telle façon qu’ils se trouvaient le jour de l’accident.

Le prévenu reconnaît n’avoir jamais vérifié la stabilité des armoires, alors que ces armoires ne présentaient aucun problème en ce sens.

Il déclare que vers la mi-août 2006, la chargée de direction aurait exprimé le souhait de voir installer une séparation dans la salle de jeux. Elle aurait eu l’intention de séparer la pièce au moyen d’un rideau. Les trois éducateurs, E et Jean-Paul KALMES ou C auraient été présents lors de cette entrevue dans la salle de jeux. L’idée des rideaux aurait été réfutée par les membres du service technique en raison du faux plafond, et E aurait alors proposé de se servir des armoires en tant que séparation. Lors de la confrontation des prévenus devant le juge d’instruction le 13 février 2007, A déclare qu’D avait l’idée d’utiliser les armoires à cette fin.

Devant les enquêteurs A n’était plus en mesure de confirmer qu’un test de stabilité des armoires a été effectué. Il se rappelle cependant qu’D ait dit qu’il fallait fixer les armoires, sans qu’elle n’ait cependant donné des précisions quant à la méthode à utiliser. Lors de la confrontation des prévenus devant le juge d’instruction le 13 février 2007, A confirme cependant qu’un test de stabilité a été fait par E et qu’D aurait insisté à ce que les armoires soient fixées.

D aurait également donné l’instruction aux éducateurs de s’asseoir, dans la salle de jeux, de façon à pouvoir surveiller les deux parties de la salle.

Il confirme que les trois éducateurs n’auraient pas été satisfaits de la séparation au moyen des armoires, alors que la surveillance visuelle de la salle s’avérait difficile. Ni lui, ni un de ses collègues de travail n’auraient cependant pris l’initiative d’enlever les armoires respectivement de les déplacer pour améliorer les conditions de travail, au motif que l’aménagement intérieur n’aurait pas encore été terminé et que d’autres travaux, tel que la protection des radiateurs et l’installation d’une sonnette, devaient encore être prioritairement effectués.

Début septembre Témoin 1  aurait pris inspection des lieux. La seule critique qu’il aurait formulé aurait concerné la couleur d’une des portes. C aurait également été présent dans les locaux au mois de septembre, il aurait installé des extincteurs de feu.

A l’audience du 14 octobre 2010, A a expliqué ne plus avoir beaucoup de souvenirs quant à l’aménagement des lieux et quant au test de stabilité effectué. Il ignore également qui a posé les armoires à l’endroit où elles se trouvaient le 2 octobre 2006.

Maître Liliane DAVID-SCHLANGER conclut à l’acquittement de son mandant A. Elle soutient que le décès de VICTIME serait dû à un enchaînement de circonstances malencontreuses et surtout à des fautes commises par le gestionnaire de la maison relais.

Elle fait valoir que l’article 18 du règlement grand-ducal du 20 juillet 2005 concernant l’agrément à accorder aux gestionnaires de maison relais pour enfants, disposant notamment que le gestionnaire veille à ce que toutes les précautions garantissant un haut niveau de sécurité aux enfants soient prises lors de la construction et de l’aménagement des infrastructures, de l’acquisition et de la disposition du mobilier, des équipements, des jeux et des jouets, n’aurait pas été respecté par le gestionnaire.

En outre, l’Administration communale aurait ouvert une maison relais sans disposer de l’agrément nécessaire et elle n’aurait pas veillé à ce qu’un organisme externe procède au contrôle de sécurité des lieux.

Aucune faute ne saurait être reprochée à A. Il n’aurait pas pris de décision quant à l’aménagement intérieur des différentes pièces et n’aurait pas non plus posé les armoires ou décidé de leur position. Il estimait que les armoires étaient stables et elles n’ont pas suscité une inquiétude dans le chef de A. Aux termes de son contrat de travail il a été chargé d’assister la chargée de direction dans la gestion de la maison relais et dans l’encadrement des enfants.

Le mandataire du prévenu A estime encore qu’au vu de l’organisation de la maison relais, l’accident était inévitable pour lui. Il avait été chargé de veiller sur les enfants dans les deux parties de la salle de jeux, à cet effet, il devait se mettre sur une chaise. Or, en plus il devait s’occuper de l’accueil des parents alors que la salle de jeux était la plus proche de la porte d’entrée. En raison de cette répartition des tâches il aurait donc été dans l’impossibilité de s’assurer en permanence du bien-être des enfants. Maître Liliane DAVID-SCHLANGER estime que même si A avait été assis sur la chaise, tel qu’il était chargé par D, il n’aurait pas pu éviter l’armoire de tomber.

5) quant à D

D a été entendue par les enquêteurs en date du 13 octobre 2006 et par le juge d'instruction en date des 29 janvier, 13 février et 7 mai 2007.

Elle explique qu’elle a été engagée par l’Administration communale de (...)  à compter du 1er septembre 2006 en tant que chargée de direction de la maison relais. Ce poste n’était qu’une demi-tâche, alors qu’elle travaillait encore à mi-temps comme chargée de l’éducation dans l’école primaire.

Auprès des enquêteurs elle déclare qu’au courant du mois d’août 2006, elle a pris inspection des locaux de la maison relais ensemble avec ses collègues de travail B et A. L’aménagement intérieur aurait été fait selon les désirs et besoins des éducateurs. Il aurait été le souhait des éducateurs de voir la salle de jeux divisée en deux parties, donc en une zone de jeux et en une zone de repos. A cet effet, ils auraient voulu utiliser un rideau. Cette proposition avait été refusée en raison du faux plafond.

A un moment donné, après le 16 août 2006, les deux armoires auraient été posées de façon à servir de séparation de pièce. Les éducateurs n’auraient pas approuvé cette solution. D soutient qu’elle n’aurait pas été d’accord avec la position des armoires alors que des espaliers suédois avaient été fixés derrière les armoires et auraient pu amener les enfants à monter sur les armoires, en outre elle aurait insisté à ce que les armoires soient fixées d’une certaine manière. Les ouvriers du service technique  auraient encore vérifié la stabilité des armoires en s’accrochant dessus.

Elle confirme que ni elle, ni un de ses collègues de travail ne se seraient assurés de la fixation des armoires.

Lors de son premier interrogatoire devant le juge d'instruction le 29 janvier 2007, D soutient que l’Administration communale de (...)  ne lui aurait donné ni des instructions, ni des consignes quant à l’aménagement intérieur de la maison relais.

Un jour, entre le 15 août et le 1er septembre 2006, les membres du service technique lui auraient dit de venir dans la salle de jeux. A ce moment les armoires avaient été écartées du mur et se trouvaient dans une position perpendiculaire au mur. Elle aurait refusé que les armoires restent posées de cette façon alors que des espaliers suédois devaient y être fixés et auraient permis aux enfants de monter sur les armoires. Par la suite les armoires avaient été posées à l’endroit où elles l’étaient le jour de l’accident. D soutient qu’elle n’aurait pas été présente dans la salle pendant cette manœuvre. En revenant dans la salle quelques instants plus tard, elle aurait donné l’instruction aux membres du service technique, E et Jean-Paul KALMES, de fixer les armoires. Si cette fixation ne serait pas possible il faudrait enlever les armoires. E aurait expliqué que ni une fixation au sol, ni au plafond ne serait possible. Pour faire preuve de la stabilité des armoires E se serait accroché à l’une d’elle et il aurait prétendu que les armoires seraient stables. D soutient que malgré la réussite de ce test,  elle aurait insisté auprès de E à ce que les armoires soient fixées entre elles. D est formelle pour affirmer que C n’était pas présent lors de cette entrevue.

D ajoute que malgré plusieurs demandes de sa part, C, n’aurait pas respecté les mesures de sécurité prévues dans le règlement grand-ducal du 20 juillet 2005 concernant l’agrément à accorder aux gestionnaires de maison relais pour enfants. Ainsi il n’aurait suivi ni ses instructions concernant un dispositif de sécurité pour les fenêtres, ni celles concernant l’installation fixe de l’extincteur de feu ou encore celles concernant la mise à disposition d’une trousse de premier secours.

En ce qui concerne la répartition des tâches entre les éducateurs, D soutient qu’elle aurait donné l’ordre que la personne faisant la surveillance dans la salle de jeux ne devait pas laisser les enfants seuls. Elle affirme avoir donné une instruction spécifique en ce sens à A, alors qu’elle aurait estimé que ce dernier serait le moins discipliné.

A l’audience du 20 octobre 2010 D a confirmé sa version des faits concernant le déplacement des armoires et le test de stabilité. Elle affirme n’avoir jamais douté de la stabilité des armoires et avoir été persuadée que les armoires étaient fixées entre elles tel qu’elle l’avait ordonné.

Ni les membres de l’Administration communale de (...) , ni le personnel enseignant, ni aucun des parents présents quotidiennement dans les lieux n’auraient exprimé une quelconque objection quant à la position de ces armoires.

L’Administration communale lui aurait assuré que tout était en ordre au niveau administratif. Il serait inacceptable qu’une commune puisse ouvrir une maison relais sans disposer de l’agrément afférent.  A plusieurs reprises elle aurait demandé une copie de l’agrément afin de pouvoir l’afficher à l’entrée de la maison relais, tel que prévu par le règlement grand-ducal du 20 juillet 2005. Tant l’échevin Fernand WIES que le secrétaire communal Fernand MARCHETTI lui auraient dit que tout était en ordre et qu’elle recevrait une copie de l’agrément.

Le mandataire d’D, Maître Gaston VOGEL sollicite l’acquittement de sa mandante. Il estime scandaleux que le bourgmestre et les échevins aient bénéficié d’un non-lieu et qu’aucun agent du Ministère de la Famille et de l’Intégration n’ait fait l’objet de poursuites.

Le Ministère de la Famille et de l’Intégration ayant délivré un agrément, D a pu légitimement croire que la sécurité des lieux avait été contrôlée et approuvée.

D n’aurait été engagée que le 1er septembre 2006 de sorte qu’elle ne saurait être tenue responsable pour ce qui a été fait avant cette date.

Mais même après le 1er septembre 2006, aucune responsabilité quant au déroulement des faits ne lui incomberait. Elle aurait exprimé ses inquiétudes quant à la position et la stabilité des armoires. Le service technique lui aurait assuré que les armoires étaient stables et en plus le Ministère a délivré l’agrément.

Même à supposer qu’D aurait voulu placer les armoires en tant que séparation de pièce, il aurait appartenu au service technique et au délégué à la sécurité de refuser ce projet.

 

En droit

-quant aux moyens de procédure invoqués par le mandataire de B

A l’audience du 21 octobre 2010 Maître Fränk ROLLINGER a soutenu que la procédure entière serait entachée de violations des articles 6.1 et 6.3b de la Convention de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales et de l’article 47 de la Charte des Droits fondamentaux de l’Union Européenne.

Il conclut ainsi principalement à l’annulation de l’intégralité de la procédure, y comprise l’instruction. A titre subsidiaire, il demande l’acquittement pur et simple de B. A titre encore plus subsidiaire, il sollicite que le tribunal retienne que le délai raisonnable n’a pas été respecté et en conséquence adapte la sanction en fonction de la violation de l’article 6.1 de la Convention de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales et de l’article 47 de la Charte des Droits fondamentaux de l’Union Européenne.

En ce qui concerne les moyens tirés de la violation des articles 6.1 et 6.3b de la Convention de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales, à part la violation du délai raisonnable, le tribunal constate que ces moyens ont été examinés et toisés dans le jugement numéro 3310 du 13 octobre 2010. Ces moyens ne feront partant plus l’objet d’un examen itératif.

Quant aux moyens basés sur la violation de l’article 47 de la Charte des Droits fondamentaux de l’Union Européenne, le Ministère Public conclut à l’irrecevabilité des moyens de nullité, soulevés par le mandataire du prévenu pour ne pas avoir été soulevés in limine litis, avant toute défense au fond.

Or, puisqu’il est de jurisprudence constante que les nullités relatives à un acte posé au cours de l’enquête préliminaire peuvent être soulevées à tout moment à l’audience de la juridiction de jugement, les renonciations ne se présumant pas et les forclusions étant de droit strict, le tribunal conclut, par analogie, que les demandes en nullité concernant la procédure après le renvoi ordonné par la chambre du conseil peuvent être soulevées à tout moment devant le tribunal statuant au fond.

Le tribunal constate cependant que Maître Fränk ROLLINGER se borne à exposer dans quelle mesure la procédure aurait été menée au détriment de son mandant, avec une illégalité des armes profitant au Ministère Public, sans cependant expliquer de quelle manière cette prétendue lésion des droits de son mandant lui ferait grief.

Il reste muet quant à d’éventuels devoirs qu’il aurait voulu accomplir si les délais, lui impartis pour assurer la défense, avaient été plus longs. Il est un fait que Maître Fränk ROLLINGER a consulté le dossier à quatre reprises, à savoir le 9 février 2007, le 4 avril 2007 et les 1er et 2 juillet 2009. Il s’ensuit que pendant quinze mois Maître Fränk ROLLINGER n’a pas pris inspection du dossier répressif.

Le tribunal remarque encore que Maître Fränk ROLLINGER a présenté une défense complète et exhaustive de son mandant devant le tribunal correctionnel.

Au vu de l’absence de grief invoqué et prouvé par le mandataire de B, il y a lieu de rejeter les moyens basés sur l’article 47 de la Charte des Droits fondamentaux de l’Union Européenne comme non fondés.

Le mandataire de B soutient encore que le délai raisonnable prévu à l’article 6 § 1. de la Convention Européenne des Droits de l’Homme et à l’article 47 de la  Charte des Droits fondamentaux de l’Union Européenne n’aurait pas été respecté en l’espèce, les faits remontant au 2 octobre 2006. Il conclut de ce chef à un allégement des peines à prononcer.

Le mandataire de C, Maître Alex PENNING se rallie à ces conclusions.

Aux termes de l’article 6 §1. de la Convention Européenne des Droits de l’Homme, « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial. »

L’article 47 de la Charte des Droits fondamentaux de l’Union Européenne reprend exactement les mêmes termes.

Cependant, ni l’article 6 § 1. de ladite Convention, ni l’article 47 de la  Charte des Droits fondamentaux de l’Union Européenne, ni une loi nationale ne précisent les effets que le juge du fond doit déduire d’un dépassement du délai raisonnable qu’il constaterait.

Il incombe à la juridiction de jugement d’apprécier, à la lumière des données de chaque affaire, si la cause est entendue dans un délai raisonnable, et, dans la négative, de déterminer les conséquences qui pourraient en résulter.

Pour rechercher s’il y a eu dépassement du délai raisonnable, il y a lieu d’avoir égard aux circonstances de la cause et aux critères consacrés par la jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l’Homme, en particulier la complexité de l’affaire, le comportement de ceux qui se prévalent d’un dépassement du délai raisonnable, et celui des autorités compétentes.

En ce qui concerne la période à prendre en considération pour apprécier un éventuel dépassement du délai raisonnable, il y a lieu de rappeler les principes tels qu’ils résultent de l’arrêt numéro 55/ 2008 du 4 décembre 2008 de la Cour de cassation luxembourgeoise (numéro 2572 du registre), qui a retenu que : « Mais attendu d’une part que le délai raisonnable en matière pénale ne concerne pas la période antérieure à l’inculpation ; que cette période ne peut être prise en compte que pour le calcul du délai de prescription ; que d’autre part l’appréciation du délai raisonnable qui vise la période pendant laquelle une personne poursuivie se trouve sous le coup d’une accusation relève du pouvoir d’appréciation souverain du juge du fond. »

Ainsi le point de départ de la période à prendre en considération pour l’appréciation du délai raisonnable en ce qui concerne B est à fixer au 30 janvier 2007, et en ce qui concerne C il est à fixer au 1er février 2007, dates de leurs inculpations respectives par le juge d’instruction.

Au vu des devoirs exécutés et des recours interjetés par les parties en cause, entre les dates d’inculpations et la date de clôture de l’instruction le 10 juillet 2008, il n’y a pas lieu de retenir un dépassement du délai raisonnable en ce qui concerne cette période.

Le réquisitoire du Ministère Public date du 27 avril 2009. Par ordonnance du 14 juillet 2009, la chambre du conseil du Tribunal d’arrondissement de Luxembourg a ordonné le renvoi de cinq des huit inculpés devant le tribunal correctionnel. Cette ordonnance de renvoi a été confirmée par arrêt de la chambre du conseil de la Cour d’Appel du 21 décembre 2009. Le recours en cassation de B a été déclaré irrecevable par arrêt du 15 juillet 2010 et la Cour a constaté la déchéance du pourvoi d’D par arrêt du 6 mai 2010.

La citation à prévenu date du 23 juillet 2010 et l’affaire au fond a finalement débuté le 11 octobre 2010.

Il s’ensuit qu’il y a une période d’inaction de la part du Ministère Public entre le 10 juillet 2008 et le 27 avril 2009, donc pendant plus de neuf mois.

Le tribunal constate que le dossier est volumineux, que de nombreux témoins ont été entendus et qu’à l’origine huit personnes avaient fait l’objet d’une inculpation. Les prévenus ayant tous refusé d’accepter une part de responsabilité dans le décès tragique de VICTIME et s’étant mutuellement chargés, de sorte qu’un certain délai a été indispensable au Ministère Public pour rédiger le réquisitoire.

Néanmoins, le tribunal estime que compte tenu des circonstances, une période d’inaction  de neuf mois constitue en l’espèce un léger dépassement du délai raisonnable.

Les conséquences de ce dépassement doivent être examinées sous l’angle de la preuve d’une part et sous l’angle de la sanction d’autre part. En effet, la durée anormale de la procédure peut avoir pour résultat la déperdition des preuves en sorte que le juge ne pourrait plus décider que les faits sont établis. Le dépassement du délai raisonnable peut aussi entraîner des conséquences dommageables pour le prévenu (Cass. Bel, 27 mai 1992, R.D.P. 1992, 998).

Si, comme en l’espèce, l’ancienneté des faits n’a pas eu d’influence sur l’administration de leur preuve, il convient cependant d’alléger, pour le cas où ils feront l’objet d’une condamnation, les peines à prononcer contre les prévenus, alors qu’ils ont dû accepter l’incertitude quant au sort de l’action publique pendant une période de quatre ans.

- quant aux infractions reprochées aux prévenus

Le Ministère Public reproche aux prévenus l’infraction d’homicide involontaire. Aux termes de l’article 418 du Code pénal, il faut que le mal ait été causé sans intention d’attenter à la personne d’autrui, par le défaut de prévoyance et de précaution.

L’article 418 du Code pénal exige donc :

1) une lésion corporelle ou un homicide ;

2) une faute et un lien de causalité entre la faute et le dommage ;

3) un défaut d’attenter volontairement à la personne d’autrui.

 

1) lésions corporelles ou homicide

En l’espèce cette condition est donnée, VICTIME étant décédé dans la maison relais.

2) la faute et le lien de causalité entre la faute et le dommage

Il y a lieu de rappeler qu'en ce qui concerne les préventions d'homicide ou de lésions involontaires des articles 418, 419 et 420 du Code pénal, le législateur a entendu punir toutes les formes de la faute, maladresse, imprudence, négligence ou inattention, quelque minime ou légère qu'elles soient (CONSTANT, Manuel de Droit Pénal, tome II, p.203).

Les mots « défaut de prévoyance ou de précaution » embrassent tous les cas de faute, la plus légère suffit.

La faute à considérer est donc la culpa levissima in abstracto. Celui qui est resté en défaut de prendre les mesures de prudence et de prévoyance que l’on doit attendre de l’homme normal, placé dans les mêmes conditions, peut se rendre coupable d’infraction aux articles 418 et suivants du Code pénal.

Il faut que le mal ait été causé par le défaut de prévoyance et de précaution. Mais la loi n’exige pas que l’agent ait été la cause directe et immédiate de l’homicide ou des blessures : il suffit que, par sa négligence ou son défaut de précaution, il les ait occasionnées. (SCHUIND, Traité pratique de droit criminel, Tome I, p. 389)

La faute du prévenu ne doit donc pas être la cause absolument immédiate de la blessure ou de la mort et elle ne doit pas non plus être la cause exclusive ou unique. Il suffit que le comportement du prévenu ait contribué, même pour une faible fraction à la réalisation du dommage, pour que les articles 418 à 420 soient applicables. Si plusieurs agissements fautifs ont concouru à l’atteinte à l’intégrité physique, tous les acteurs de ces agissements pourront être poursuivis.

En résumé on peut dire que toute faute qui a pour résultat involontaire des lésions corporelles est érigée en délit (Cass. belge, 13 janvier 1927, Pas., 1927, I, 122). 

En définitive, ce qui caractérise les délits d’homicide et de lésions corporelles involontaires, c’est l’existence d’un fait imputable à son auteur, fait constitutif d’un manque de prévoyance ou de précaution ayant pour résultat un homicide ou une lésion.  

Le Ministère Public reproche aux prévenus une série de comportements fautifs, qu’il y a lieu d’examiner successivement.

a) quant aux éducateurs

Le Ministère Public leur reproche :

- d’avoir, en tant que responsable, respectivement en tant qu’éducateurs travaillant quotidiennement dans les lieux, proposé la disposition de la salle et plus particulièrement l’installation d’un coin de jeux séparé du reste de la salle.

Il résulte des différents témoignages recueillis au cours de la procédure que l’aménagement des différentes pièces de la maison relais a été fait selon les desiderata des éducateurs.

Les trois éducateurs s’accordent à dire que l’idée de l’installation d’un coin de jeux séparé du reste de la salle émanait d’D, bien qu’ils aient également approuvé cette idée. C’était également la chargée de direction qui a fait, avec l’accord de l’Administration communale, la commande des espaliers suédois, des coussins et des matelas qui étaient disposés dans ce coin de jeux. Cette commande résulte en effet du bon de commande de « matériel didactique » pour le montant de 2.007,61 euros, signé par D le 1er août 2006. Le poste « espaliers suédois » figure sur la facture émise par la firme (…)  à l’Administration communale de (...)  le 1er septembre 2006.

Tant D, que B et A ont été présents au moment où les armoires, faisant par la suite fonction de séparation de pièce, ont été testées quant à leur stabilité. Ils ont donc au moins de façon indirecte proposé cette séparation et consenti à l’installation d’un coin de jeux séparé du reste de la salle. Si l’idée avait émané exclusivement d’D et que c’est elle qui a commandé et fait installer les espaliers suédois, il aurait appartenu aux deux éducateurs de refuser cette proposition au vu de sa dangerosité pour les enfants dont le comportement est imprévisible.

-  d’avoir toléré que les deux armoires furent posées, respectivement d’avoir posé les deux armoires en tant que séparation en plein milieu de la pièce.

Même si ni l’instruction, ni les déclarations recueillies lors des audiences au tribunal  correctionnel n’ont permis d’établir qui a posé les armoires à l’endroit où elles se trouvaient le 2 octobre 2006, il est un fait que tant D, B et A ont toléré cette position des armoires. En effet, ils ont travaillé pendant un mois quotidiennement dans les locaux de la maison relais et ont été en conséquence confronté tous les jours à la position de ces armoires. Même si au cours du mois de septembre 2006 les conditions météorologiques ont permis des activités en plein air, les prévenus reconnaissent avoir utilisé à plusieurs reprises la salle de jeux.

Au vu du fait qu’ils pouvaient exprimer leurs idées concernant l’aménagement intérieur des différentes pièces, ils auraient été libres à déplacer eux-mêmes les armoires respectivement de demander oralement ou par le biais d’une fiche technique le déplacement des armoires, dont la position devait nécessairement paraître, pour tout homme moyennement diligent, dangereuse.

Le tribunal retient donc qu’D, B et A ont toléré que les deux armoires fussent posées en tant que séparation en plein milieu de la pièce.

- d’avoir toléré que les deux armoires furent posées, respectivement d’avoir posé les deux armoires, dans la salle sans être solidement fixées afin d’éviter qu’elles ne puissent tomber.

Tous les prévenus, y compris les membres du service technique, s’accordent pour dire que les deux armoires restées dans la salle de jeux, après que tous les autres meubles ont été déménagés ou éliminés, ont fait l’objet d’un test de stabilité.

Il a également été indiqué clairement que les armoires ne pouvaient faire l’objet d’une fixation ni au sol, ni au plafond. Il s’ensuit que la question de la fixation a été un sujet  de discussion parmi les éducateurs, et qu’ils étaient conscients que la position des armoires au milieu de la salle de jeux pouvait présenter un risque pour la sécurité de tous les usagers de cette pièce. Les trois éducateurs allèguent qu’D a demandé au service technique de fixer les armoires entre elles.

Il est partant inconcevable que suite à cette demande expresse, aucun des trois éducateurs n’ait contrôlé s’il y avait été donné suite. Les armoires ont été utilisées quotidiennement alors que quelques jouets y avaient été rangés. Les éducateurs ont été gênés par les portes des armoires et ont sollicité, par le biais d’une fiche technique, leur enlèvement, mais ils n’ont pas vérifié si les armoires avaient été fixées entre elles. Sans se soucier ils sont partis de l’idée que les armoires avaient été fixées et qu’elles ne présenteraient aucun danger.

Il s’ensuit qu’D, B et A ont toléré que les deux armoires furent posées dans la salle sans être solidement fixées afin d’éviter qu’elles ne puissent tomber.

- d’avoir laissé les deux armoires en tant que séparation alors qu’elles n’étaient pas solidement fixées.

Tel qu’il a été développé ci-dessus, puisque l’aménagement avait été fait selon leurs desiderata, les éducateurs avaient été libres de déplacer eux-mêmes les armoires respectivement de demander leur déplacement.

Conscient du danger que cette séparation de pièce présentait, ils n’ont pas jugé utile de faire cet effort.

Les armoires, dont la position contrevenait à toutes les règles de bon sens, sont donc restées dans cette salle pendant plus d’un mois, au vu et au su des trois éducateurs.

Par conséquent le tribunal retient qu’D, B et A ont laissé les deux armoires en tant que séparation alors qu’elles n’étaient pas solidement fixées.

- d’avoir installé ou fait installer derrière les armoires des coussins sur lesquels les enfants se sont défoulés régulièrement en sautant de façon à pouvoir heurter les armoires.

Il est établi en cause que les coussins n’ont pas été installés par les éducateurs, mais qu’ils ont été commandés par D. D a, à l’origine voulu installer une zone de repos pour les enfants. Il est cependant difficilement imaginable comment une partie de la pièce dans laquelle sont installés des espaliers suédois et des coussins, puisse servir de zone de repos. Il paraît évident, même pour des non professionnels, que l’aménagement de cette partie de la salle de jeux a amené les enfants à se défouler et à se pousser mutuellement. Le fait qu’un des enfants heurte une des armoires par l’arrière a été prévisible et n’a été qu’une question de temps.

Même si B et A n’ont pas fait la commande de ce matériel, ils ont, en étant confronté quotidiennement à cet aménagement, consenti à celui-ci.

Il y a donc lieu de conclure qu’D, B et A  ont fait installer derrière les armoires des coussins sur lesquels les enfants se sont défoulés régulièrement en sautant de façon à pouvoir heurter les armoires.

- d’avoir toléré que ces armoires furent posées et restent posées en plein milieu de la pièce ne permettant ainsi plus à l’éducateur d’avoir un regard direct sur les enfants jouant derrière ces armoires, et par la même d’avoir toléré que les enfants jouant derrière ces armoires échappent à la surveillance momentanée ou permanente des éducateurs.

Il résulte des éléments du dossier et notamment des déclarations des trois éducateurs qu’ils n’ont pas été satisfaits de l’idée d’utiliser les armoires en tant que séparation de pièce en raison surtout de l’impossibilité en résultant pour surveiller de manière adéquate les enfants dans les deux parties de la salle. En effet, les armoires empêchaient une surveillance visuelle de tous les enfants présents.

Dans l’idée de remédier à ce problème, D a indiqué que l’éducateur chargé de la surveillance dans cette pièce devait rester sur une chaise placée du côté opposé de la porte d’entrée et permettant ainsi une vue sur l’ensemble de la pièce.

Or, il est de bon sens qu’un éducateur, chargé non seulement de la surveillance des enfants mais encore de faire des activités avec eux et devant intervenir en cas de besoin, ne peut rester assis de façon permanente sur cette chaise. A cela s’ajoute que la salle de jeux était celle qui était à proximité de la porte d’entrée de la maison relais et que les parents, venant récupérer leur enfant, demandaient nécessairement à l’éducateur dans la salle de jeux d’aller chercher leur enfant.

Il s’ensuit que la disposition des armoires ne permettait pas à l’éducateur de surveiller de manière adéquate et permanente les enfants.

Les trois éducateurs ayant travaillé dans les lieux pendant plus d’un mois au moment de l’accident de VICTIME,  n’ont rien entrepris pour remédier à cette situation.

Le tribunal retient donc qu’ils ont toléré que ces armoires furent posées et restent posées en plein milieu de la pièce ne permettant ainsi plus à l’éducateur d’avoir un regard direct sur les enfants jouant derrière ces armoires, et par la même d’avoir toléré que les enfants jouant derrière ces armoires échappent à la surveillance momentanée des éducateurs.

- d’avoir toléré que les enfants soient sans surveillance dans la salle des jeux, respectivement d’avoir laissé les enfants sans surveillance et en particulier comme en l’espèce le 2 octobre 2006 d’avoir quitté la salle de jeux pour accueillir les parents venant récupérer les enfants et d’avoir ainsi laissé les enfants sans surveillance et de la sorte de n’avoir pu constater qu’une des armoires allait tomber, voire de ne pas avoir pu intervenir pour éviter que cette armoire ne tombe et ne blesse mortellement un enfant.

Les éducateurs déclarent de façon unanime qu’D, en tant que chargée de direction, a organisé la répartition des tâches entre eux. Ainsi le jour de l’accident mortel de VICTIME A a été chargé de surveiller les enfants dans la salle de jeux et B devait s’occuper des devoirs en classe avec d’autres enfants.

Il résulte encore des éléments du dossier que l’accueil des parents n’avait pas été réglementé. Les parents demandaient soit au premier éducateur qu’ils apercevaient d’aller chercher l’enfant soit allaient eux-mêmes à la recherche de l’enfant dans les différentes pièces de la maison relais. Il paraît évident que l’éducateur faisant la surveillance dans la salle de jeux, en l’espèce A ne pouvait pas en même temps se rendre dans une autre pièce pour aller chercher un enfant et assurer une surveillance adéquate dans la salle de jeux.

Au vu de cette organisation et de cette répartition des tâches il a été impossible pour A d’assurer sa tâche avec le professionnalisme qu’une telle surveillance requiert.

Il aurait appartenu à D de s’occuper soit elle-même de l’accueil des parents soit de charger B respectivement la stagiaire témoin 8. En effet, il aurait été moins dangereux de laisser des enfants faisant des devoirs un moment sans surveillance que des enfants se défoulant derrière des armoires non fixées.

A pour sa part, n’aurait pas dû quitter la salle, ni au moment où une mère s’est fâchée avec ses enfants, ni au moment où témoin 3 est venu récupérer son fils M.D.

Par cette façon d’agir, tant D que A ont toléré que les enfants soient sans surveillance dans la salle des jeux. A a laissé les enfants sans surveillance le 2 octobre 2006 lorsqu’il a quitté la salle de jeux pour accueillir les parents venant récupérer les enfants. Il n’a dès lors pas pu constater qu’une des armoires allait tomber, et il n’a pas non plus pu intervenir pour éviter que cette armoire ne tombe et ne blesse mortellement un enfant.

B, n’ayant pas été présent dans la salle de jeux et n’étant pas responsable de la répartition des tâches entre les éducateurs, ce reproche ne saurait être retenu à son encontre.

b) Quant aux membres du service technique

1) quant à C

Il résulte d’une des pièces du dossier répressif que C a participé aves succès au courant de l’année 2005 à un séminaire de formation spéciale prévu par la loi modifiée du 19 mars 1988 concernant la sécurité dans la fonction publique et il est certifié que C est apte à remplir les fonctions de délégué à la sécurité dans la fonction publique aux termes de la législation précitée. Un certificat de qualification lui a été remis par le Ministre de la Fonction Publique et de la Réforme Administrative.

Aux termes des plaidoiries de son mandataire, les articles 6 et 8 de la loi concernant la sécurité dans la sécurité fonction publique ne permettraient pas au collège des bourgmestre et échevins de se décharger de sa responsabilité en matière de sécurité.

Or, le tribunal constate que ces textes ne sont pas de nature à exonérer le délégué à la sécurité de la responsabilité lui incombant de par ces fonctions.

En effet, l’article  99bis de la loi communale du 13 décembre 1988, telle qu'elle a été modifiée, dispose que  «Chaque commune de 10.000 habitants au moins est tenue d’avoir un service technique communal approprié comprenant au moins un homme de l’art conformément à l’article 28 (1) de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain engagé à titre de fonctionnaire ou employé de la carrière de l’architecte respectivement de l’ingénieur, ainsi qu’un ou plusieurs fonctionnaires de la carrière d’ingénieur technicien.

Le service technique communal a pour mission de veiller à l'application de la loi concernant l'aménagement communal et le développement urbain, de ses règlements d'exécution et en particulier du règlement sur les bâtisses, les sites et les voies publiques.

Il conseille à ces fins les communes dans l'application de la prédite loi en préparant et en contrôlant les aspects techniques des dossiers relatifs aux projets et plans d'aménagement en collaboration avec la personne qualifiée visée à l'alinéa 1 du présent article.»

L’article 11 de loi modifiée du 24 décembre 1985 fixant le statut général des fonctionnaires communaux dispose que :

« 1. Le fonctionnaire est tenu de se conformer consciencieusement aux lois et règlements qui déterminent les devoirs que l’exercice de ses fonctions lui impose. Il doit de même se conformer aux instructions du collège des bourgmestre et échevins qui ont pour objet l’accomplissement régulier de ses devoirs ainsi qu’aux ordres de service de ses supérieurs.

2. Le fonctionnaire est responsable de l’exécution des tâches qui lui sont confiées; il doit prêter aide à ses collègues dans la mesure où l’intérêt du service l’exige; la responsabilité de ses subordonnés ne le dégage d’aucune des responsabilités qui lui incombent.

3. Il est tenu de veiller à ce que les fonctionnaires placés sous ses ordres accomplissent les devoirs qui leur incombent, et d’employer, le cas échéant, les moyens de discipline mis à sa disposition. »

Il s’ensuit que C, en tant que délégué à la sécurité, ne saurait se décharger des responsabilités lui incombant en vertu des textes légaux. Il y a partant lieu d’examiner les différents comportements fautifs lui reprochés par le Ministère Public.

- d’avoir toléré, respectivement de ne pas s’être opposé que les deux armoires furent posées, respectivement d’avoir posé les deux armoires dans la salle de jeux sans être solidement fixées afin d’éviter qu’elles ne tombent.

En qualité de délégué à la sécurité, il devait nécessairement avoir les connaissances suffisantes pour juger que deux armoires placées au milieu d’une salle sans être fixées d’aucune façon ne peuvent correspondre aux critères minimaux de sécurité. Il reconnaît avoir été présent au moment où les armoires ont été examinées quant à leur stabilité. Il n’est pas établi qui a placé les armoires au milieu de la pièce, mais il est un fait que C a vu que les armoires avaient été déplacées du mur et posés au milieu de la pièce. Néanmoins il s’est abstenu d’émettre la moindre critique.

Il lui aurait appartenu de veiller à ce que les armoires, après le test de stabilité, soient à nouveau placées contre un mur et fixées à ce mur. Il ne s’est pas renseigné auprès des éducateurs de la destination des armoires.

En omettant de prendre ses responsabilités et en se désintéressant de ces armoires, C a toléré que les deux armoires furent posées dans la salle de jeux sans être solidement fixées afin d’éviter qu’elles ne tombent.

- de ne pas avoir contrôlé la disposition des lieux, la solidité et la fixation des matériaux avant le commencement de la maison relais.

C reconnaît ne pas avoir pris inspection des lieux ni avant l’ouverture de la maison relais le 1er septembre 2006, ni entre cette date et le 2 octobre 2006. Il prétend qu’un tel contrôle n’était pas nécessaire alors qu’aucun problème ne lui avait été signalé.

Or, à cet égard il y a lieu de rappeler qu’il n’appartient pas à un délégué à la sécurité d’attendre que des problèmes de sécurité surgissent et lui soient notifiés, mais il doit lui-même veiller à ce que la sécurité des usagers des bâtiments communaux et en l’espèce de la maison relais soit garantie de manière permanente.

Le tribunal retient donc que C n’a pas contrôlé la disposition des lieux, la solidité et la fixation des matériaux avant le commencement de la maison relais.

- de ne pas avoir fixé, respectivement de ne pas avoir fait fixer les armoires pour garantir la sécurité des enfants.

Il est établi en cause que C a été présent lors du test de stabilité des armoires. Il a donc pu constater qu’à ce moment les armoires n’avaient été fixées d’aucune façon. Il lui aurait partant appartenu, après qu’il avait été décidé de garder ces deux armoires, de les fixer soit lui-même soit de les faire fixer. Même à supposer qu’il n’avait pas été au courant que les armoires devaient faire fonction de séparation de pièce, il aurait dû veiller à ce qu’elles soient fixées. Aux termes de la déclaration du témoin 6, ce type d’armoire avait été conçu pour être fixé.

Cette mesure de sécurité élémentaire devait être connue par un délégué à la sécurité.

Il s’ensuit que C n’a pas fixé, respectivement n’a pas fait fixer les armoires pour garantir la sécurité des enfants.

2) quant à E

Le Ministère Public lui reproche :

- d’avoir posé les deux armoires dans la salle de jeux en plein milieu de la pièce.

Tel qu’il a été développé ci-dessus, ni l’enquête menée en cause, ni le procès devant le tribunal correctionnel, n’ont permis de déterminer qui a posé les armoires dans la position dans laquelle elles étaient le jour de l’accident du 2 octobre 2006.

Ce fait ne pourra partant pas été reproché à E, ni être retenu à son encontre.

- de ne pas avoir fixé les armoires solidement afin d’éviter qu’elles ne tombent.

Aux termes des déclarations des éducateurs, D a donné l’instruction aux membres du service technique de fixer les armoires entre elles. Tant  E  que C contestent qu’une telle instruction leur aurait été donnée.

A cela s’ajoute qu’il résulte encore de la déposition du témoin Témoin 1  à l’audience du 14 octobre 2010 que E ne pouvait prendre seul des décisions. Il travaillait sous les ordres de ses supérieurs hiérarchiques.

Les différents éléments du dossier n’ont pas permis d’établir à suffisance de droit que E avait été chargé de fixer les armoires. Ce doute devant lui profiter, de sorte que ce comportement fautif ne saurait pas non plus être retenu à son encontre.

Au vu des développements qui précèdent il y a lieu d’acquitter E de l’infraction non établie à son encontre.

3) un défaut d’attenter volontairement à la personne d’autrui

Le troisième élément, le défaut d’attenter volontairement à la personne d’autrui est également donné en l’occurrence en ce qui concerne les prévenus D, B, A et C.

E est partant acquitté :

« Comme auteur, coauteur d’un crime ou d’un délit ;

De l’avoir exécuté ou d’avoir coopéré directement à son exécution ;

D’avoir, par un fait quelconque, prêté pour l’exécution une aide telle que, sans son assistance, le crime ou le délit n’eût pu être commis ;

D’avoir, par dons, promesses, menaces, abus d’autorité ou de pouvoir, machinations ou artifices coupables, directement provoqué à ce crime ou à ce délit ;

D’avoir, soit par des discours tenus dans des réunions ou dans des lieux publics, soit par des placards affichés, soit par des écrits imprimés ou non et vendus ou distribués, provoqué directement à le commettre ;

Comme complice d’un crime ou d’un délit ;

D’avoir donné des instructions pour le commettre ;

D’avoir procuré des armes, des instruments ou tout autre moyen qui a servi au crime ou au délit sachant qu’ils devaient y servir ;

D’avoir avec connaissance, aidé ou assisté l’auteur ou les auteurs du crime ou du délit dans les faits qui l’ont préparé ou facilité, ou dans ceux qui l’ont consommé ;

le 2 octobre 2006, vers 18h00, à (...) , 1 rue des Vergers, maison relais de l’école primaire « Sepp Hansen »,

d’avoir involontairement causé la mort d’une personne,

en l’espèce, d’avoir involontairement causé la mort de G.R.L., né le (...)  à Luxembourg, par le comportement fautif :

- d’avoir posé les deux armoires dans la salle de jeux en plein milieu de la pièce ;

- de ne pas avoir fixé les armoires solidement afin d’éviter qu’elles ne tombent ;

sans préjudice quant à d’autres comportements fautifs. »

Tel qu’il a développé ci-avant il y a lieu de retenir D, B, A et C dans le lien de l’infraction d’homicide involontaire par les comportements fautifs examinés.

D est convaincue :

comme auteur ayant elle-même commis l’infraction,

le 2 octobre 2006, vers 18h00, à (...) , dans la maison relais de l’école primaire « Sepp Hansen »,

d’avoir involontairement causé la mort d’une personne,

en l’espèce, d’avoir involontairement causé la mort de VICTIME né le (...)  à Luxembourg,

par les comportements fautifs suivants :

- d’avoir, en tant que responsable, travaillant quotidiennement dans les lieux, proposé la disposition de la salle et plus particulièrement l’installation d’un coin de jeux séparé du reste de la salle ;

- d’avoir toléré que les deux armoires furent posées en tant que séparation en plein milieu de la pièce ;

- d’avoir toléré que les deux armoires furent posées dans la salle sans être solidement fixées afin d’éviter qu’elles ne puissent tomber ;

- d’avoir laissé les deux armoires en tant que séparation alors qu’elles n’étaient pas solidement fixées ;

- d’avoir fait installer derrière les armoires des coussins sur lesquels les enfants se sont défoulés régulièrement en sautant de façon à pouvoir heurter les armoires ;

- d’avoir toléré que ces armoires furent posées et restent posées en plein milieu de la pièce ne permettant ainsi plus à l’éducateur d’avoir un regard direct sur les enfants jouant derrière ces armoires, et par la même d’avoir toléré que les enfants jouant derrière ces armoires échappent à la surveillance momentanée des éducateurs ;

- d’avoir toléré que les enfants soient sans surveillance dans la salle des jeux.

B est convaincu :

comme auteur ayant lui-même commis l’infraction,

le 2 octobre 2006, vers 18h00, à (...) , dans la maison relais de l’école primaire « Sepp Hansen »,

d’avoir involontairement causé la mort d’une personne,

en l’espèce, d’avoir involontairement causé la mort de VICTIME  né le (...)  à Luxembourg,

par les comportements fautifs suivants :

- d’avoir, en tant qu’éducateur travaillant quotidiennement dans les lieux, proposé la disposition de la salle et plus particulièrement l’installation d’un coin de jeux séparé du reste de la salle ;

- d’avoir toléré que les deux armoires furent posées en tant que séparation en plein milieu de la pièce ;

- d’avoir toléré que les deux armoires furent posées dans la salle sans être solidement fixées afin d’éviter qu’elles ne puissent tomber ;

- d’avoir laissé les deux armoires en tant que séparation alors qu’elles n’étaient pas solidement fixées ;

- d’avoir fait installer derrière les armoires des coussins sur lesquels les enfants se sont défoulés régulièrement en sautant de façon à pouvoir heurter les armoires ;

- d’avoir toléré que ces armoires furent posées et restent posées en plein milieu de la pièce ne permettant ainsi plus à l’éducateur d’avoir un regard direct sur les enfants jouant derrière ces armoires, et par la même d’avoir toléré que les enfants jouant derrière ces armoires échappent à la surveillance momentanée des éducateurs.

A est convaincu :

comme auteur ayant lui-même commis l’infraction,

le 2 octobre 2006, vers 18h00, à (...) , dans la maison relais de l’école primaire « Sepp Hansen »,

d’avoir involontairement causé la mort d’une personne,

en l’espèce, d’avoir involontairement causé la mort de VICTIME  né le (…) à Luxembourg,

par les comportements fautifs suivants :

- d’avoir, en tant qu’éducateur travaillant quotidiennement dans les lieux, proposé la disposition de la salle et plus particulièrement l’installation d’un coin de jeux séparé du reste de la salle ;

- d’avoir toléré que les deux armoires furent posées en tant que séparation en plein milieu de la pièce ;

- d’avoir toléré que les deux armoires furent posées dans la salle sans être solidement fixées afin d’éviter qu’elles ne puissent tomber ;

- d’avoir laissé les deux armoires en tant que séparation alors qu’elles n’étaient pas solidement fixées ;

- d’avoir fait installer derrière les armoires des coussins sur lesquels les enfants se sont défoulés régulièrement en sautant de façon à pouvoir heurter les armoires ;

- d’avoir toléré que ces armoires furent posées et restent posées en plein milieu de la pièce ne permettant ainsi plus à l’éducateur d’avoir un regard direct sur les enfants jouant derrière ces armoires, et par la même d’avoir toléré que les enfants jouant derrière ces armoires échappent à la surveillance momentanée des éducateurs ;

- d’avoir toléré que les enfants soient sans surveillance dans la salle des jeux, et d’avoir laissé les enfants sans surveillance le 2 octobre 2006 d’avoir quitté la salle de jeux pour accueillir les parents venant récupérer les enfants et d’avoir ainsi laissé les enfants sans surveillance et de la sorte de n’avoir pu constater qu’une des armoires allait tomber, et de ne pas avoir pu intervenir pour éviter que cette armoire ne tombe et ne blesse mortellement un enfant.

C est convaincu :

comme auteur ayant lui-même commis l’infraction,

le 2 octobre 2006, vers 18h00, à (...) , dans la maison relais de l’école primaire « Sepp Hansen »,

d’avoir involontairement causé la mort d’une personne,

en l’espèce, d’avoir involontairement causé la mort de VICTIME  né le (...)  à Luxembourg,

par les comportements fautifs suivants :

- d’avoir toléré que les deux armoires furent posées dans la salle de jeux sans être solidement fixées afin d’éviter qu’elles ne tombent ;

- de ne pas avoir contrôlé la disposition des lieux, la solidité et la fixation des matériaux avant le commencement de la maison relais ;

- de ne pas avoir fixé, respectivement de ne pas avoir fait fixer les armoires pour garantir la sécurité des enfants.

 

L’article 419 du Code pénal dispose : « quiconque aura involontairement causé la mort d’une personne sera puni d’une peine d’emprisonnement de trois mois à deux an et d’une amende de 500 à 10.000 euros.»

En ce qui concerne les peines à prononcer, le tribunal constate d’une part que les quatre prévenus regrettent profondément les faits et n’ont évidemment pas voulu le décès de VICTIME  mais d’autre part il n’en reste pas moins que par leur négligence grave voire leur insouciance respectivement leur désintéressement, ils ont chacun, pour sa part contribué, au dommage à se réaliser.

Il est également choquant de voir qu’aucun des prévenus n’accepte même pour une minime fraction une part de responsabilité dans l’accident tragique. Ils réfutent leur responsabilité soit sur les autres prévenus soit sur le bourgmestre ou les échevins malgré la décision de non-lieu intervenue en cause.

 

D, en tant que chargée de direction et donc de responsable de la maison relais, n’a pas réalisé quelle responsabilité était attachée à sa fonction. Elle a fait preuve d’un manque de professionnalisme frappant. Elle a commis des fautes non seulement en tolérant l’aménagement tel qu’il a été fait, mais encore dans la gérance même de la maison relais et de la répartition des tâches entre les éducateurs.

Au vu des éléments du dossier et des comportements fautifs retenus, le tribunal condamne D à une peine d'emprisonnement de 12 mois et à une amende de 6.000 euros.

D n'a pas subi jusqu'à ce jour de condamnation excluant le sursis à l'exécution des peines et elle ne semble pas indigne de l'indulgence du tribunal; il échet en conséquence de lui accorder la faveur du sursis intégral quant à la peine d’emprisonnement.

B et A ne se sont pas posés de question quant aux conditions dans lesquelles ils ont accomplis leur tâche en laissant l’insouciance l’emporter sur la rigueur. Certes c’était leur premier contrat de travail, mais néanmoins ils auraient dû s’opposer à ce que les armoires soient utilisées comme séparation de pièce. Il devait résulter du bon sens que cette solution présentait un risque d’accident certain. Ils ont omis de vérifier la fixation et A a laissé les enfants sans surveillance dans la salle de jeux.

Le tribunal condamne B et A chacun à une peine d'emprisonnement de 10 mois et à une amende de 5.000 euros.

B et A n'ont pas subi jusqu'à ce jour de condamnation excluant le sursis à l'exécution des peines et ils ne semblent pas indignes de l'indulgence du tribunal; il échet en conséquence de leur accorder la faveur du sursis intégral quant à la peine d’emprisonnement.

C ne semble pas non plus conscient des obligations qui lui incombaient en tant que délégué à la sécurité. Il a omis de prendre ses responsabilités et de vérifier l’état des lieux avant l’ouverture de la maison relais. Il a fait preuve de négligences graves ayant directement contribué à l’accident mortel de VICTIME.

Le tribunal condamne C du chef de l’infraction retenue à sa charge à une peine d'emprisonnement de 12 mois et à une amende de 6.000 euros.

C n'a pas subi jusqu'à ce jour de condamnation excluant le sursis à l'exécution des peines et il ne semble pas indigne de l'indulgence du tribunal; il échet en conséquence de lui accorder la faveur du sursis intégral quant à la peine d’emprisonnement.

 

Au civil :

A l’audience du 13 octobre 2010, Maître Anne-Laure JABIN, avocat à la Cour, assisté de Georges GUDENBURG, avocat, en remplacement de Maître Pierre METZLER, avocat à la Cour, demeurant tous les trois à Luxembourg, se constitua partie civile au nom et pour compte de Laurindo GARCIA RODRIGUES et d’Y préqualifiées, demandeurs au civil, contre les prévenus A, B, C, D et E, préqualifiés, défendeurs au civil.

Cette partie civile déposée sur le bureau du tribunal correctionnel de Luxembourg est conçue comme suit :

Il y a lieu de donner acte aux demandeurs au civil de leurs constitutions de partie civile.

Le tribunal est compétent pour en connaître pour autant qu’elle est dirigée contre les prévenus D, B, A et C, eu égard à la décision à intervenir au pénal à l'égard des prévenus.

Au vu de l’acquittement au pénal de E, le tribunal est incompétent pour connaître de la demande au civil pour autant qu’elle est dirigée contre E.

Les demandeurs au civil agissant en leur qualité de représentants légaux sinon d’héritiers de VICTIME  réclament en premier lieu réparation du préjudice matériel de leur fils mineur qu’ils évaluent à 150.000 euros et réparation du préjudice moral résultant des souffrances endurées à 350.000 euros.

Les demandeurs au civil, en tant que victimes par ricochet, réclament encore chacun le montant de 10.000 euros du chef des frais funéraires et des frais médicaux et le montant de 150.000 euros à titre de réparation du préjudice moral subi.

Maître Gaston VOGEL, assurant la défense au civil d’D, ayant sollicité l’acquittement de sa mandante, conclut à titre principal à l’irrecevabilité de la partie civile. A titre subsidiaire, il demande au tribunal à revoir à la baisse, les montants réclamés par les demandeurs au civil.

Maître Franz SCHILTZ a déclaré sur question spéciale du tribunal ne pas avoir de conflit d’intérêt pour assurer la défense au civil de tous les défendeurs au civil.

Il conclut principalement à l’irrecevabilité des demandes civiles sur base de l’article 115 du Code de la sécurité sociale.

Les articles 1er et 3 du Code d’instruction criminelle permettent à la victime d’agir devant les tribunaux répressifs en vue de la réparation de son dommage causé par l’infraction.

En application de ces dispositions, la victime peut en principe procéder devant les juridictions répressives à condition qu’elle ait subi un dommage personnel et individuel, qui résulte directement et par un lien de causalité de l’infraction retenue à charge du prévenu dans les conditions déterminées par le Code pénal ou par des lois spéciales.

Contrairement au principe général, le Code de la sécurité sociale dispose dans son article 115 notamment que « les personnes visées aux articles 85, 86 et 90, leurs ayants droit et leurs héritiers, même s’ils n’ont aucun droit à prestation, ne peuvent, en raison de l’accident, agir judiciairement en dommages et intérêts contre leur employeur ou la personne pour compte de laquelle ils exercent une activité, ni dans le cas d’un travail connexe ou d’un travail non connexe exercé en même temps et sur le même lieu, contre tout autre employeur ou toute autre personne visée aux articles précités, à moins qu’un jugement pénal n’ait déclaré les défendeurs coupables d’avoir provoqué intentionnellement l’accident.»

Aux termes de l’article 90 du Code de la sécurité sociale ces dispositions sont applicables entre autres:

1) aux écoliers, élèves et étudiants admis à l’enseignement précoce, préscolaire, scolaire et universitaire, y compris les activités péripréscolaires, périscolaires et périuniversitaires, à définir par règlement grand-ducal, aux enfants âgés de moins de six ans accueillis dans un organisme agréé en vertu de la loi du 8 septembre 1998 réglant les relations entre l’Etat et les organismes œuvrant dans les domaines social, familial et thérapeutique ainsi qu’aux chargés de cours, moniteurs et surveillants non assurés au titre de l’article 85 sous 1) ou de l’article 95, alinéa 2.

Cette disposition, refusant à une catégorie de personnes d’agir conformément au droit commun, fait partie d’un ensemble de dispositions réglant le fonctionnement de l’institution des assurances sociales et notamment de l’assurance contre les accidents, dont le but principal est d’assurer la subsistance de la victime d’un accident de travail et celle de sa famille, garantissant aux bénéficiaires une indemnisation forfaitaire tout en les excluant du droit d’agir en réparation de leur préjudice selon le droit commun.

Il y a lieu de constater que VICTIME a été inscrit dans la maison relais de l’école primaire Sepp Hansen de (...) .

Dans la mesure où cette maison relais propose l’activité d’accueil socio-éducatif temporaire sans hébergement d’enfants de moins de 18 ans et accueille donc les enfants admis à l’enseignement précoce, préscolaire et scolaire de (...) , le tribunal constate que VICTIME  en fréquentant cette structure, doit être considéré comme un élève ayant bénéficié d’activités périscolaires.

A cela s’ajoute qu’il résulte d’une pièce versée en cause par Maître Franz SCHILTZ que l’accident du 2 octobre 2006 a été reconnu par l’Association d’Assurance contre les Accidents qui a viré en date du 9 novembre 2006 une indemnité funéraire à Y. Il s’ensuit que l’article 115 précité du Code de la sécurité sociale trouve à s’appliquer au présent litige.

Par conséquent le tribunal ne peut que constater que les demandeurs au civil sont irrecevables à agir en dommages et intérêts du chef du décès de VICTIME contre les prévenus D, B, A et C devant le tribunal correctionnel.

 

P a r   c e s   m o t i f s  :

 

le tribunal d'arrondissement de et à Luxembourg, seizième chambre, siégeant en matière correctionnelle, statuant contradictoirement, D, B, A, C et E et leurs mandataires entendus en leurs explications et moyens de défense tant au pénal qu’au civil, les mandataires des demandeurs au civil entendus en leurs explications et la représentante du Ministère Public entendue en son réquisitoire,

 

Au pénal :

r e j e t t e  les moyens de procédure soulevés par le mandataire de B ;

a c q u i t t e  E du chef de l'infraction non retenue à sa charge ;

c o n d a m n e  D du chef de l'infraction retenue à sa charge à une peine d'emprisonnement de douze (12) mois et

à une amende de six mille (6.000) euros, ainsi qu'aux frais de sa mise en jugement, ces frais liquidés à 142,10 euros;

f i x e  la  durée de la contrainte par corps en cas de non-paiement de l'amende à cent vingt (120) jours;

 d i t  qu'il sera sursis à l'exécution de l’intégralité de la peine d’emprisonnement;

a v e r t i t D qu’au cas où, dans un délai de cinq ans à dater du présent jugement, elle aura commis une nouvelle infraction ayant entraîné une condamnation à une peine privative de liberté ou à une peine plus grave pour crimes ou délits de droit commun, la peine de prison prononcée ci-devant sera exécutée sans confusion possible avec la nouvelle peine et que les peines de la récidive seront encourues dans les termes de l’article 56 al. 2 du Code pénal;

 

c o n d a m n e  B du chef de l'infraction retenue à sa charge à une peine d'emprisonnement de dix (10) mois et

à une amende de cinq mille (5.000) euros, ainsi qu'aux frais de sa mise en jugement, ces frais liquidés à 142,10 euros;

f i x e  la  durée de la contrainte par corps en cas de non-paiement de l'amende à cent (100) jours;

d i t  qu'il sera sursis à l'exécution de l’intégralité de la peine d’emprisonnement;

a v e r t i t B qu’au cas où, dans un délai de cinq ans à dater du présent jugement, il aura commis une nouvelle infraction ayant entraîné une condamnation à une peine privative de liberté ou à une peine plus grave pour crimes ou délits de droit commun, la peine de prison prononcée ci-devant sera exécutée sans confusion possible avec la nouvelle peine et que les peines de la récidive seront encourues dans les termes de l’article 56 al. 2 du Code pénal;

 

c o n d a m n e  A du chef de l'infraction retenue à sa charge à une peine d'emprisonnement de dix (10) mois et

à une amende de cinq mille (5.000) euros, ainsi qu'aux frais de sa mise en jugement, ces frais liquidés à 142,10 euros;

f i x e  la  durée de la contrainte par corps en cas de non-paiement de l'amende à cent  (100) jours;

d i t  qu'il sera sursis à l'exécution de l’intégralité de la peine d’emprisonnement;

a v e r t i t A qu’au cas où, dans un délai de cinq ans à dater du présent jugement, il aura commis une nouvelle infraction ayant entraîné une condamnation à une peine privative de liberté ou à une peine plus grave pour crimes ou délits de droit commun, la peine de prison prononcée ci-devant sera exécutée sans confusion possible avec la nouvelle peine et que les peines de la récidive seront encourues dans les termes de l’article 56 al. 2 du Code pénal;

 

c o n d a m n e  C du chef de l'infraction retenue à sa charge à une peine d'emprisonnement de douze (12) mois et

à une amende de six mille (6.000) euros, ainsi qu'aux frais de sa mise en jugement, ces frais liquidés à 142,10 euros;

f i x e  la  durée de la contrainte par corps en cas de non-paiement de l'amende à cent vingt (120) jours;

d i t  qu'il sera sursis à l'exécution de l’intégralité de la peine d’emprisonnement;

a v e r t i t C qu’au cas où, dans un délai de cinq ans à dater du présent jugement, il aura commis une nouvelle infraction ayant entraîné une condamnation à une peine privative de liberté ou à une peine plus grave pour crimes ou délits de droit commun, la peine de prison prononcée ci-devant sera exécutée sans confusion possible avec la nouvelle peine et que les peines de la récidive seront encourues dans les termes de l’article 56 al. 2 du Code pénal;

c o n d a m n e D, B, A et C solidairement aux frais pour l'infraction commise ensemble.

 

Au civil :

d o n n e  acte  aux demandeurs au civil de leurs constitutions de partie civile;

se  d é c l a r e  compétent pour en connaître pour autant qu’elles sont dirigées contre D, B, A et C ;

se  d é c l a r e  incompétent pour en connaître pour autant qu’elles sont dirigées contre E ;

d é c l a r e  les demandes irrecevables;

c o n d a m n e  les demandeurs au civil aux frais de ces demandes civiles.

 

Par application des articles 14, 15, 16, 28, 29, 30, 50, 66, 418 et 419 du Code pénal; 3, 154, 155, 179, 182, 184, 189, 190, 190-1, 191, 194, 195, 196, 628 et 628-1 du Code d'instruction criminelle ainsi que des articles 90 et 115 du Code de la Sécurité Sociale qui furent désignés à l'audience par la vice-présidente.

Ainsi fait et jugé par Marie-Laure MEYER, vice-présidente, Henri BECKER et Joëlle GEHLEN, premiers juges, et prononcé par la vice-présidente en audience publique au Palais de Justice à Luxembourg, en présence de St. NEUEN, 1er substitut du procureur d’Etat et de Maïté LOOS, greffière, qui, à l'exception du représentant du Ministère Public, ont signé le présent jugement.

 

Contre le jugement numéro 3310/2010 du 13 octobre 2010, appel fut relevé au greffe du tribunal d’arrondissement de Luxembourg en date du 23 novembre 2010 par Maître Frank ROLLINGER, avocat à la Cour, demeurant à Luxembourg pour et au nom du prévenu et défendeur au civil B.

Contre le jugement numéro 3799/2010 du 18 novembre 2010 appel au pénal fut relevé au greffe du tribunal d’arrondissement de Luxembourg en date du 19 novembre 2010 par Maître Frédéric MIOLI, en remplacement de Maître Gaston VOGEL, avocats à la Cour, les deux demeurant à Luxembourg, pour et au nom de la prévenue et défenderesse au civil D.

Le 23 novembre 2010 appel au pénal et au civil fut relevé au greffe du tribunal d’arrondissement de Luxembourg par Maître Frank ROLLIGER, avocat à la Cour, demeurant à Luxembourg, pour et au nom du prévenu et défendeur au civil B.

Le 9 décembre 2010 appel au pénal fut relevé au greffe du tribunal d’arrondissement de Luxembourg par Maître Alex PENNING, avocat à la Cour, demeurant à Luxembourg, pour et au nom du prévenu et défendeur au civil C.

Le 24 décembre 2010 appel au civil fut relevé au greffe du tribunal d’arrondissement de Luxembourg par Maître Franck GREFF, en remplacement de Maître Pierre METZLER, avocats à la Cour, les deux demeurant à Luxembourg, pour et au nom des demandeurs au civil X et Y.

Le 27 décembre 2010 appel fut relevé au greffe du tribunal d’arrondissement de Luxembourg par le représentant du ministère public.

En vertu de ces appels et par citation du 3 mars 2011, les parties furent requises de comparaître aux audiences publiques des 2 et 4 mai 2011 devant la Cour d’appel de Luxembourg, dixième chambre, siégeant en matière correctionnelle, pour y entendre statuer sur le mérite des appels interjetés.

A l’audience du 2 mai 2011 les prévenus et défendeurs au civil D, B, C et E furent entendus en leurs déclarations personnelles.

Maître Liliane DAVID-SCHLANGER, avocat à la Cour, demeurant à Luxembourg, demanda à être autorisée à représenter le prévenu et défendeur au civil A . Elle fut autorisée à ce  faire.

Maître Anne-Laure JABIN, en remplacement de Maître Pierre METZLER, avocats à la Cour, les deux demeurant à Luxembourg, comparant pour les demandeurs au civil X et Y fut entendue en ses conclusions.

Maître Franz SCHILTZ, avocat à la Cour, demeurant à Luxembourg, exposa les moyens au civil des défendeurs au civil Jérôme A, D, B, C et E.

Ensuite, l’affaire fut remise contradictoirement au 4 mai 2011.

A cette audience le prévenu et défendeur au civil C fut entendu en ses déclarations personnelles.

Maître Gaston VOGEL, avocat à la Cour, demeurant à Luxembourg, développa plus amplement les moyens d’appel et de défense de la prévenue et défenderesse au civil D.

Maître Frank ROLLINGER, avocat à la Cour, demeurant à Luxembourg, développa plus amplement les moyens d’appel et de défense du prévenu et défendeur au civil B.

Maître Alex PENNING, avocat à la Cour, demeurant à Luxembourg, développa plus amplement les moyens d’appel et de défense du prévenu et défendeur au civil C.

Maître Liliane DAVID-SCHLANGER, en remplacement de Maître Anne-Marie SCHMIT, avocats à la Cour, les deux demeurant à Luxembourg, développa plus amplement les moyens de défense du prévenu et défendeur au civil A.

Maître Philippe PENNING, avocat à la Cour, demeurant à Luxembourg, développa plus amplement les moyens de défense du prévenu et défendeur au civil E.

L’affaire fut remise contradictoirement au 16 mai 2011.

A cette audience, Monsieur le procureur général d’Etat Robert BIEVER, assumant les fonctions de ministère public, fut entendu en son réquisitoire.

Maître Alex PENNING, avocat à la Cour, demeurant à Luxembourg, répliqua au pénal.

Maître Franz SCHILTZ et Maître Anne-Laure JABIN, avocats à la Cour, les deux demeurant à Luxembourg, répliquèrent au civil.

 

La Cour prit l’affaire en délibéré et fixa le prononcé à l’audience du 22 juin 2011.

 

A l’audience du 30 mai 2011 la Cour ordonna la rupture du délibéré et refixa l’affaire à l’audience du mercredi 8 juin 2011 afin de permettre au mandataire de B et à Monsieur le procureur général d’Etat de se prononcer sur la recevabilité de l’appel interjeté le 23 novembre 2010 contre le jugement du 13 octobre 2010, au regard des dispositions de l’article 203, alinéa 1, du code d’instruction criminelle.

A l’audience du 8 juin 2011 Maître Frank ROLLINGER, avocat à la Cour, demeurant à Luxembourg, conclut à la recevabilité de l’appel du prévenu et défendeur au civil B.

Madame le premier avocat général Martine SOLOVIEFF, assumant les fonctions de ministère public, fut entendue en son réquisitoire.

 

L A     C O U R

 

prit l'affaire en délibéré et rendit à l'audience publique du 22 juin 2011, à laquelle le prononcé avait été fixé, l'arrêt qui suit:

Revu le jugement rendu le 13 octobre 2010 par le tribunal d’arrondissement de Luxembourg, décision dont la motivation et le dispositif se trouvent reproduits aux qualités du présent arrêt.

Ce jugement a été entrepris le 23 novembre 2010 par l’appel interjeté au greffe du tribunal d’arrondissement de Luxembourg par le mandataire du prévenu et défendeur au civil B.

A défaut de citation à l’audience, le mandataire de B a déclaré comparaître volontairement à l’audience de la Cour pour voir statuer sur le mérite de cet appel.

Revu le jugement rendu le 18 novembre 2010 par le même tribunal, décision qui se trouve également reproduite aux qualités du présent arrêt.

Ce jugement a été  entrepris :

 - le 19 novembre 2010 par l’appel au pénal interjeté au greffe du tribunal d’arrondissement de Luxembourg par le mandataire de la prévenue et défenderesse au civil D,

 - le 23 novembre 2010 par l’appel au pénal et au civil interjeté au même greffe par le mandataire du prévenu et défendeur au civil B,

 - le 9 décembre 2010 par l’appel au pénal interjeté au même greffe par le mandataire du prévenu et défendeur au civil C,

 - le 24 décembre 2010 par l’appel au civil interjeté au même greffe par le mandataire des demandeurs au civil X et Y,

 - le 27 décembre 2010 par l’appel général déposé au même greffe par le représentant du ministère public.

Dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, il y a lieu de joindre pour cause de connexité, les appels dirigés contre les deux jugements du 13 octobre 2010 et du 18 novembre 2010 pour y statuer par un seul et même arrêt.

A l’audience de la Cour, A ne s’est pas présenté personnellement. Son mandataire a demandé à le représenter. En application de l’article 185 (1) du code d’instruction criminelle, il y a lieu de faire droit à cette demande.

Quant à la procédure

L’appel au civil de B contre le jugement du 18 novembre 2010 est à déclarer irrecevable pour défaut d’intérêt, étant donné que, tel qu’il sera constaté ci-après, la demande civile dirigée contre tous les défendeurs, dont B, a été déclarée irrecevable.

En ce qui concerne l’appel dirigé contre le jugement du 13 octobre 2010, il  est vrai qu’il a été déclaré le 23 novembre 2010, soit le 41e jour après le prononcé du jugement, de sorte que, conformément aux dispositions de l’article 203 du code d’instruction criminelle il serait à déclarer irrecevable.

Or, il faut constater que cette décision du 13 octobre 2010 n’a pas tranché une partie du principal et, tout en statuant sur un incident, n’a pas mis fin à l’instance.

Au regard des dispositions de l’article 579 du nouveau code de procédure civile, applicables en matière répressive à défaut de disposition contraire résultant du code d’instruction criminelle ou d’une autre loi, un appel immédiat contre cette décision aurait été prématuré, partant irrecevable. C’est, par conséquent, à juste titre que B a entrepris la décision du 13 octobre 2010 conjointement avec celle du 23 novembre 2010, qui a tranché le fond, dans le délai légal à compter du jugement du 23 novembre 2010.

L’appel dirigé par B contre le jugement du 13 octobre 2010 est, partant, recevable.

Il en est de même des autres appels introduits dans les formes et délais de la loi.

A l’audience de la Cour du 2 mai 2011, le mandataire de D demande à la Cour de statuer par un arrêt préalable sur l’appel des demandeurs au civil X et Y et donc sur la recevabilité des demandes civiles.

La Cour n’a pas fait droit à cette demande et a joint cet incident au fond.

A la même audience, le mandataire de B donne lecture et dépose des conclusions in limine litis dans lesquelles il sollicite, d’une part, la nullité des jugements du 13 octobre 2010 et du 18 novembre 2010, en ce que les premiers juges auraient statué ultra petita dans le jugement du 13 octobre 2010, engendrant la nullité du jugement du 18 novembre 2010 et, d’autre part, la nullité du jugement du 18 novembre 2010, au motif que le tribunal n’aurait pas statué sur le moyen du non-respect du délai raisonnable.

B reproche, en substance, dans le premier volet de cette demande, aux premiers juges d’avoir statué sur un moyen, formulé en ordre subsidiaire, qu’il n’aurait en réalité pas encore soumis au tribunal mais qu’il se serait réservé de formuler ultérieurement. Son préjudice résulterait du fait que, par après, dans le jugement du 18 novembre 2010, le tribunal n’aurait plus examiné ce moyen, présenté à l’audience du 21 octobre 2010, au motif qu’il l’aurait déjà examiné dans le jugement précédent du 13 octobre 2010.

Ce premier moyen de nullité est à rejeter. La Cour considère qu’il résulte d’une mauvaise lecture, par B, de ses propres conclusions présentées à l’audience du tribunal le 11 octobre 2010.

En effet, dans ces conclusions, B ne s’est justement pas limité à se réserver de formuler ultérieurement ses griefs tirés de l’article 6, paragraphes 1 et 3b de la Convention européenne des Droits de l’Homme (ci-après « la CEDH »), mais il a expressément demandé « acte qu’il maintient avant toute autre défense en cause expressément l’intégralité de ses divers moyens relatifs à la violation de la Convention Européenne développés plus amplement ci-dessus et au niveau de son recours strasbourgeois. »

Ce n’est que par la suite qu’il s’est réservé « tout droit généralement quelconque à cet égard ».

C’est, par conséquent, à juste titre que le tribunal, dans son jugement du 13 octobre 2010, a pris position quant à ces griefs, faute de quoi B aurait pu lui reprocher d’avoir omis d’y statuer et solliciter l’annulation du jugement à cet égard pour défaut de réponse à conclusions.

Le second moyen de nullité est à rejeter également. Il résulte, de la part de B, d’une mauvaise lecture cette fois-ci du jugement du 18 novembre 2011.

En effet, les premiers juges se sont longuement expliqués sur la question de savoir si la cause a été entendue dans un délai raisonnable et sur les conséquences du dépassement de ce délai dans le cas de l’espèce. Ils ont expressément retenu, à cet égard, qu’il convenait d’alléger les peines à prononcer contre les prévenus, dont B, compte tenu du léger dépassement du délai raisonnable. Ils n’étaient aucunement obligés de préciser, par ailleurs, de combien de mois d’emprisonnement et de quel montant de l’amende ils entendaient alléger les peines qui étaient à prononcer contre les prévenus retenus dans les liens de l’infraction d’homicide involontaire.

Il suit de ces développements qu’il n’y a pas lieu de faire droit aux conclusions in limine litis de B.

Le même B, à l’audience de la Cour du 2 mai 2011,  réitère ses moyens tirés du non-respect de l’article 6, paragraphes 1 et 3 de la CEDH et du non-respect de l’article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

Plus précisément, il expose que le principe de l’égalité des armes a été violé, en ce que le parquet a pu bénéficier d’un délai largement supérieur à celui qui lui a été accordé pour présenter ses conclusions à la chambre du conseil et qu’il n’a pas pu disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense.

Il demande à la Cour d’annuler l’ordonnance de renvoi et, dès lors, l’intégralité de la procédure, y comprise l’instruction, et de renvoyer le dossier devant la chambre du conseil de première instance autrement composée.

Le procureur général d’Etat estime que les dispositions invoquées n’ont pas été violées et que le mandataire de B a eu amplement le temps de préparer la défense de son mandant.

En ce qui concerne les griefs tirés de l’article 6 de la CEDH, la Cour fait siennes les développements du tribunal qui, dans le jugement du 13 octobre 2010, après avoir constaté que ces griefs concernaient uniquement la procédure d’instruction, a considéré que les juridictions de fond n’avaient pas qualité pour prononcer l’annulation des ordonnances ou arrêts de renvoi.

En ce qui concerne les griefs tirés de l’article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, la Cour constate que les dispositions pertinentes de cet article, en l’occurrence l’alinéa 2, se lisent comme suit : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial, établi préalablement par la loi. Toute personne a la possibilité de se faire conseiller, défendre et représenter. »

Ces dispositions correspondent effectivement, comme l’a correctement relevé le tribunal, à celles de l’article 6 de la CEDH.

La Cour constate, cependant, à la lecture des conclusions de B que, contrairement à ce que le tribunal a relevé, la demande en nullité tirée d’une prétendue inégalité d’armes, ne concerne pas la procédure après le renvoi, mais bien, comme la demande basée sur les dispositions de l’article 6 de la CEDH, la procédure précédant l’ordonnance de renvoi.

Or, tel qu’il a été développé ci-dessus, la défense doit soulever d’éventuels moyens de nullité de la procédure d’instruction tirés du non-respect des droits de la défense au cours même de l’instruction. Si aucune demande n’est présentée dans le délai et devant la juridiction prévue à l’article 126 du code d’instruction criminelle, le demandeur est forclos à invoquer cette nullité devant les juges de fond.

Par conséquent, en l’espèce, ce volet de la demande en nullité est à déclarer irrecevable également.

A supposer que B ait visé également la procédure après le renvoi, la Cour approuve les observations du tribunal qui, dans son jugement du 18 novembre 2010, a constaté que B restait en défaut d’expliquer et de prouver en quoi la prétendue violation du principe de l’égalité des armes lui aurait fait grief.

Par conséquent, les moyens de nullité soulevés par la défense de B sont à écarter.

La Cour tient à relever encore, en ce qui concerne l’absence d’appel de la part de A, que l’appel général du ministère public produit les effets les plus étendus en ce qui concerne l’action publique et porte devant le juge d’appel l’ensemble du litige, et ceci malgré l’absence d’appel, en l’espèce, du prévenu. L’appel général du parquet remet, dès lors, en question tout ce qui a été soumis aux premiers juges, tant à charge qu’à décharge. Il doit, dès lors, profiter également au prévenu s’il a été injustement condamné, de sorte que celui-ci est admis à contester, malgré l’absence d’appel, toutes les préventions qui lui sont reprochées, ainsi que les peines qui lui ont été infligées en première instance.

 

Quant au fond

En ce qui concerne le déroulement des faits qui ont mené au présent procès, il suffit de rappeler qu’en date du 2 octobre 2006, vers 18.00 heures, dans la maison relais de l’école primaire de (...) , une armoire, non fixée, d’un poids de 77 kg et d’une hauteur de 2,07 m, placée au milieu d’une salle de jeux pour faire office de séparation de la pièce, a été heurtée et renversée par un ou deux garçons qui jouaient dans la salle. L’armoire est tombée sur le jeune VICTIME  âgé de 6 ans, causant la chute de ce dernier sur le sol carrelé, chute qui a entraîné le décès presque immédiat de l’enfant.

Pour le surplus et quant aux déclarations des prévenus et des témoins entendus par la police judiciaire, le juge d’instruction et le tribunal, la Cour renvoie à l’exposé exhaustif des premiers juges repris ci-dessus, sous réserve des ajouts spécifiques résultant des déclarations faites à l’audience de la Cour et des éléments de preuve y présentés.

Les prévenus D, en sa qualité de chargée de direction et d’éducatrice ainsi que B et A, en leurs qualités d’éducateurs, ont été déclarés convaincus par le tribunal, comme auteurs, le 2 octobre 2006, vers 18.00 heures, à (...) , 1 rue des Vergers, dans la maison relais de l’école primaire « Sepp Hansen », d’avoir involontairement causé la mort de  VICTIME  né le (...)  à Luxembourg, par les comportements fautifs suivants :

- avoir, en tant que responsables, travaillant quotidiennement dans les lieux, proposé la disposition de la salle et plus particulièrement l’installation d’un coin de jeux séparé du reste de la salle ;

- avoir toléré que les deux armoires furent posées en tant que séparation en plein milieu de la pièce ;

- avoir toléré que les deux armoires furent posées dans la salle sans être solidement fixées afin d’éviter qu’elles ne puissent tomber ;

- avoir laissé les deux armoires en tant que séparation alors qu’elles n’étaient pas solidement fixées ;

- avoir fait installer derrière les armoires des coussins sur lesquels les enfants se sont défoulés régulièrement en sautant de façon à pouvoir heurter les armoires ;

- avoir toléré que ces armoires furent posées et restent posées en plein milieu de la pièce ne permettant ainsi plus à l’éducateur d’avoir un regard direct sur les enfants jouant derrière ces armoires, et par la même avoir toléré que les enfants jouant derrière ces armoires échappent à la surveillance momentanée des éducateurs.

 

En outre, D a été déclarée convaincue d’avoir toléré que les enfants soient sans surveillance dans la salle de jeux et Jérôme A d’avoir laissé les enfants sans surveillance le 2 octobre 2006, d’avoir quitté la salle de jeux pour accueillir les parents venant récupérer les enfants et d’avoir ainsi laissé les enfants sans surveillance et de la sorte n’avoir pu constater qu’une des armoires allait tomber, et de ne pas avoir pu intervenir pour éviter que cette armoire ne tombe et ne blesse mortellement un enfant.

C, en sa qualité de délégué à la sécurité de la commune de (...) , a été déclaré convaincu, dans les mêmes circonstances de temps et de lieu, d’avoir involontairement causé la mort de VICTIME  par les comportements fautifs suivants :

- avoir toléré que les deux armoires furent posées dans la salle de jeux sans être solidement fixées afin d’éviter qu’elles ne tombent ;

- ne pas avoir contrôlé la disposition des lieux, la solidité et la fixation des matériaux avant le commencement de la maison relais ;

- ne pas avoir fixé, respectivement ne pas avoir fait fixer les armoires pour garantir la sécurité des enfants.

E, ouvrier auprès de la commune de (...) , a été acquitté par le tribunal de l’infraction d’homicide involontaire, le Parquet lui ayant reproché d’avoir posé les deux armoires dans la salle de jeux en plein milieu de la pièce et de ne pas avoir fixé les armoires solidement afin d’éviter qu’elles ne tombent.

D a été condamnée à une peine d’emprisonnement de 12 mois, assortie du sursis intégral à son exécution, et à une amende de 6.000 €; B a été condamné à une peine d’emprisonnement de 10 mois, assortie du sursis intégral à son exécution, et à une amende de 5.000 €; A a été condamné à une peine d’emprisonnement de 10 mois, assortie du sursis intégral à son exécution, et à une amende de 5.000 € et C a été condamné à une peine d’emprisonnement de 12 mois, assortie du sursis intégral à son exécution, et à une amende de 6.000 €.

Tel qu’il a été dit ci-dessus, D, B et C ont entrepris ce jugement. A la suite de l’appel général du Parquet, l’appréciation de l’ensemble des infractions à l’égard des cinq prévenus est soumise à la Cour.

Comme en première instance, les cinq prévenus concluent à leur acquittement, au motif qu’aucune faute ou négligence dans la genèse de l’accident ne saurait leur être reprochée. Ils maintiennent leurs moyens et arguments développés devant le tribunal et repris dans la motivation du jugement ci-dessus.

Quant à la question essentielle relative à l’aménagement de la salle de jeux en question et plus précisément l’installation de l’armoire au milieu de la salle, non autrement fixée, ni au sol, ni au plafond, ni à une seconde armoire adjacente, les éducateurs D et B maintiennent leur version des faits suivant laquelle, lors d’une réunion dans la salle pendant la seconde moitié du mois d’août 2006, il aurait été discuté, à l’initiative d’D, d’une séparation de la salle à l’aide d’un rideau, que E aurait rejeté cette idée, un rideau ne pouvant être fixé au faux-plafond, que le même E aurait proposé d’utiliser les deux armoires récupérées sur celles se trouvant auparavant dans la salle de classe pour servir de séparation, qu’il se serait accroché aux portes pour tester la stabilité de l’armoire laquelle aurait été déclarée en ordre, que néanmoins D aurait invité E à fixer les deux armoires entre elles pour accroître la stabilité et la sécurité, ce que E aurait promis de faire, mais ce qu’il n’aurait pas fait. Ils ajoutent qu’ils ne se seraient pas rendus compte du caractère peu stable de l’armoire. Les éducateurs concèdent qu’ils n’ont plus vérifié par après ni la stabilité des armoires ni leur fixation entre elles. Par ailleurs, ils soutiennent qu’au moment de ce test, les armoires, après avoir été enlevées du mur, auraient été mises à l’endroit où elles se trouvaient au moment de l’accident, le 2 octobre 2006, et n’auraient plus été déplacées par après. Un grand nombre de personnes, dont les responsables communaux et les parents des enfants, les auraient d’ailleurs vues à cet endroit sans faire de remarques à ce sujet.

Les deux autres prévenus entendus à l’audience de la Cour contestent cette version des faits. E soutient qu’en sa présence, il n’aurait jamais été question ni d’une séparation de la salle, ni de la fixation d’un rideau, ni de la fixation des armoires entre elles. S’il a effectivement testé un jour, pendant la troisième semaine du mois d’août 2006, l’armoire litigieuse en secouant les portes, cela aurait uniquement été pour voir si l’armoire était encore utilisable pour servir en tant que telle, mais non pour vérifier sa stabilité, c’est-à-dire pour contrôler si elle risquait de bouger. A l’audience de la Cour, E ne se rappelle plus si à ce moment il a eu des doutes quant à la stabilité et s’il a exprimé ces doutes. Par ailleurs, au moment de ce test, les armoires ne se seraient pas encore trouvées au milieu de la salle, mais elles auraient seulement été éloignées un peu du mur pour permettre le test. Par après, il n’aurait plus touché aux armoires et personne ne lui aurait enjoint de ce faire.

Quant à cette même question de l’emplacement de l’armoire, C, après avoir indiqué qu’il n’y connaîtrait rien en ce qui concerne l’aménagement d’une maison relais et qu’il se serait fié à ce sujet aux éducateurs, expose que ces derniers ne l’auraient jamais informé de leur désir d’utiliser les armoires comme séparation de la salle. Il n’aurait jamais assisté à un test de stabilité de l’armoire. Le test de E n’aurait pas servi à vérifier la stabilité de l’armoire, mais seulement pour voir si l’armoire était encore utilisable en tant que telle. Les armoires auraient été replacées dos contre le mur, endroit auquel il les aurait vues jusque vers la mi-septembre 2006, date à laquelle il a cessé ses visites de sécurité effectuées tous les deux jours. Si effectivement les armoires s’étaient trouvées au beau milieu de la salle, il les aurait fait déplacer pour raison de sécurité. A l’appui de ses affirmations, il verse à l’audience de la Cour du 2 mai 2011 un DVD avec la copie d’un reportage tourné à (...) , le 1er septembre 2006, date d’ouverture de la maison relais, afin d’établir le fait qu’à cette date, les armoires se trouvaient adossées contre le mur.

Les mandataires des éducateurs, et notamment le mandataire d’D, continuent à estimer qu’il est scandaleux que le bourgmestre et les échevins de la commune de (...)  aient bénéficié d’un non-lieu et qu’aucun agent du ministère de la Famille n’ait fait l’objet de poursuites. Ils renvoient à l’article 18 du règlement grand-ducal du 20 juillet 2005 concernant l’agrément à accorder aux gestionnaires de maison relais pour enfants. Cet article dispose, notamment, que le gestionnaire veille à ce que toutes les précautions garantissant un haut niveau de sécurité aux enfants soient prises lors de la construction et de l’aménagement des infrastructures, de l’acquisition et de la disposition du mobilier, des équipements, des jeux et des jouets. Par ailleurs, l’Administration communale aurait ouvert une maison relais sans disposer de l’agrément nécessaire et elle n’aurait pas veillé à ce qu’un organisme externe procède au contrôle de sécurité des lieux. Le ministère compétent aurait délivré un agrément sans avoir visité les lieux, de sorte que le règlement grand-ducal du 20 décembre 2001 portant exécution des articles 1er et 2 de la loi du 8 septembre 1998 réglant les relations entre l’Etat et les organismes oeuvrant dans les domaines social, familial et thérapeutique pour ce qui concerne l’agrément gouvernemental à accorder aux gestionnaires de structures d’accueil sans hébergement pour enfants, aurait également été violé en ses articles 43 et 48.

Ce serait le seul gestionnaire de la maison relais, à savoir les responsables communaux et leur délégué, auxquels leurs mandants auraient fait confiance en ce qui concerne la sécurité des lieux, qui pourrait être déclaré responsable de l’accident en tant que propriétaire de l’armoire et garant de la sécurité, et non les éducateurs qui n’auraient eu aucun pouvoir de décision quant à l’aménagement de la salle et à l’emplacement de l’armoire.

Le mandataire de B, rejoint en cela par celui de E, demande encore à la Cour de ne plus faire application de la jurisprudence tirée de la « culpa levissima », celle-ci ne correspondant plus aux temps modernes.

Le mandataire de A d’ajouter que ce dernier, même s’il s’était trouvé dans la salle de jeux au moment de l’accident, n’aurait pas pu empêcher l’armoire de tomber sur le petit garçon.

Le mandataire de E estime que son mandant ne peut pas être déclaré responsable, étant donné qu’il n’a, en fait, pas posé l’armoire à l’endroit litigieux, qu’en tant que simple ouvrier en bout de chaîne, il n’aurait, de toute façon, qu’exécuté les ordres reçus par  ses supérieurs et que personne ne lui aurait enjoint de fixer les armoires entre elles ou à un quelconque autre endroit.

Le mandataire de C estime que ce dernier ne peut être déclaré responsable, étant donné qu’il n’a jamais vu l’armoire à l’endroit litigieux, mais toujours adossée au mur, qu’on ne pourrait exiger du délégué à la sécurité d’être présent à tout moment et en tout lieu et que l’idée de la séparation de la salle à l’aide des armoires n’aurait jamais été portée à sa connaissance. Il renvoie, par ailleurs, aux dispositions des articles 1.14.01 et 1.21 du règlement grand-ducal du 6 octobre 1995 en matière de sécurité dans la fonction publique, pour dire que, si, effectivement, le collège échevinal a pu le désigner comme délégué à la sécurité, il aurait appartenu aux éducateurs de prendre soin de la sécurité dans la salle et de lui signaler toute situation dont ils avaient un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et immédiat pour la sécurité.

Le procureur général d’Etat estime que la cause du décès de VICTIME est claire, à savoir l’armoire qui est tombée sur l’enfant, et que toutes les parties s’accordent également sur le fait que cette armoire n’aurait pas dû se trouver, de cette façon, à cet endroit, au milieu de la salle de jeux.

En revanche, il ne serait pas établi quelle personne aurait placé l’armoire à cet endroit. Au regard des déclarations des éducateurs et de l’attestation testimoniale versée en cause, on pourrait admettre que l’armoire se serait trouvée à cet endroit dès le 3 septembre 2006.

Le prévenu C n’aurait pas accompli sa tâche de délégué à la sécurité. Il aurait dû faire enlever l’armoire de cet endroit et il aurait dû constater l’emplacement dangereux pendant ses visites du 1er au 15 septembre 2006. Si à la date d’ouverture de la maison relais il a constaté - et il aurait dû le constater - que l’aménagement de la salle n’était pas terminé, il aurait dû reporter ou faire reporter l’ouverture. Par conséquent, les préventions reprochées à C auraient été retenues à bon droit par le tribunal.

Le rôle du prévenu E et ses agissements quant à l’aménagement de la salle seraient difficiles à retracer. Même s’il a assisté à tous les tests de stabilité de l’armoire, les circonstances de son intervention ne seraient pas suffisamment déterminées, pour qu’on puisse retenir, à l’abri de tout doute, une faute à son encontre. L’acquittement de E serait, dès lors, à confirmer.

Quant aux trois éducateurs, le procureur général d’Etat estime que le défaut de surveillance ne saurait leur être reproché. Même si l’un d’eux avait été tout près de l’armoire, il n’aurait pas pu empêcher sa chute. En revanche, en ce qui concerne l’emplacement de l’armoire, le procureur général d’Etat, qui rappelle que l’idée de la séparation de la salle émanait de D, estime que les éducateurs n’auraient pas dû tolérer que l’armoire se trouve de cette manière à cet endroit. Les éducateurs auraient dû se rendre compte que cette armoire n’était pas suffisamment solide pour faire office de séparation. Il se demande pourquoi les éducateurs n’ont pas fait enlever ou enlevé eux-mêmes l’armoire. Par conséquent, les fautes leur reprochées, même s’il ne s’agit pas de fautes graves, seraient établies et l’infraction d’homicide involontaire aurait été retenue à juste titre à leur égard également.

D’emblée, la Cour est obligée de constater que l’instruction du dossier n’a pas permis d’établir qui a posé l’armoire litigieuse au milieu de la salle de jeux sans la fixer quelque part. Tout comme le procureur général d’Etat, la Cour regrette que la personne en question, qu’il s’agisse d’un des prévenus ou, le cas échéant, même d’un tiers, n’ose pas avouer sa faute et assumer sa responsabilité. Il n’en reste pas moins que la Cour n’est pas en mesure de désigner un des prévenus comme responsable de cette faute.

En ce qui concerne le moment exact de l’emplacement de l’armoire au milieu de la salle, il a été exposé ci-dessus que les déclarations des prévenus sont contradictoires. Les éducateurs prétendent que l’emplacement a été définitif dès le test de stabilité pendant la seconde moitié du mois d’août, tandis que les deux autres prévenus soutiennent que c’est seulement plus tard que les armoires ont été déplacées au milieu de la salle, C exposant même qu’il ne les a jamais vues à cet endroit avant l’accident.

Pour apprécier cette question, la Cour se réfère, d’une part, au reportage produit par la « Télévision de (...)  – Test » versé par C le 2 mai 2011, qui, prétendument, n’a été mis à sa disposition que le 29 avril 2011, même s’il a été réalisé quatre années et demie plus tôt. Les parties sont d’accord pour admettre que les scènes pertinentes, et notamment les déclarations d’D et les travaux effectués par B, ont été tournées dans la matinée du vendredi 1er septembre 2006.

On peut constater, à la vue desdites scènes, non seulement qu’à ce moment régnait une action fébrile dans la maison relais, que la salle de jeux n’était en rien aménagée et qu’elle présentait un caractère plutôt chaotique, malgré le fait que la maison relais avait officiellement ouvert ses portes le jour-même, mais surtout, question pertinente en l’espèce, qu’à ce moment les armoires étaient adossées contre le mur, même si une niche de plusieurs centimètres se trouvait encore derrière au moins une des armoires, permettant d’ailleurs à un enfant de se glisser derrière celle-ci. Mais, en tout cas, à ce moment, les armoires ne se trouvaient pas au milieu de la salle.

La Cour se réfère, d’autre part, à l’attestation testimoniale versée aux débats par le mandataire d’D qui n’a été contestée par aucune des parties. Cette attestation a été délivrée par la concierge de la commune de (...) . Il s’agit d’ailleurs de la seule déclaration émanant d’un tiers, non intéressé à l’issue du procès, relative à la question éminemment importante de l’emplacement de l’armoire dans la salle de jeux. On lit dans cette attestation « que les armoires étaient placées de la même façon au premier jour de présence des enfants que lors de l’accident mortel de Luca ».

Or, il résulte des renseignements qui se dégagent du dossier, dont les déclarations des éducateurs, que les premiers enfants se sont présentés à la maison relais non pas le jour de l’ouverture officielle, à savoir le vendredi 1er septembre 2006, mais le lundi 4 septembre 2006.

La Cour en déduit que c’est à partir de cette date que l’armoire litigieuse se trouvait au milieu de la salle de jeux et qu’elle y servait, avec la seconde armoire, de séparation de la salle.

En ce qui concerne les infractions reprochées aux trois éducateurs, la Cour tient, tout d’abord, à approuver les premiers juges quant à l’exposé théorique de la notion de « culpa levissima » critiquée, notamment, par la défense de B. Les observations du tribunal à ce sujet correspondent à la jurisprudence luxembourgeoise qui est maintenue et à laquelle la Cour adhère expressément (cf. notamment Cour n°29/11 X. du 19 janvier 2011 – accident ferroviaire de Zoufftgen). Il n’existe aucune raison de s’en départir dans la présente affaire et la Cour ne voit pas en quoi et pourquoi cette jurisprudence ne serait plus d’actualité (« zeitgemäß »), comme l’avance le mandataire de B.

La Cour ajoute, dans ce contexte, que pour justes que les observations de la défense d’D peuvent être quant aux éventuelles responsabilités d’autres intervenants, comme les représentants de la commune ou du ministère de tutelle (violation des règlements grand-ducaux précités du 20 juillet 2005 et du 20 décembre 2001) ou même des coprévenus, il n’en reste pas moins que la plus légère faute ou négligence de tous les prévenus cités par le ministère public, qui a contribué à la réalisation du dommage, constitue un délit.

Il n’appartient pas, à ce sujet, à la Cour de se prononcer sur les décisions de non-lieu dont ont bénéficié les trois autres inculpés, membres du collège échevinal. Néanmoins, dans le cadre de l’appréciation de la peine à prononcer, le cas échéant, contre les prévenus, la Cour pourra prendre en considération les éventuels dysfonctionnements dont ont fait état les mandataires des éducateurs et les possibles fautes ou omissions d’autres organes ou personnes, dont les coprévenus.

Quant aux comportements fautifs reprochés plus précisément aux trois éducateurs, la Cour adopte la motivation pertinente et détaillée des premiers juges, qui répond par ailleurs aux arguments développés par la défense devant la Cour. En effet, depuis le 4 septembre 2006 et jusqu’au jour de l’accident, le 2 octobre 2006, les éducateurs ont été quotidiennement confrontés à l’emplacement dangereux des deux armoires, et, malgré le fait qu’ils auraient pu les déplacer, n’ont rien fait. Le simple bon sens aurait dû attirer leur attention sur le fait que cette position des armoires, souhaitée par eux-mêmes, derrière lesquelles des coussins et matelas avaient été déposés, était source de danger pour des enfants qui, forcément, dans une salle de jeux sont turbulents. Comme le tribunal l’a correctement relevé, le fait qu’un des enfants heurte une des armoires par l’arrière et, peut-on ajouter, qu’il réussisse à la faire tomber, était prévisible. Néanmoins, à aucun moment les éducateurs n’ont contrôlé si les armoires étaient solidement fixées et cela malgré le fait que, d’après leurs propres dires, ils avaient exprimé, auparavant, leurs doutes quant à la solidité et la stabilité des armoires et qu’ils se sont servis des armoires pour y entreposer des objets, qu’ils ont même demandé d’en faire enlever les portes et qu’ils auraient donc dû en remarquer l’instabilité.

Le fait que pendant cette période un certain nombre de personnes, dont les responsables communaux et les parents des enfants se sont également, momentanément, trouvés dans cette salle, n’est pas de nature à disculper les prévenus de leur propre négligence.

En ce qui concerne le défaut de surveillance des enfants, reproché à D et à A, la Cour est d’avis que le tribunal a retenu à juste titre ce comportement fautif à leur encontre également. Il convient de relever, à ce sujet, d’emblée, que, l’article 2 du règlement grand-ducal du 20 juillet 2005, précité, dispose, entre autres, que l’activité d’une maison relais comprend obligatoirement « la surveillance des usagers » et que l’article 9 du même règlement dispose, entre autres, que la mission principale du personnel d’encadrement consiste à assurer la prise en charge directe des usagers pour les prestations visées à l’article 2.

Il est exact qu’on ne peut exiger d’une personne chargée de la surveillance de plusieurs enfants de les avoir constamment à l’œil en tout lieu et à tout moment. Mais, il ne faut pas oublier qu’en l’espèce, dans la salle de jeux se trouvaient, tel qu’il vient d’être exposé, deux armoires dont le défaut de stabilité n’a pas pu et n’aurait pas dû échapper à l’éducateur chargé de la surveillance des enfants et que, juste à côté de ces armoires, au moins deux enfants étaient en train de « se défouler » ( ils se trouvaient dans la partie de la salle dite de « défoulement ») sur des matelas et coussins d’une hauteur totale de près de 40 cm, joignant les armoires et ajoutant à la dangerosité des lieux. Le surveillant aurait, partant, dû redoubler de prudence, ce qu’il n’a pas fait, vu qu’il a justement quitté la salle.

Or, les parents, qui confient leurs enfants en bas âge à une institution spécialisée dans la garde des enfants, doivent légitimement pouvoir s’attendre à ce que les professionnels, engagés justement pour garantir la surveillance et, partant, la sécurité de ces enfants, remplissent cette mission de surveillance sans relâche.

Il n’est pas non plus exact de dire que, même si A s’était trouvé dans la salle de jeux, l’accident se serait passé de la même façon. En effet, la Cour considère que l’éducateur, resté dans la salle, aurait, d’un côté, eu la possibilité d’empêcher les deux garçons de jouer d’une façon aussi turbulente, et/ou, d’un autre côté, aurait pu s’interposer entre l’armoire et le petit VICTIME de façon à éviter que ce dernier ne soit projeté avec une telle force par terre sur le carrelage.

Par conséquent, il a été retenu à juste titre à l’encontre de A le fait d’avoir laissé sans surveillance les enfants et à l’encontre d’D, en sa qualité de chargée de direction, le fait d’avoir toléré ce défaut de surveillance.

Il résulte de l’ensemble de ces développements que c’est à juste titre que les trois éducateurs ont été retenus dans les liens de l’infraction d’homicide involontaire.

C n’a pas maintenu en instance d’appel son argumentation suivant laquelle le collège échevinal ne saurait se décharger de sa responsabilité en matière de sécurité sur le délégué à la sécurité, argumentation judicieusement rencontrée par le tribunal.

En ce qui concerne les comportements fautifs qui lui sont reprochés, il convient, d’abord, de rappeler que la Cour a noté ci-dessus que les deux armoires litigieuses se trouvaient au milieu de la salle de jeux en question, pour faire fonction de séparation, depuis le 4 septembre 2006. C a prétendu que, jusqu’au 15 septembre 2006, il a régulièrement, au moins tous les deux jours, procédé à la visite des lieux. Soit C n’a pas dit la vérité et n’a pas vu les armoires au milieu de la salle, parce qu’en réalité il n’a pas procédé à la visite de la salle de jeux. Soit il a procédé effectivement à ces visites, il a vu les armoires mais il s’en est désintéressé. Dans les deux cas, il a manqué à ses obligations les plus élémentaires. Dans le premier cas, il est inutile d’insister sur le fait qu’il lui incombait de veiller, au moins en visitant les lieux, à la sécurité de ceux-ci. Dans le second cas, il faut rappeler que C a concédé lui-même à l’audience de la Cour que les armoires, telles qu’elles se sont trouvées dans la salle au moment de l’accident, constituaient un danger pour les usagers et auraient dû être enlevées de cet endroit. Au moins, le simple bon sens aurait dû dicter au responsable de la sécurité de fixer ou faire fixer convenablement les armoires, afin d’éviter tout risque de renversement et cela  quelque soit la personne qui a installé les armoires à cet endroit. Il importe peu, dans ce contexte, de relever que les éducateurs ont également manqué à leurs devoirs et qu’ils ne lui ont pas signalé le défaut de fixation. Il lui aurait appartenu de vérifier le respect des mesures de sécurité. Or, C n’a rien entrepris en ce sens, malgré le fait que c’était lui le principal responsable à cet égard. Il n’a pas rempli la mission pour laquelle il a été engagé. Il a pris cette mission beaucoup trop à la légère. Il n’a à aucun moment procédé à une réception de la maison relais, au niveau de la sécurité. Il a permis l’utilisation, notamment, de la salle de jeux, à un moment où toutes les mesures de sécurité n’avaient pas encore été prises et respectées. Le reportage télévisé qu’il a versé lui-même à l’audience de la Cour démontre à suffisance la situation chaotique dans laquelle la maison relais se trouvait encore au moment de son ouverture, le 1er septembre 2006.

En voyant cela, il aurait dû, en vertu des pouvoirs qui lui avaient été conférés et de la tâche qu’il devait exercer, reporter ou faire reporter l’ouverture de la maison relais, ce qui aurait permis un aménagement convenable, en toute sérénité, entre autres, de la salle de jeux.

Il faut noter à cet égard que l’article 18 du règlement grand-ducal du 20 juillet 2005, précité, impose au gestionnaire, i. e. le collège échevinal – et partant également au délégué à la sécurité de ce gestionnaire, – de veiller « à ce que toutes les précautions garantissant un haut niveau de sécurité aux enfants soient prises lors de la construction et de l’aménagement des structures. »

Il est inadmissible que le délégué à la sécurité, comme il l’a lui-même affirmé à l’audience de la Cour avec une certaine nonchalance même, n’y connaisse rien du tout en matière d’aménagement d’une maison relais. Dans ce cas, soit il aurait dû se mettre au courant, soit démissionner de son poste, s’il était d’avis qu’il n’était pas à la hauteur de la tâche qui lui était confiée, et inviter le collège échevinal à désigner un autre délégué. Mais il n’a pas refusé la mission de délégué à la sécurité et doit en assumer pleinement la responsabilité.

Pour le surplus, la Cour renvoie à la motivation pertinente du tribunal qui a examiné en détail les différents comportements fautifs reprochés à C pour conclure correctement que le prévenu a toléré que les armoires fussent posées dans la salle de jeux sans être solidement fixées, qu’il n’a pas contrôlé la disposition des lieux avant l’ouverture de la maison relais et n’a de la sorte pas veillé à ce que la sécurité de ses usagers soit garantie de manière permanente et qu’il n’a pas fait fixer les armoires dans la salle de jeux pour garantir la sécurité des enfants.

C’est, par conséquent, à juste titre que C a été retenu dans les liens de la prévention d’homicide involontaire.

Quant au prévenu E, il a été dit ci-dessus qu’il n’est pas établi qu’il a posé l’armoire litigieuse dans la salle de jeux en plein milieu de la pièce.

Le premier reproche libellé à l’égard de E a, partant, été écarté à juste titre par le tribunal.

Il en est de même du second reproche de ne pas avoir fixé solidement les armoires, étant donné qu’il n’est pas établi à l’abri de tout doute non seulement quels ordres ont été donnés à E par ses supérieurs et quelles injonctions ou invitations lui ont été adressées par les éducateurs, mais également si, en sa présence, la question de l’emplacement à l’endroit litigieux a été abordée et, partant, si une quelconque obligation à sa charge de fixer les armoires entre elles ou quelque part ailleurs, afin d’éviter qu’elles ne tombent, a existé.

Par conséquent, l’acquittement de E a été prononcé à juste titre par le tribunal.

 

 Quant aux peines

Les quatre prévenus condamnés en première instance demandent, en ordre subsidiaire, à la Cour de suspendre le prononcé de l’arrêt, sinon de réduire substantiellement les peines prononcées en première instance, mais en tout cas de ne pas prononcer de peine d’emprisonnement.

Le procureur général d’Etat estime également, en raison du contexte très particulier du dossier et de l’absence d’antécédents judiciaires des prévenus, qu’une peine d’emprisonnement n’est pas appropriée et qu’une peine d’amende n’a pas de sens. Il conclut, partant, pour les quatre prévenus à une suspension du prononcé de l’arrêt pendant la durée de cinq ans.

Les peines prononcées par le tribunal à l’égard des quatre prévenus D, B, A et C sont légales. C’est à juste titre également que les peines ont été allégées au regard de la violation, certes légère, des dispositions de l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH.

En ce qui concerne les trois éducateurs, il est utile de rappeler que la négligence et l’insouciance, relevées à juste titre par les premiers juges, dont ils se sont rendus coupables, ont eu une suite tragique, la mort du petit VICTIME Même s’il n’est pas établi que les éducateurs ont eux-mêmes installé les armoires au milieu de la salle, ils ont quand même toléré, pendant un mois entier, la présence des deux armoires dont le manque de stabilité n’a pas pu leur échapper. Ils ont manqué à leur devoir élémentaire de veiller à la sécurité des enfants qui leur avaient été confiés, en tant que professionnels en la matière.

Certes, tel qu’il a été relevé ci-dessus, la maison relais a ouvert ses portes dans la précipitation, à un moment où l’aménagement n’était pas terminé. S’il est vrai que les éducateurs n’étaient pas responsables de cet état de choses, il n’en demeure pas moins qu’ils se sont impliqués eux-mêmes, en raison de la carence du gestionnaire, dans l’aménagement de la maison relais, dont celui de la salle de jeux avec les armoires servant de séparation.

Il ne faut pas non plus oublier que la faute la plus grave qui leur est reprochée n’est pas le défaut de surveillance, le 2 octobre 2006, mais le fait que pendant près d’un mois, ils ont toléré la présence de l’armoire au milieu de la salle. Il ne s’agit pas d’un fait isolé, d’un seul moment d’inattention, mais d’une négligence qui s’est étendue sur une période prolongée.

La Cour note encore que B et A, qui ont exprimé des regrets sincères et qui souffrent également des événements tragiques du 2 octobre 2006, ont agi sous les ordres de la chargée de direction D.

La Cour considère que les négligences graves retenues à charge des éducateurs méritent d’être sanctionnées ; elle ne rejoint, partant, ni la défense, ni le procureur général d’Etat qui ont conclu, conformément aux dispositions de l’article 621 du code d’instruction criminelle, à une suspension du prononcé de la condamnation. La Cour considère également qu’une simple amende n’est pas suffisante pour valoir comme sanction en l’espèce.

La Cour est d’avis qu’une peine d’emprisonnement de quatre (4) mois, assortie du sursis intégral à son exécution, sanctionne adéquatement le comportement fautif de la chargée de direction D. L’amende de 6.000 euros est appropriée, partant à maintenir.

La même peine d’emprisonnement de quatre (4) mois, assortie du sursis intégral à son exécution, est à prononcer à l’égard de A, avec maintien de l’amende de 5.000 euros.

En ce qui concerne B, à l’égard duquel le manquement au devoir de surveillance n’a pas été retenu, une peine d’emprisonnement de trois (3) mois, assortie du sursis intégral à son exécution, sanctionne adéquatement son comportement, avec maintien de l’amende de 5.000 euros.

En ce concerne C, la Cour approuve entièrement les observations du tribunal quant à la responsabilité de ce prévenu dans la genèse de l’accident et quant à ses omissions et négligences. Il était le représentant du gestionnaire, responsable du service technique de la commune pour ce chantier et délégué à la sécurité. Il a gravement manqué à ses obligations et la Cour a dû constater qu’il n’est toujours pas conscient de la responsabilité qui lui incombait.

 La Cour considère que la différence entre les responsabilités incombant aux prévenus, et notamment entre, d’un côté, les éducateurs et, d’un autre côté, le délégué à la sécurité qui doit, comme représentant du gestionnaire, assureur un haut degré de surveillance aux usagers de la maison relais, doit également se refléter au niveau de la peine qui est à infliger aux prévenus.

La Cour considère, en conséquence, que la peine d’emprisonnement de 12  mois, assortie du sursis intégral à son exécution, et la peine d’amende de 6.000 € sanctionnent adéquatement les fautes et négligences de C.

Le jugement est, partant, à confirmer à son égard.

 

Quant au volet civil

Les parents de VICTIME  X et Y agissant en leur qualité de représentants légaux sinon d’héritiers de VICTIME  ont réclamé réparation du préjudice matériel de leur fils mineur évalué à 150.000 euros et réparation du préjudice moral résultant des souffrances endurées évalué à 350.000 euros.

En tant que victimes par ricochet, ils ont encore réclamé chacun le montant de 10.000 euros du chef des frais funéraires et des frais médicaux et le montant de 150.000 euros à titre de réparation du préjudice moral subi.

Devant le tribunal, les défendeurs ont conclu principalement à l’irrecevabilité des demandes civiles sur base de l’article 115 du code de la sécurité sociale.

Le tribunal, dans le jugement entrepris, après s’être déclaré incompétent pour connaître de la demande dirigée contre E, s’est référé aux dispositions des articles 115 et 90 du code de la sécurité sociale, pour déclarer irrecevable l’action en dommages-intérêts dirigée contre les quatre autres défendeurs par les demandeurs au civil du chef du décès de L.G.R.

Les demandeurs au civil concluent à la réformation de cette décision.

En premier lieu, ils concluent à la compétence du tribunal pour connaître de la demande dirigée contre E, même à supposer que celui-ci soit acquitté.

En second lieu, pour conclure à la recevabilité de la demande civile, malgré les termes de l’article 115 du code de sécurité sociale, ils avancent plusieurs arguments.

Les demandeurs se prévalent, tout d’abord, d’un arrêt du 28 mai 2004 dans lequel la Cour Constitutionnelle a retenu que dans la mesure où il exclut du recours de droit commun les ayants droit de la victime d’un accident de travail qui n’ont, aux termes du code des assurances sociales (actuellement « code de la sécurité sociale »), aucun droit à prestation, l’article 115 du même code est contraire à l’article 10bis (1) de la Constitution.

En ordre subsidiaire, ils exposent que l’article 115, précité, viole les articles 2 et 13 de la CEDH, étant donné qu’il les prive du droit d’accès effectif à un tribunal, tel que prévu par l’article 3 du code d’instruction criminelle. Il violerait également l’article 6 de la même CEDH, au motif qu’il les obligerait d’attendre la fin du procès pénal avant de saisir les juridictions civiles afin de voir condamner l’Etat en réparation de leur dommage, soit un délai d’au moins 10 ans après l’accident, délai qui ne serait pas raisonnable.

En ordre plus subsidiaire, ils exposent que les articles 115 et 90, précités, sont inapplicables au cas d’espèce, étant donné qu’il ne s’agit pas d’un accident de travail, qu’il n’y a pas eu activité professionnelle dans le chef de l’enfant et que les demandeurs n’agissent pas contre les personnes « pour le compte desquelles VICTIME exerçait une activité ».

En ordre encore plus subsidiaire, ils demandent à la Cour de saisir la Cour Constitutionnelle de la question préjudicielle suivante :

« L’article 115 du Code des Assurances sociales en visant par le biais de l’article 90 du Code des assurances sociales les élèves et étudiants d’un enseignement précoce, préscolaire, scolaire et universitaire, est-il conforme à la Constitution et notamment à son article 10 bis (1) de Constitution ?

Ou encore

« le critère de distinction entre les personnes visées aux articles 85, 86 et 90 du Code des assurances sociales victimes d’accidents de travail, dont selon l’article 90 dudit Code d’une part et les victimes d’accidents de droit commun d’autre part est-il conforme à la Constitution et notamment à son article 23, et est-il conforme au Droit à l’instruction selon l’article 2 du protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et les libertés fondamentales, fait à Paris le 20 mars 1952, et selon l’article 14 de la Charte des Droits Fondamentaux de l’Union Européenne ».

En ordre infiniment subsidiaire, ils soulèvent « l’inopposabilité de la structure qualifiée de maison relais à leur égard », au motif que l’agrément ministériel de la maison relais de (...)  n’a été publié au Mémorial qu’en date du 8 novembre 2006, soit après l’accident.

En ordre infiniment plus subsidiaire, ils renvoient à la cause d’exclusion prévue à l’article 115, précité, suivant laquelle cet article ne s’applique pas dans l’hypothèse où un jugement pénal a déclaré les défendeurs coupables d’avoir provoqué intentionnellement l’accident. En l’espèce, les comportements fautifs retenus contre les défendeurs seraient à qualifier de « dol indéterminé », partant de « faute intentionnelle ».

Les parties défenderesses concluent au rejet de tous ces arguments.

Tout d’abord, la Cour approuve la décision d’incompétence du tribunal pour connaître de la demande civile dirigée contre E, en raison de l’acquittement au pénal de ce dernier, au regard d’une jurisprudence constante en cette matière.

Ensuite, en ce qui concerne la décision d’irrecevabilité de la demande civile dirigée contre les quatre autres défendeurs, la Cour tient à relever, d’emblée, avec l’arrêt de la Cour Constitutionnelle, précité, du 28 mai 2004, que la limitation du droit d’agir prévue par l’article 115 du code de la sécurité sociale s’explique par une réglementation s’écartant du droit commun basée non plus sur la notion de faute, mais sur celle de risque professionnel et sur une répartition de ce risque entre l’employeur et la victime de l’accident du travail, l’assuré bénéficiant des prestations statutaires de l’Association d’Assurance contre les Accidents même en l’absence de responsabilité dans le chef de l’auteur de l’accident et même en cas de faute dans son chef. Cette limitation permet le fonctionnement même du système d’indemnisation forfaitaire et automatique et contribue au maintien de la paix sociale dans les entreprises, que ce soit dans les relations entre travailleurs et assimilés ou, le cas échéant, dans les relations entre ces mêmes personnes et leurs employeurs. Cette différence de traitement est rationnellement justifiée.

On peut comprendre que les ayants cause des victimes d’accidents de travail ou les victimes elles-mêmes puissent qualifier ce système d’injuste ou inéquitable s’ils se comparent avec les ayants cause ou les victimes d’autres accidents, surtout en ce qui concerne la réparation d’un éventuel préjudice moral. Il n’en reste pas moins, outre la justification du système exposée ci-dessus, que les juridictions sont obligées, sous peine de forfaiture, d’appliquer les textes tels qu’ils sont, à moins qu’ils soient ambigus ou contradictoires, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

- Pour réfuter l’argument principal présenté par les demandeurs, tiré des dispositions de l’arrêt du 28 mai 2004, la Cour constate qu’effectivement cet arrêt retient que dans la mesure où il exclut du recours de droit commun les ayants droit de la victime qui n’ont aucun droit à prestation, l’article 115 du code des assurances sociales est contraire à l’article 10bis (1) de la Constitution. Mais, on lit également dans l’arrêt que dans la mesure où ces personnes remplissent les conditions pour bénéficier de prestations du chef d’un accident de travail, elles se trouvent dans une situation analogue à celle de l’assuré, de sorte que, concernant ces personnes, l’article 115 du code des assurances sociales n’est pas contraire à l’article 10bis (1) de la Constitution.

Comme en l’espèce, il n’est pas contesté et pas contestable que les demandeurs ont droit à prestation et qu’en fait ils ont bénéficié d’une prestation, à savoir une indemnité funéraire, la disposition dont ils se prévalent pour conclure à la recevabilité de leur demande, n’est pas applicable.

- Concernant l’argument subsidiaire, tiré de la violation des articles 2, 6 et 13 de la CEDH, la Cour constate que l’arrêt du 9 mai 2006 (Pereira Henriques c/ Luxembourg) de la Cour européenne de Droits de l’Homme auquel les demandeurs renvoient est loin de dire ce que les demandeurs veulent y lire.

Quant à l’article 2 de la CEDH, qui consacre le droit de toute personne à la vie, il faut noter que, dans l’arrêt en question, la violation de cette disposition a été retenue au seul motif que le parquet n’avait pas fait procéder à une enquête « effective »  et n’avait pas agi « avec diligence ».

Or, dans la présente espèce, un tel reproche ne peut être fait au ministère public et n’a d’ailleurs pas été fait par les demandeurs.

Par conséquent, le renvoi par les demandeurs à la décision du 9 mai 2006 pour conclure à la violation de l’article 2 de la CEDH n’est d’aucune utilité.

A défaut d’autre argument à l’appui de ce grief, celui-ci est à écarter.

Quant à l’article 6 de la CEDH, qui consacre le droit d’accès à un tribunal, la Cour renvoie, à nouveau, à l’arrêt du 9 mai 2006 qui a retenu que la question centrale à résoudre dans le contexte d’un grief tiré du défaut d’accès au tribunal au titre de l’article 6 de la CEDH n’est pas celle de savoir si un droit d’action préexistant à un stade antérieur avait été enlevé ou restreint par une législation, mais plutôt celle de savoir si un droit d’action existait ou non selon le droit interne au moment des faits sur lesquels porte la plainte.

En l’espèce, - et pour reprendre les termes dudit arrêt - le droit interne applicable au moment de l’accident ne reconnaissait pas aux demandeurs un « droit » (de caractère civil) propre à faire jouer l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH.

Par conséquent, la Cour conclut que cette disposition n’est pas applicable et, partant, qu’elle n’a pas été violée.

Quant à l’article 13 de la CEDH, qui garantit l’existence, en droit interne, d’un recours permettant de se prévaloir des droits et libertés de la CEDH, la Cour constate qu’en l’espèce, les demandeurs, qui se sont constitués parties civiles et ont participé au procès, ont disposé d’un recours effectif au tribunal, l’exercice de ce droit n’ayant pas été entravé de manière injustifiée par les actes ou omissions des autorités nationales.

Si, dans l’affaire Pereira Henriques c/ Luxembourg, précitée, la Cour européenne a retenu une violation de l’article 13, c’est pour la simple raison que, tel qu’il a été relevé ci-dessus, l’enquête du ministère public a été considérée comme inefficace, ce qui avait privé les requérants d’une voie de recours effective pour obtenir un dédommagement.

Or, tel qu’il a également été dit ci-dessus, dans la présente espèce, la question d’une éventuelle inefficacité de l’enquête ne se pose pas.

Par conséquent, l’argument tiré de la violation de la CEDH est à écarter.

- Concernant l’argument plus subsidiaire, suivant lequel il ne s’agirait, en l’espèce, pas d’un accident de travail, la Cour adopte la motivation des premiers juges qui ont renvoyé aux dispositions de l’article 90 du code de la sécurité sociale et ont retenu qu’en l’espèce, VICTIME  fréquentant la maison relais de (...) , est à considérer comme un élève ayant bénéficié d’une activité périscolaire, à laquelle l’assurance-accidents est applicable, de sorte que l’article 115 du même code trouve à s’appliquer. Les longs développements des demandeurs quant aux différents critères de l’accident de travail et la distinction à faire entre une activité professionnelle et une activité scolaire ne sont aucunement pertinents à cet égard.

Cet argument est, partant, à rejeter également.

- Concernant la demande à voir saisir la Cour Constitutionnelle d’une question préjudicielle – en fait, il s’agit de deux questions – , présentée en ordre encore plus subsidiaire, la Cour considère que les réponses à ces questions ont été fournies par l’arrêt précité du 28 mai 2004 qui a relevé, outre les observations reprises ci-dessus, également que le législateur peut, sans violer le principe constitutionnel de l’égalité, soumettre certaines catégories de personnes à des régimes légaux différents, à condition que la différence instituée procède de disparités objectives, qu’elle soit rationnellement justifiée, adéquate et proportionnée à son but, et que l’assurance contre les accidents, dont le but principal est d’assurer la subsistance de la victime d’un accident de travail et celle de sa famille, garantit aux bénéficiaires une indemnisation forfaitaire tout en les excluant du droit d’agir en réparation de leur préjudice selon le droit commun.

L’arrêt a ajouté que le critère de distinction entre les personnes visées aux articles 85, 86 et 90 du code de la sécurité sociale victimes d’accidents de travail, d’une part, et les victimes d’accidents de droit commun, d’autre part, est objectif et pertinent par rapport au système d’indemnisation en matière d’accidents professionnels.

Par conséquent, à la lecture de cet arrêt, conformément à l’article 6, c) de la loi du 27 juillet 1997 portant organisation de la Cour Constitutionnelle, qui dispose qu’une juridiction est dispensée de saisir la Cour Constitutionnelle lorsqu’elle estime que celle-ci a déjà statué sur une question ayant le même objet, il n’y a pas lieu de déférer ces questions à la Cour Constitutionnelle.

La Cour ajoute, quant à la seconde question, pour autant qu’elle vise la conformité des articles précités à l’article 23 de la Constitution et au Droit à l’instruction (avec renvoi à des dispositions étrangères à la Constitution), outre que cette demande n’est pas autrement développée ou explicitée, que cette question n’est aucunement pertinente pour la solution du présent litige.

Par conséquent, conformément au point a) de l’article 6 de la loi du 27 juillet 1997, précitée, qui instaure une dispense lorsque la juridiction saisie estime qu’une décision sur la question soulevée n’est pas nécessaire pour rendre son jugement, il n’y a pas non plus lieu de déférer cette question à la Cour Constitutionnelle.

- Concernant l’argument infiniment subsidiaire, tiré de l’absence de publication d’agrément au jour de l’accident, la Cour considère, à nouveau, que cette circonstance n’est pas pertinente dans ce contexte.

Tel qu’il vient d’être dit, les activités périscolaires, visées à l’article 90 du code de la sécurité sociale, sont englobées dans l’article 115 du même code.

En l’espèce, la commune de (...)  avait monté une structure d’accueil pour permettre l’organisation de telles activités. Que cette activité ait eu lieu dans une maison relais dûment agréée ou ailleurs, ne change rien au fait qu’il s’agit d’une activité visée par l’article 90, précité. Par conséquent, la tardiveté de l’agrément est inopérante pour la question de l’application des dispositions de l’article 115, précité.

Cet argument est, partant, à rejeter également.

- Finalement, concernant l’argument tiré de la cause d’exclusion de l’article 115, précité, il suffit de relever qu’en l’espèce, les défendeurs ne sont pas et n’ont pas été déclarés coupables d’avoir provoqué intentionnellement l’accident. Il a été retenu à leur encontre l’infraction d’homicide involontaire. Il ne s’agit pas d’une infraction intentionnelle. Les développements des demandeurs concernant le principe d’unicité des fautes pénales et civiles n’ont rien à voir dans ce contexte, de même que ceux visant l’intention frauduleuse ou la prévisibilité de l’accident et le « dol indéterminé ».

Ce dernier argument est, dès lors, à rejeter également.

Il suit de ces développements que c’est à juste titre que la demande civile dirigée contre les défendeurs D, B, A et C a été déclarée irrecevable. 

Il s’ensuit que le jugement est à confirmer dans ses dispositions civiles.

 

PAR   CES   MOTIFS

 

la Cour d’appel, dixième chambre, siégeant en matière correctionnelle, statuant contradictoirement, les prévenus entendus en leurs explications et moyens de défense, les parties demanderesses et défenderesses au civil en leurs conclusions et le représentant du ministère public en son réquisitoire,

donne acte au mandataire de B qu’il comparaît volontairement pour voir statuer sur le mérite de l’appel dirigé contre le jugement du 13 octobre 2010 ;

joint les appels dirigés contre les jugements du 13 octobre 2010 et du 18 novembre 2010 ;

déclare irrecevable l’appel au civil de B ;

déclare recevables les autres appels ;

déclare irrecevables les demandes en nullité présentées par la défense de B ;

 

au pénal,

réformant,

ramène la peine d’emprisonnement prononcée en première instance à l’ encontre d’D de douze (12) à quatre (4) mois, avec maintien du sursis intégral à son exécution ;

maintient la peine d’amende prononcée à son encontre ;

ramène la peine d’emprisonnement prononcée à l’encontre de A de dix (10) à quatre (4) mois, avec maintien du sursis intégral à son exécution ;

maintient la peine d’amende prononcée à son encontre ;

ramène la peine d’emprisonnement prononcée à l’encontre de B de dix (10) à trois (3) mois, avec maintien du sursis intégral à son exécution ;

maintient la peine d’amende prononcée à son encontre ;

confirme le jugement entrepris pour le surplus dans ses dispositions pénales ;

condamne les quatre prévenus D, A, B et C solidairement aux frais de leur poursuite en instance d’appel, ces frais liquidés à 23,23 € pour chacun des quatre prévenus ;

 

au civil,

dit qu’il n’y a pas lieu de déférer une question préjudicielle à la Cour Constitutionnelle ;

confirme le jugement entrepris dans ses dispositions civiles ;

condamne les demandeurs au civil aux frais des demandes civiles en instance d’appel.

Par application des textes de loi cités par la juridiction de première instance en ajoutant les articles 202, 203 et 211 du code d’instruction criminelle et l’article 6 de la Convention européenne des Droits de l’Homme.

 

Ainsi fait, jugé et prononcé en audience publique par la Cour d'appel du Grand-Duché de Luxembourg, dixième chambre, siégeant en matière correctionnelle, à Luxembourg, Cité Judiciaire, Plateau du St. Esprit, où étaient présents:

Jean-Claude WIWINIUS, président de chambre

Joséane SCHROEDER, premier conseiller

Christiane RECKINGER, conseiller

Marie-Jeanne KAPPWEILER, avocat général

Marc SERRES, greffier

qui, à l'exception du représentant du ministère public, ont signé le présent arrêt.

 

 

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